Le concept d'ordinateur optique fait rêver depuis les années 1960. L'utilisation de photons à la place des électrons aurait en effet de multiples avantages. Si, en pratique, un tel ordinateur reste difficile à réaliser, des chercheurs sont tout de même arrivés à construire des puces optroniques, mariant les deux technologies.

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    L'invention du transistor en 1947 par les Américains John Bardeen, William Shockley et Walter Houser Brattain, chercheurs de la compagnie Bell Telephone, a révolutionné l'électronique au moment où les ordinateurs eux-mêmes commençaient leur essor. Les sciences de l'informatique ont ensuite progressé de pair avec l'électronique et la fameuse loi de Moore nous accompagne depuis lors. Le destin de l'humanité en a été transformé et notre civilisation est devenue sans cesse plus gourmande en puissance de calcul et en dispositifs intelligents miniaturisés ; c'est pourquoi de nombreux laboratoires de par le monde cherchent à concevoir des puces électroniques de plus en plus performantes.

    Les lois de la physiquephysique, que ce soient celles de la thermodynamique ou de la physique quantique, contraignent cependant ces recherches. En effet, les courants d'électronsélectrons dans les solidessolides se font à des vitessesvitesses déterminées et conduisent à des dégagements de chaleurchaleur. Or, pour augmenter la vitesse des calculs et leur nombre, il faut aussi pouvoir augmenter ces vitesses (par exemple avec du graphène). La production de chaleur augmente tout autant, notamment avec des ordinateurs dont la forme compacte minimise les temps de trajet entre les différents sous-systèmes.

    Malheureusement, la chaleur affecte les performances des puces. Il faut donc refroidir les supercalculateurs. Le fameux Cray-2, par exemple - qui, au moment de sa mise en service, était l'un des premiers ordinateurs à dépasser la barre du gigaflopsgigaflops (un milliard d'opérations par seconde) -, possédait des centaines de milliers de puces baignant dans un liquide de refroidissementliquide de refroidissement utilisé comme isolant électrique et fluide caloporteurfluide caloporteur : le Fluorinert.

    De gauche à droite sur cette image prise en 1948 : John Bardeen, William Shockley et Walter Houser Brattain. Les trois chercheurs ont reçu le prix Nobel de physique pour leur invention du transistor à semi-conducteurs. © DP

    De gauche à droite sur cette image prise en 1948 : John Bardeen, William Shockley et Walter Houser Brattain. Les trois chercheurs ont reçu le prix Nobel de physique pour leur invention du transistor à semi-conducteurs. © DP

    Les ingénieurs ont pensé à une solution plus radicale il y a des décennies pour pallier cette difficulté liée à la chaleur : se passer des courants d'électrons en utilisant des photonsphotons, c'est-à-dire de la lumière. Malheureusement, la mise au point des ordinateurs optiques s'est révélée plus difficile que prévu. Le concept n'a pas été abandonné mais les recherches à son sujet sont moins à la mode qu'elles ne l'étaient encore dans les années 1980 et 1990.

    Une puce optronique aussi performante que les puces classiques

    Une voie possible pour contourner les obstacles rencontrés est de concevoir des ordinateurs ni complètement électroniques ni complètement photoniques. Une illustration de la nature des puces qui pourraient constituer ces ordinateurs - qui seraient du domaine de l'optronique -, peut se voir dans les travaux récemment publiés dans un article de Nature par un groupe de chercheurs du MIT (Massachusetts Institute of Technology) et des universités de Berkeley et du Colorado, aux États-Unis.

    L'idée est, en quelque sorte, d'effectuer des calculs avec des transistors conventionnels et de les connecter avec des faisceaux de photons. La performance accomplie par les chercheurs est particulièrement intéressante du fait qu'ils utilisent des processus de fabrication conventionnelle des puces (avec des galettes de siliciumsilicium) pour construire simultanément des composants relevant plus proprement de l'optique et d'autres de l'électronique. Il s'agissait en effet de pouvoir construire sur une seule puce des transistors, des photodétecteurs, des modulateurs, des filtres optiques, des guides d'ondes, bref, ce qu'il faut pour réaliser l'interface entre ces composants et donc convertir des signaux à base de photons en ceux à base d'électrons et inversement.

    Au final, la puce optronique contient 850 composants optiques et 70 millions de transistors, ce qui est peu par rapport aux puces standard possédant plus d'un milliard de transistors. Cette nouvelle puce fonctionne pourtant aussi bien que les puces conventionnelles. Une progression semble donc possible dans cette voie qui pourrait conduire à certains ordinateurs du futur.