Une équipe du MIT poursuit la quête de la Witricity, l'électricité sans fil. Ses derniers résultats montrent la possibilité de recharger plusieurs appareils à distance. Le rendement n'est pas bon et le système expérimental a besoin d'être amélioré. Mais le concours continue...

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    L'équipe de l'expérience de 2007 pose entre les deux antennes, émettrice à gauche, réceptrice à droite. L'ampoule électrique allumée démontre que la présence d'obstacles humains entre émetteur et récepteur ne gêne pas la transmission. Au premier rang, Peter Fisher à gauche et Robert Moffatt à droite. Au milieu, Marin Soljačić. Au troisième rang, de gauche à droite, André Kurs, John Joanopoulos et Aristeidis Karalis. © Aristeidis Karalis

    L'équipe de l'expérience de 2007 pose entre les deux antennes, émettrice à gauche, réceptrice à droite. L'ampoule électrique allumée démontre que la présence d'obstacles humains entre émetteur et récepteur ne gêne pas la transmission. Au premier rang, Peter Fisher à gauche et Robert Moffatt à droite. Au milieu, Marin Soljačić. Au troisième rang, de gauche à droite, André Kurs, John Joanopoulos et Aristeidis Karalis. © Aristeidis Karalis

    Il suffirait de rentrer chez soi pour que le mobilemobile ou l'ordinateur portable se rechargent sans intervention aucune. Le téléviseur, l'imprimante et le lecteur de DVD ne seraient plus reliés aux prises de courant. Bienvenue dans le monde sans fil, auquel rêvent un nombre respectable d'ingénieurs et de scientifiques... Le premier d'entre eux fut probablement Nikola Tesla, génial inventeur, à qui rendent d'ailleurs hommage les trois signataires d'un article qui vient de paraître dans la revue Applied Physics Letters.

    André Kurs, Robert Moffatt et Marin Soljačić travaillent au MIT et étudient depuis plusieurs années la Witricity (pour wireless electricity, électricité sans filélectricité sans fil), un domaine également connu sous le nom de WREL (Wireless Resonant Energy Link). En 2006, le troisième, avec ses collègues Aristeidis Karalis et John. D. Joannopoulos, démontrait la possibilité théorique d'un procédé original de transmission d'énergie prenant la forme de deux anneaux de cuivrecuivre, consistant à utiliser un champ magnétiquechamp magnétique entre deux anneaux de cuivre. Si un champ est créé dans l'un d'eux, l'autre peut, si l'on s'y prend bien, entrer en résonancerésonance. Il est alors possible de récupérer un courant électriquecourant électrique. Entre les deux n'est créé qu'un champ magnétique tout à fait inoffensif, expliquent les chercheurs.

    En 2007, l'équipe a montré un prototype fonctionnel, constitué de deux anneaux de 60 centimètres de diamètre. L'un, alimenté par un courant électrique, générait un champ magnétique. L'autre, installé à deux mètres de distance, envoyait le courant reçu à une ampoule électrique de 60 wattswatts. Et fiat luxlux ! Le rendement, de 40%, est faible (60% de l'énergieénergie est donc perdue...) mais la lampe s'allume.

    Il vaut mieux tout recharger en même temps...

    Cette fois, les expérimentateurs ont réalisé un modèle avec deux anneaux de tailles différentes, plus grande pour l'émetteur, avec un objectif plus précis. Il s'agissait d'expédier l'énergie moins loin mais vers deux dispositifs en même temps. L'idée ultime est d'installer un anneau émetteur dans un murmur ou un plafond et de minuscules récepteurs dans des appareils électroniques, qui se rechargeraient alors automatiquement dès qu'ils passeraient dans les parages.

    Pour l'expérience, l'anneau émetteur mesurait un mètre carré (un peu moins que dans le prototype de 2007) et les récepteurs 0,07 mètre carré. Le résultat est étonnant : alors que le rendement obtenu pour chaque récepteur indépendamment n'est que de 20%, il grimpe à plus de 30% si deux anneaux récepteurs sont installés l'un près de l'autre. Le fait de recharger deux appareils au lieu d'un seul double donc presque le rendement ! Les deux anneaux récepteurs résonnent ensemble, expliquent les auteurs. Bien que surprenant, ce résultat est prédit par la théorie, laquelle indique qu'en multipliant les récepteurs, on pourrait atteindre les 100%.

    La puissance transmise était d'environ 100 watts mais pourrait facilement être augmentée, estiment les chercheurs. La pratique, cependant, reste à améliorer largement. Pour que tous les anneaux entrent en résonance, il faut peaufiner les réglages, ce qui réclame apparemment autant de doigté et de patience que pour accorder un violon. L'équipe convient qu'il reste du chemin à faire pour aboutir à un système de recharge intégralement automatisé. Par ailleurs, il faudra aussi réduire de beaucoup la taille des récepteurs pour les faire entrer dans un téléphone portable. Mais l'équipe y croit.

    Ces expériences ont désormais dépassé le cadre de la recherche fondamentale. Intel et Sony s'y intéressent activement. Nous saurons peut-être dans la décennie à venir si, une fois de plus, Nikola TeslaNikola Tesla avait vu juste...