Dans le halo de la Voie lactée, en marge du disque galactique, des astronomes ont repéré 13 étoiles dont les mouvements particuliers pourraient trahir l'appartenance à une galaxie naine, aujourd’hui démantelée. Il pourrait s’agir des restes d’une collision opérée il y a quelques milliards d’années. Pour en savoir plus, les chercheurs tentent d’identifier la victime.

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    Une galaxie spirale comme la nôtre, la Voie lactée, concentre l'essentiel de ses troupes - étoiles (environ 200 milliards de masses solaires), gaz et poussière - dans un disque de 100.000 années-lumière de diamètre, boursoufflé au centre (le bulbe galactique). Le halo est la gigantesque sphère (peut-être 300.000 années-lumière de rayon) qui l'enveloppe. Dans ces régions lointaines, la densité de population stellaire y est beaucoup plus faible que dans le disque où nous nous trouvons (nous sommes à quelque 26.000 années-lumière du centre).

    Depuis la Terre et des observatoires spatiaux comme Hubble, situés dans la proche banlieue de notre planète, des astronomesastronomes qui s'interrogent sur les origines et l'évolution de notre galaxie, tout en essayant de reconstituer le plus fidèlement possible sa structure, recherchent et scrutent les étoiles situées dans les limbeslimbes de la Voie lactéeVoie lactée. Pour les chercheurs, il est question de les caractériser et de détailler leurs vélocités. L'idée est que, à de si grandes distances, leurs orbitesorbites lentes (c'est la même chose que dans notre Système solaireSystème solaire : la révolution de la lointaine PlutonPluton est beaucoup plus lente que celle de MercureMercure, proche du SoleilSoleil) conservent encore celles de leurs origines.

    Le mouvement des étoiles devant la galaxie d'Andromède

    Voici trois ans, profitant d'observations par HubbleHubble de notre grande voisine, la galaxie d’Andromède, l'équipe d'Alis Deason (de l'université de Californie) avait établi le mouvementmouvement d'une douzaine d'étoiles, au premier plan, appartenant à notre halo galactique. Leur enquête a indiqué qu'elles se situent approximativement à 65.000 années-lumière du bulbe central, aux limites entre le halo interne et externe.

    « Regarder le mouvement des étoiles devant des galaxies revient à regarder des cheveux humains pousser à la surface de la LuneLune depuis la Terre », commente Puragra Guha Thakurta, de l'université de Californie. Eh bien, armé de patience et d'une vision perçante, cela devient possible.

    Les mouvements de 13 étoiles du halo (<em>Shell</em>, en anglais sur le schéma, qui signifie « coquille ») de la Voie lactée (<em>Milky Way Galaxy</em>) étudiés alors qu’elles se déplacent devant la galaxie d’Andromède (<em>Andromeda Galaxy</em>), suggèrent qu’elles appartiennent aux restes d’une galaxie naine. © Nasa, Esa, A. Feild

    Les mouvements de 13 étoiles du halo (Shell, en anglais sur le schéma, qui signifie « coquille ») de la Voie lactée (Milky Way Galaxy) étudiés alors qu’elles se déplacent devant la galaxie d’Andromède (Andromeda Galaxy), suggèrent qu’elles appartiennent aux restes d’une galaxie naine. © Nasa, Esa, A. Feild

    Souhaitant aller plus loin et compléter les représentations spatiales de ces 13 étoiles, Emily Cunningham, également de l'université de Californie à Santa Cruz, et ses collaborateurs, ont ajouté une dimension en extrayant de leurs spectresspectres des données sur leurs déplacements le long de la ligne de mire.

    Il leur est alors apparu, de par le mouvement propre de ces étoiles, qu'elles ébauchent une structure en forme de coquille. Si cela se confirme à travers des observations ultérieures, il pourrait s'agir alors, comme l'indique l'auteure principale de cette étude, « d'une relique d'un évènement d'accrétionaccrétion du passé ».

    Le fantôme d'une galaxie naine

    Les chercheurs pensent surtout et avant tout à une galaxie nainegalaxie naine. C'est en quelque sorte son fantôme que l'on entraperçoit. Ce sont là des traces de sa collision et de la mêlée dans les régions les plus reculées de notre galaxie.

    C'est un phénomène qui s'est produit de nombreuses fois au cours des milliards d'années d'évolution de la Voie lactée (il en est de même pour ses paires) comme le suggèrent les modèles. Les galaxies sont en effet cannibales. Entraînées par les forces gravitationnellesforces gravitationnelles, les moins massives se font étirer et dévorer, pour ne pas dire dépecer, par les plus grosses. Cela a sans doute commencé par des poissonspoissons un peu plus gros qui ont mangé les plus petits autour d'eux. On le voit encore aujourd'hui avec, entre autres, les Petits et Grands Nuages de MagellanGrands Nuages de Magellan, deux galaxies naines toutes proches qui ont entamé, il y a quelques centaines de millions d'années, une danse fatale avec la Voie lactée...

    Dans l'espoir d'identifier la victime et les autres (savoir quelles étaient leurs tailles, quand cela s'est-il produit, quels sont les profils de leurs étoiles, etc.), les chercheurs se sont lancés dans un programme de recherche baptisé HALO7D afin de recueillir des observations détaillées d'un échantillon élargi à des centaines d'étoiles du halo.

    Enfin, l'autre possibilité évoquée par l'équipe pour expliquer les mouvements particuliers de ces astresastres est qu'ils soient nés là-bas. Mais, cela parait peu probable compte tenu des caractéristiques physiquesphysiques de ces régions. « Il est difficile d'imaginer que des étoiles puissent se former dans les régions d'une aussi faible densité », souligne James Bullock. En outre, « les modèles cosmologiques prédisent que l'on peut y trouver des coquilles comme celle-là ».