Il serait logique de penser que la lutte contre les incendies de forêt combat le réchauffement climatique en favorisant le maintien des puits de carbone chargés d’expurger l’atmosphère du CO². Ce serait plutôt l’inverse, selon une récente étude...
Longtemps, les scientifiques ont été convaincus de la pertinence d’une lutte acharnée contre les incendies de forêt, qu’ils accusaient de réduire l’absorption du gaz carbonique (CO²) atmosphérique par les arbres détruits. En effet, la photosynthèse est un des principaux mécanismes contribuant au piégeage du carbone contenu dans la molécule de CO², dont seul l’oxygène est ensuite rejeté à l’état libre dans l’atmosphère.

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    Forêt de séquoias dans le Muir Woods National Monument. Crédit Commons.

    Forêt de séquoias dans le Muir Woods National Monument. Crédit Commons.

    Les petits incendies de forêt, généralement produits par la foudre, sont un phénomène courant et normal. Aux Etats-Unis, les autorités ont décidé de les combattre le plus efficacement possible et les moyens accordés à cette lutte n'ont cessé d'augmenter. Aussi, se développe-t-il de plus en plus de petits arbres et d'arbustes. Selon les scientifiques, la quantité de végétaux apparus suite à cette nouvelle politique permet d'absorber annuellement 50 millions de tonnes de CO², soit 14% de la valeur totale de la quantité piégée par l'ensemble des forêts des Etats-Unis.

    Faut-il incendier régulièrement les forêts ?

    Mais cet avis est peut-être totalement faux... Il émane de l'écologue Michael Goulden de l'Université de Californie, un Etat qui, justement, vient de connaître de terribles incendies et où l'on se pose beaucoup de questions sur la manière de les éviter. Goulden a comparé les données enregistrées depuis 1930 en 269 endroits différents de la forêt de Californie avec celles de 260 autres points de prélèvement effectués sur le même territoire à partir de 1990. Conformément aux estimations, le nombre d'arbres s'est accru de 4% durant cette période. Pourtant, dans cette zone précise, la quantité de carbonecarbone absorbée a, elle, diminué de 34%, indique l'article publié le 20 juin dernier par ce chercheur dans la revue Geophysical Research Letters.

    Les auteurs concluent que la croissance des jeunes arbres est entrée en concurrence avec celles des plus vieux, rendant ces derniers plus sensibles à la sécheresse, aux ventsvents, aux maladies et aux attaques des insectesinsectes, allant jusqu'à provoquer leur lente agonie. Et de souligner que la protection des forêts contre ce type d'incendies est contre-intuitif, car les arbres malades ou même mourants absorbent nettement moins de gaz carboniquegaz carbonique.

    « J'ai été vraiment interpellé par cette conclusion, car personne n'aurait pensé que ces petits arbres pourraient avoir un tel effet sur les plus grands », avoue Richard Houghton, du Centre de Recherches forestières de Falmouth (Massachusetts).
    Peter Teensma, bio-géographe pour le Département de l'Intérieur américain, annonce que ces résultats devraient influencer la politique de la lutte contre les incendies.

    Il devient envisageable d'organiser des feux de préventionprévention destinés à réduire la quantité de broussailles et d'arbustes dans les zones les plus denses afin d'éclaircir les régions où croissent les plus grands arbres. Une nouvelle politique d'incendies de forêt devrait être soumise dès l'année prochaine.