Chaque année, durant un mois, lors des saisons de fonctionnement du LHC, les physiciens font entrer en collision des ions lourds pour sonder les mystères du plasma de quarks-gluons, le quagma. Ils viennent de battre un record en multipliant par presque deux les énergies mises en jeu. De quoi mieux comprendre le Big Bang.

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    Il n'y a pas le moindre doute que les protons et les neutrons qui composent les noyaux de la matière normale sont des assemblages de quarks et de gluons confinés par la nature des forces nucléaires fortes décrites par les équationséquations de la chromodynamique quantiquechromodynamique quantique, la QCD. Cette théorie a d'ailleurs permis récemment de prédire avec encore plus de précision la massemasse des protons et des neutrons, une valeur déjà connue approximativement par le calcul depuis les années 1980.

    Toutefois, la QCD nous dit aussi que dans un gazgaz de protons et de neutrons comprimé et porté à une température 100.000 fois plus élevée que celle régnant à l'intérieur du SoleilSoleil, ces nucléonsnucléons vont tout de même « fondre ». Le résultat sera un liquideliquide ultradense dans lequel les quarks et les gluons se comporteront comme s'ils étaient libres. Mais dès que la température va descendre en dessous d'environ mille milliards de degrés, ce plasma de quarks-gluons, parfois appelé quagma ou encore QGP, se condensera en une myriademyriade d'hadronshadrons généralement instables au sein desquels quarks et gluons seront à nouveau confinés.


    L'expérience Alice survolée avec drone. © ALICE Experiment, YouTube

    Toujours plus près de l'instant zéro au LHC

    Les physiciensphysiciens étudient depuis quelques décennies ce quagma dont ils ont démontré l'existence. Ils peuvent de cette façon remonter à une période de l'histoire de l'universunivers observable où celui-ci était âgé de moins d'un millionième de seconde. Cette phase de la matière n'a pas encore livré tous ses secrets et elle devrait permettre de remonter plus loin dans le passé du CosmosCosmos.

    Mais pour cela, il faut injecter des paquetspaquets de protons et des neutrons à des énergiesénergies sans cesse plus élevées. C'est ce que font actuellement les chercheurs du CernCern au LHCLHC. Ces scientifiques viennent d'annoncer avoir battu un nouveau record en faisant entrer en collision des ionsions de plombplomb à une énergie inédite.

    Une des premières collisions d'ions lourds avec des faisceaux stables, enregistrée par Atlas en novembre 2015. Les trajectoires reconstruites des particules dans le cœur du détecteur sont en orange. Les barres vertes et jaunes indiquent des mesures de dépôts d'énergie. © Cern

    Une des premières collisions d'ions lourds avec des faisceaux stables, enregistrée par Atlas en novembre 2015. Les trajectoires reconstruites des particules dans le cœur du détecteur sont en orange. Les barres vertes et jaunes indiquent des mesures de dépôts d'énergie. © Cern

    Profitant de la modification du LHC pour son fameux « run 2 », qui permet des collisions de protons à 13 TeV avec une plus grande luminositéluminosité, les chercheurs avaient commencé à faire circuler ces faisceaux d'ions lourd en début de matinée le 17 novembre 2015. Après la vérification du bon fonctionnement de l'installation, ces faisceaux sont finalement entrés en collision le 25 novembre 2015 dans les quatre grandes expériences du LHC.

    Bien que le détecteur Alice ait été spécifiquement conçu pour l'étude du quagma, ses trois cousins, Atlas, LHCb et CMSCMS, peuvent en effet eux aussi apporter leurs contribution à l'étude de ce nouvel état de la matièreétat de la matière.