Ce 1er juillet 2015, à 2 heures du matin en France métropolitaine, il faudra retarder les montres d’une petite seconde. Très exceptionnellement, la minute entre 1 h 59 et 2 h durera une seconde de plus que la normale. Cette seconde supplémentaire, ou « intercalaire », permet de raccorder le temps astronomique irrégulier lié à la rotation de la Terre, avec l’échelle de temps légal extrêmement stable défini depuis 1967 par des horloges atomiques.

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    L’horloge parlante existe en France depuis 1933. Elle donne toujours l'heure, par téléphone et par Internet. © Pascal Blondet, Observatoire de Paris

    L’horloge parlante existe en France depuis 1933. Elle donne toujours l'heure, par téléphone et par Internet. © Pascal Blondet, Observatoire de Paris

    La décision d'introduire cette seconde intercalaire le 30 juin 2015, juste avant minuit dans l'échelle de temps UTC (Universal Time Coordinated), est prise au niveau international par la composante « Service de la rotation de la Terre » du IERS (International Earth Rotation and Reference Systems Service). Implantée à l'Observatoire de Paris au sein du département Syrte (Observatoire de Paris, CNRS, UPMC, LNE), cette entité mesure les variations de l'orientation de la Terre et est responsable de la prédiction et de l'annonce de ces secondes intercalaires. La dernière en date remonte à 2012. En France, c'est le Laboratoire national de métrologie et d'essais (LNE-Syrte) de l'Observatoire de Paris qui réalise les références nationales de temps et qui est donc en charge d'appliquer la seconde intercalaire.

    La rotation de la Terre sur elle-même ralentit sur le long terme à cause principalement des effets d'attraction luni-solaire. En outre, notre planète est perturbée par ses constituants internes (noyau, manteaumanteau) et externes (atmosphèreatmosphère, océans) qui modifient sa rotation. À ces effets s'ajoute le fait que le choix de la seconde atomique fut déterminé à partir de la durée de seconde dite astronomique observée au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, laquelle était sensiblement plus courte qu'aujourd'hui.

    À présent, le temps est mesuré par des moyens insensibles aux humeurs de la Terre, grâce à près de 400 horloges atomiques appartenant à plusieurs pays du globe, dont 25 en France. Ensemble, elles permettent au BIPM (Bureau international des poids et des mesures) de calculer le Temps Universel CoordonnéTemps Universel Coordonné. Actuellement le Temps Atomique est réalisé avec une incertitude de 10-16.

    Salle de contrôle du temps légal français à l’Observatoire de Paris. © Observatoire de Paris, Syrte

    Salle de contrôle du temps légal français à l’Observatoire de Paris. © Observatoire de Paris, Syrte

    La seconde intercalaire remise en question

    L'UTC est si régulier et la rotation de la Terre si fantaisiste qu'il apparaît progressivement un décalage entre celui-ci et le temps des jours et des nuits déterminé par la rotation de la Terre sur elle-même. Ce décalage pouvant être gênant pour certaines applications, un accord international signé en 1972 stipule que la différence entre les deux ne doit jamais dépasser une seconde. C'est à cela que servent les secondes intercalaires : quand le décalage entre UTC et le temps lié à la rotation de la Terre s'approche d'une seconde, il faut recaler ces deux échelles entre elles grâce à l'insertion d'une seconde intercalaire dans UTC. Depuis l'instauration de ce système en 1972, on aura ajouté 26 secondes au 1er juillet prochain.

    Ce système est un bon compromis pour donner un temps légal UTC proche du temps de la rotation terrestre, cependant il présente des inconvénients pour diverses communautés notamment celles liées à la navigation par satellites, aux réseaux de télécommunications ou aux marchés financiers. Des discussions internationales ont lieu depuis une quinzaine d'années pour éventuellement supprimer la procédure actuelle comprenant l'introduction de secondes intercalaires.

    Une réunion organisée dans le cadre de l'UIT (Union internationale des télécommunicationsUnion internationale des télécommunications) aura lieu en novembre 2015 à Genève. Elle a pour but de discuter au niveau scientifique du maintien ou pas de la procédure actuelle comprenant l'introduction de secondes intercalaires pour synchroniser UTC avec la rotation de la Terre.

    Si la seconde intercalaire était supprimée, UTC serait alors découplé de la rotation de la Terre et nous n'aurions plus à ajouter de secondes intercalaires mais l'écart s'agrandirait au fils des années. La connaissance très précise de l'orientation de la Terre n'en demeurerait pas moins fondamentale.