Le bore est un élément chimique étonnant. Son étude a révélé plusieurs surprises aux chimistes et aux physiciens depuis presque deux siècles. La dernière en date serait que ce métalloïde se transforme en métal supraconducteur quand il est sous forme de feuillets.

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    Le bore n'est pas un métal : il fait partie des métalloïdes, c'est-à-dire des éléments chimiques qui ne sont ni des métauxmétaux, ni des non-métaux. Pendant longtemps, l'Homme ignorait son existence et il a fallu attendre 1808 pour que le chimiste français Louis Joseph Gay-Lussac annonce sa découverte, indépendamment et en même temps que Sir Humphry Davy à Londres. En fait, les deux hommes étaient tombés sur un composé à base de bore dans leurs expériences. Puis, en 1909, on réussit à obtenir du bore pur à 99 %.

    Les physiciensphysiciens qui l'étudièrent constatèrent qu'avec ses trois électrons de valence, le bore se situait, dans le tableau périodique des élémentstableau périodique des éléments, entre les métaux et les isolants - plus près des premiers que des seconds.

    De minuscules modifications de température ou de pression, voire la seule présence d'impuretés, suffisent à le faire passer d'un état à un autre. On ne sera donc pas étonné outre mesure de la récente découverte théorique faite par des membres de la Rice University (Houston, États-Unis) et qui concerne des feuillets d'atomes de bore, comme ils l'expliquent dans un article publié dans Nano Letters.

    Dans le composé 2D découvert par les physiciens, les atomes de bore forment une sorte de réseau hexagonal, cousin de celui du graphène. Les électrons (représentés par les sortes de toupies bleues sur cette illustration d'artiste) y forment des paires de Cooper avec des spins parallèles mais de sens opposés (les flèches). © Evgeni Penev, Rice University

    Dans le composé 2D découvert par les physiciens, les atomes de bore forment une sorte de réseau hexagonal, cousin de celui du graphène. Les électrons (représentés par les sortes de toupies bleues sur cette illustration d'artiste) y forment des paires de Cooper avec des spins parallèles mais de sens opposés (les flèches). © Evgeni Penev, Rice University

    Les physiciens sont arrivés à plusieurs conclusions en ce qui concerne des structures 2D régulières faites d'atomes de bore et constituant des analogues du graphène. Il s'agit tout d'abord d'un matériaumatériau métallique et pas d'un métalloïde. Ensuite, il s'agit d'un supraconducteursupraconducteur conventionnel à basses températures. Les électrons de conduction peuvent donc s'y associer en paires de Cooper pour devenir une sorte de superfluidesuperfluide s'écoulant sans résistancerésistance grâce à des interactions avec les phononsphonons, en conformité avec la théorie BCS de la supraconductivitésupraconductivité.

    Un des premiers matériaux 2D supraconducteurs ?

    Il y a quelques années, d'autres chercheurs avaient utilisé l'ordinateurordinateur pour simuler, grâce aux lois de la physique quantique, une certaine phase cristalline en 3D de tétraborure de fer (FeB4). Ils avaient également prédit que ce serait un supraconducteur conventionnel. Cette prédiction était exacte.

    Dans le cas présent, le travail des chercheurs de la Rice University repose également sur des calculs effectués sur ordinateur. Un groupe de physiciens chinois vient par ailleurs d'annoncer qu'ils étaient parvenus à fabriquer des feuillets de bore conformes à ceux prédits par leurs collègues états-uniens.

    Il reste cependant à vérifier que ce composé est bien supraconducteur. Si tel est le cas, il s'agirait d'un des premiers matériaux en 2D exhibant le phénomène de supraconductivité. Les physiciens se sont intéressés à ces feuillets de bore à cause du diborure de magnésiummagnésium (MgB2). C'est une céramiquecéramique présentant une phase supraconductrice en dessous d'une température de 39 kelvinskelvins, la plus élevée pour les matériaux supraconducteurs conventionnels. En fait, elle ne relève que partiellement de la théorie BCS. Or les chercheurs pensent que, dans cette céramique, les atomes de bore forment également des sortes de feuillets. Paradoxalement, ceux-ci pourraient peut-être nous aider à comprendre la supraconductivité à haute température critiquetempérature critique.