Le 15 juillet prochain, Ariane 5 lancera MSG-4, le dernier satellite Météosat de seconde génération (MSG). C’est une page de l’histoire des satellites qui se tourne car les Météosat de première et seconde génération sont des satellites stabilisés en rotation. Ce ne sera plus le cas à l'avenir. L'histoire de la construction de ces satellites, étalée sur plusieurs années, illustre bien les difficultés de ce métier, comme nous le raconte Denis Montet, directeur du programme MSG pour Thales Alenia Space, l'industriel en charge du programme Météosat.

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    S'il est toujours difficile de prévoir le temps qu'il fera demain, les satellites Météosat ont « augmenté le degré de fiabilité des prévisions avec des prévisions à 5 jours régulières et depuis peu des prévisions données au grand public qui vont de 5 à 7 jours », nous expliquait Jean-Jacques Juillet, le directeur des programmes observation optique et des sciences chez Thales Alenia Space, l'industriel en charge du programme Meteosat lors du lancement de MSG-3 en juillet 2012.

    C'était un des buts recherchés lorsqu'en 1995 l'Agence spatiale européenneAgence spatiale européenne donne le feu vert à cette seconde génération de satellite Météosat. Comme nous l'explique, Denis Montet, directeur du programme MSG pour Thales Alenia Space, « ça n'a pas seulement été un défi scientifique ». Ce programme a « aussi apporté à la société bien plus qu'on ne le pense ». Par rapport à la génération précédente, « sept satellites lancés entre novembre 1977 et septembre 1997 », c'était un challenge technique et une « réelle performance de développer et construire un nouveau satellite aux performances plus qu'augmentées en seulement 5 ans ! ».

    Le satellite MSG 4 lors d'essais avant l'installation de ses panneaux solaires (Cannes, novembre 2014). © Rémy Decourt

    Le satellite MSG 4 lors d'essais avant l'installation de ses panneaux solaires (Cannes, novembre 2014). © Rémy Decourt

    Des satellites spinnés pour la météorologie spatiale

    Comme pour la première génération, la plateforme des Météosat de seconde génération « est spinnée » et demande un équilibrage quasi parfait : c'est-à-dire qu'ils tournent perpétuellement autour de leur axe principal d'inertie à une vitesse constante, à 100 tours par minute, toute leur vie opérationnelle. Leur stabilité est donc celle d'une toupie, en mieux. À la différence d'une toupie sur Terre, en effet, le satellite, dans l'espace, n'est soumis à aucun frottement qui viendrait freiner sa rotation. « Seules de petites manœuvres sont réalisées de temps en temps pour maintenir le satellite à sa position orbitaleorbitale. » C'est le principal intérêt de ces satellites qui n'ont donc pas besoin d'être maintenus en poste en permanence.

    L'autre avantage, c'est l'effet barbecue. À l'intérieur du satellite en rotation, « la température est homogène et stable ». Toutefois, ces satellites ont comme inconvénient qu'à chaque tour, « les instruments ne sont pointés vers la Terre que pendant 5 % de la période de rotationpériode de rotation ». Ils ne peuvent donc rien mesurer 95 % du temps ! C'est pourquoi, pour la troisième génération de satellite Météosat il a été décidé d'utiliser une plateforme stabilisée selon les trois axes. Ils « permettront aux instruments d'être en permanence pointés vers la Terre » et par conséquent de porter le temps d'observation des instruments à 100 %, « indispensable pour satisfaire les besoins futurs ».

    « Les performances des satellites MSG ont été améliorées de façon à surpasser en capacité les satellites Météosat en service mais aussi ceux des États-Unis. » De trois bandes avec la première génération (cinq pour les modèles américains), cette deuxième génération de satellite Météosat en compte douze allant du visible à l'infrarougeinfrarouge. Surtout, ils sont conçus pour fournir une image toutes les 15 minutes contre 30 minutes pour les Météosat de première génération. Point intéressant, pendant le développement des satellites, les équipes de Thales Alenia Space « ont confirmé qu'il était possible que les MSG produisent une image toutes les 5 minutes concentrée sur l'Europe (entre 13 et 70° nord) ».

    Apprendre à construire des satellites en série

    Pour construire ces satellites, Thales Alenia Space a dû s'adapter à la réalisation de satellites en série. C'était en effet la « première fois que l'entreprise construisait quatre satellites identiques ». La société se dit aujourd'hui « leader mondial dans la conception et la réalisation de constellationconstellation telecom en orbiteorbite moyenne et basse » avec 117 satellites (12 O3b, 81 Iridium NEXT et 24 Globalstar Second Generation).

    À l'origine du programme, seulement trois satellites Météosat de deuxième génération étaient prévus. Mais l'Agence spatiale européenne et Eumetsat, l'organisation européenne pour l'exploitation des satellites météorologiquesatellites météorologique, ont commandé un quatrième satellite afin « d'attendre plus sereinement la troisième génération dont le lancement du premier exemplaire est prévu en 2018 et d'éviter tout risque de rupture dans la continuité de la mission de transmission des données météorologiques ».

    Dans l'usine cannoise de Thales Alenia Space, où ont été construits les quatre satellites Météosat de seconde génération, le dernier de la série est ici en cours d'intégration (octobre 2012). © Rémy Decourt

    Dans l'usine cannoise de Thales Alenia Space, où ont été construits les quatre satellites Météosat de seconde génération, le dernier de la série est ici en cours d'intégration (octobre 2012). © Rémy Decourt

    Comment conserver un satellite au sol ?

    Bonne surprise, en 2015, les trois MSG (le premier ayant été lancé en août 2002) sont toujours en activité et opérationnels tout comme le dernier satellite de la première génération, 18 ans après son lancement en septembre 1997 et actuellement positionné au-dessus de l'océan Indien. MSG-3 réalise la mission principale d'acquérir une image toutes les 15 minutes, MSG-2 fournit des images toutes les 5 minutes centrées sur l'Europe, MSG-1 étant le back-up commun aux deux missions.

    Pour la constructionconstruction de ces engins, il a fallu résoudre un problème pas si simple : le maintien, ou « stockage » d'un satellite pour une longue duréedurée. Il est en effet parfois nécessaire de les « stocker si l'on n'a pas besoin d'eux en orbite à la date prévue ». Pour l'essentiel, « il s'agit simplement de l'entreposer dans un coin d'une salle blanche ou dans un conteneur dédié, et de le surveiller de temps en temps ». Mais c'est au moment de son déstockage que cela peut se corser. « La préoccupation est alors de s'assurer qu'il est toujours fonctionnel et que les performances n'ont pas été altérées ni modifiées. De plus, il y a un risque certain d'obsolescence des moyens sols, de sorte que l'on doit s'assurer dès la mise en stockage du satellite que quelle que soit la période à laquelle il sera remis en service, on trouvera des pièces de rechanges nécessaires. »

    Ainsi, MSG-3 a été stocké pendant huit ans et MSG-4 à peu près autant. Si l'on prend l'exemple de MSG-3, le satellite a été stocké en juin 2004 et lancé en juillet 2012. « Huit ans après, les performances étaient identiques. » Même chose pour MSG-4. Ce satellite dont l'intégration a commencé en janvier 2006 a été déclaré bon pour le service en 2015.