Des chercheurs américains ont réussi, pour la première fois, à refroidir un liquide avec un laser. Cette découverte pourrait notamment permettre de refroidir localement des cellules et ainsi réaliser de véritables films pour suivre pas à pas ce qui se passe lorsqu'elles se divisent ou se réparent.

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    Cette année 2015 est marquée par le centenaire de la découverte de la théorie de la relativité générale d'EinsteinEinstein. Dans deux ans, ce sera l'occasion de fêter la découverte des principes de l'effet laser, toujours par le génial physicienphysicien. Remarquablement, une équipe de chercheurs de l'université de Whashington vient d'utiliser un laser pour refroidir de plus de 21 °C un liquide tout en mesurant cette baisse de température à l'aide du mouvement brownien, lui aussi théorisé par Einstein, comme elle l'explique dans un article sur arXiv.

    Refroidir un corps à l'aide d'un faisceau de lumière, qui plus est produit par effet laser nous semble contre-intuitif tellement nous associons lumière et chaleur. Et pourtant, dès 1929, après la constitution officielle de la théorie quantique en 1927 lors du fameux congrès Solvay, le physicien Peter Pringsheim avait prédit une telle possibilité. Elle a été réalisée une première fois avec un solidesolide en 1995 par une équipe du célèbre laboratoire de Los Alamos, aux États-Unis.

    Sur cette image, le liquide émettant une lumière verte est refroidi par effet laser en exploitant le phénomène de déplacement anti-Stokes. © Dennis Wise,<em> University of Washington</em>

    Sur cette image, le liquide émettant une lumière verte est refroidi par effet laser en exploitant le phénomène de déplacement anti-Stokes. © Dennis Wise, University of Washington

    Mais comment peut-on expliquer un tel phénomène ? Il faut savoir que lorsqu'un corps est soumis à un rayonnement centré sur une raie spectraleraie spectrale bien particulière, il arrive que les photonsphotons émis soient plus énergétiques que les photons incidents et donc aient une fréquencefréquence plus élevée. C'est le phénomène inverse en quelque sorte de celui qui est appelé le déplacement de Stokes et qui se produit lorsque la raie de nouveau émise par un système atomique ne correspond pas à celle absorbée avec une fréquence plus basse.

    La lumière peut refroidir grâce au déplacement anti-Stokes

    L'autre processus est appelé fort logiquement déplacement anti-Stokes ; il peut emporter l'énergie thermiqueénergie thermique initialement sous forme de phonons dans un solide cristallisé et donc refroidir ce dernier - rappelons que les phononsphonons sont l'équivalent des photons mais pour les ondes élastiquesondes élastiques dans un solide. De la chaleur s'y retrouve sous cette forme puisque l'agitation thermique fait osciller les atomesatomes autour de leurs positions d'équilibre dans un cristal. Dans un réseau cristallinréseau cristallin très pur comprenant des atomes d'ytterbiumytterbium sous forme d'ionsions, ces derniers peuvent donner lieu à un phénomène de fluorescence anti-Stokes particulièrement important. Les chercheurs s'en sont rapidement servi pour atteindre des températures assez basses, par exemple 208 K (-65 °C).

    Si les physiciens de l'université de Whashington ont tant voulu refroidir des liquides par effet laser, c'est avant tout à cause des nombreuses applicationsapplications qui en découleraient. Dans le cas des solides, l'une des plus évidentes seraient de refroidir des semi-conducteurssemi-conducteurs, plus exactement des puces d'ordinateursordinateurs, afin de boosterbooster leurs performances. On sait en effet que l'élévation de température des composants électroniques à cause de l'augmentation de la fréquence des calculs limite cette même augmentation.

    Albert Einstein s'est vu attribuer un prix Nobel pour ses travaux sur l'effet photoélectrique. Ils allaient le conduire à la découverte de l'effet laser en 1917. © InformiguelCarreño, Wikimedia Commons, CC by-sa 4.0

    Albert Einstein s'est vu attribuer un prix Nobel pour ses travaux sur l'effet photoélectrique. Ils allaient le conduire à la découverte de l'effet laser en 1917. © InformiguelCarreño, Wikimedia Commons, CC by-sa 4.0

    Dans le cas des liquides, pouvoir refroidir des cellules, au moins localement, devrait permettre de mieux comprendre les processus biochimiques à l'œuvre, par exemple ceux qui permettent la division cellulaire. Qui sait quels bénéfices nous pourrions en tirer pour lutter contre des maladies comme le cancer ?

    Nous n'en sommes par encore là. Tout ce que les chercheurs ont réussi à faire c'est synthétiser à plus bas prix un nanocristalnanocristal à base d'ytterbium pouvant être refroidi dans un liquide en utilisant un laser dans le domaine de l'infrarougeinfrarouge (un tel laser émet un rayonnement qui est moins destructeur pour des cellules vivantes). Ils se sont servis de ce nanocristal pour refroidir également des solutions salines et d'autres utilisées comme milieu de culture en biologie cellulairebiologie cellulaire et pour la génétiquegénétique.