Hier, l'Agence spatiale européenne s'est dotée d'un budget record pour le début de la décennie 2020. Avec un programme scientifique plus ambitieux, de nouvelles missions d'observation de la Terre, un renforcement de ses capacités dans le domaine de l'exploration habitée et robotique ainsi que dans la sécurité spatiale, l'ESA s'affirme comme un acteur majeur et incontournable du secteur spatial. Petit tour d'horizon des décisions prises.


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    Après deux jours de négociations, les ministres des affaires spatiales des États membres de l'Agence spatiale européenneAgence spatiale européenne et du Canada ont entériné un budget d'une ampleur inédite pour l'avenir de l'Agence spatiale européenne (ESA) et de l'ensemble du secteur spatial européen. L'ESA s'est vu allouer 14,4 milliards d'euros pour la période 2020-2024. Avec 3,3 milliards, l'Allemagne est devenue le premier contributeur de l'Agence, devant la France (2,66 milliards) et l'Italie (2,28), devenant ainsi, sur le long terme, le premier pays contributeur de l'ESA.

    C'est un budget record pour l'ESA depuis sa création en 1975, ce que ne manque évidemment pas de souligner la presse européenne, unanime. Cela dit, ce budget est à comparer aux 21,5 milliards de dollars du budget de la Nasa pour la seule année 2020. Mais ne boudons pas notre plaisir.

    Des missions scientifiques ambitieuses et techniquement complexes

    Le programme scientifique est très bien loti et de nombreuses missions ambitieuses en étude seront réalisées. L'ESA pourra ainsi mettre en orbite Lisa, le premier observatoire spatial d'ondes gravitationnellesondes gravitationnelles, mener à bien la mission Athena - qui consistera notamment à étudier les trous noirs - et faire avancer considérablement notre compréhension des phénomènes physiques fondamentaux de l'Univers. Les États ont également investi dans la préparation des missions à venir, en allouant des financements supplémentaires conséquents aux activités de recherche et développement, ainsi qu'aux laboratoires de l'ESA.

    Répartition, par domaines d'activités, du budget de l'Agence spatiale européenne pour la période 2020-2024. © ESA
    Répartition, par domaines d'activités, du budget de l'Agence spatiale européenne pour la période 2020-2024. © ESA

    Dans le domaine de l'observation de la Terreobservation de la Terre, de nouvelles familles de Sentinel viendront renforcer et compléter le programme Copernicus d'observation de la Terre. Onze nouvelles missions porteront notamment sur des thèmes liés au changement climatiquechangement climatique, à l'ArctiqueArctique et à l'Afrique.

    Concernant le transport spatial, feufeu vert a été donné à la poursuite du projet Space Rider, qui dotera l'Europe d'un véhicule spatial réutilisable. Quant aux lanceurs du futur, ceux qui succéderont à Ariane 6Ariane 6 et Vega CVega C, les ministres ont mis sur la table les budgets nécessaires pour poursuivre le développement de plusieurs démonstrateursdémonstrateurs, comme le futur moteur à bas coût PrometheusPrometheus, l'étage supérieur ultraléger en carbonecarbone Icarus et l'étage réutilisable Thémis/Callisto.

    Un premier astronaute européen à destination de la Lune

    Dans le domaine de l'exploration, la Station spatialeStation spatiale fonctionnera au moins jusqu'en 2030 et la participation de l'ESA à l'avant-poste lunaire de la Nasa (le GatewayGateway), qui servira également de tremplin pour voyager vers Mars et des astéroïdesastéroïdes proches de la Terre, est confirmée et financée. Quant aux astronautesastronautes recrutés en 2009, tous effectueront un second séjour dans l'espace et l'un d'eux pourrait même s'envoler à destination de la LuneLune. Une première pour un astronaute européen ! En parallèle, l'ESA lancera la procédure de recrutement d'une nouvelle promotion d'astronautes.

    Enfin, la sécurité spatiale est devenue un enjeu majeur de l'activité humaine et économique en orbite basse. Les ministres ont donné leur feu vert à une série de projets visant à conserver un environnement spatial opérationnel, en éliminant des débris dangereux et en automatisant le contrôle du trafic spatial, et à mettre en place un système d'alerte précoce et de préventionprévention des dégâts que pourraient causer sur Terre des astéroïdes, des éruptions solaireséruptions solaires ou d'autres phénomènes d'origine spatiale.

    On notera également le feu vert donné à la mission Hera, menée en collaboration avec la Nasa, qui permettra d'expérimenter une technologie de déviation d'astéroïdes, et la confirmation de la participation de l'Europe à une mission pionnière de retour d'échantillons martiens, également en coopération avec la Nasa.

    D'ici la fin de l'année, nous reviendrons plus en détail sur certaines décisions prises concernant notamment les vols habitésvols habités, la sécurité spatiale et les missions spatiales.


    Espace : à quoi vont servir cette année les 5,72 milliards d'euros de budget de l'ESA ?

    Article de Rémy DecourtRémy Decourt publié le 22/06/2019

    Malgré un budget bien en deçà de celui de la Nasa, l'Agence spatiale européenne débute l'année avec un programme chargé. Parmi les principaux événements attendus, figurent le deuxième vol de l'astronaute européen, Luca Parmitano, à bord de l'ISS, plusieurs lancements de satellites et le vol inaugural du nouveau lanceurlanceur Vega-C. La fin d'année sera aussi marquée par le Conseil ministériel de l'ESA qui décidera des futurs programmes de l'Agence. 

    À l'occasion de la traditionnelle conférence de presse de début d'année, Jan Woerner, directeur général de l'Agence spatiale européenne, a présenté les principaux événements de 2019. Et l'année laisse présager d'être riche.

    À ne pas en douter, l'événement marquant de l'année sera le le deuxième séjour de Luca Parmitano à bord de la Station spatiale internationaleStation spatiale internationale, à l'occasion de la mission de longue duréedurée Beyond (Expeditions 60/61), qui doit démarrer le 6 juillet. Lors de la seconde partie de son séjour orbital, l'astronaute européen, de nationalité italienne, deviendra le troisième astronaute ESA commandant de l'ISS, après le Belge Frank De Winne en 2009 (mission OasISS) et l'Allemand Alexander Gerst l'an dernier (mission Horizons).

    En terme de lancement, l'année 2019 s'annonce chargée avec le lancement de cinq satellites et le vol inaugural du nouveau lanceur léger Vega C (dont le premier étage P120CP120C sera commun avec les propulseurspropulseurs d'appoint d'Ariane 6). Ce tir est prévu en octobre.

    • EDRSEDRS-C (juin-juillet) : avec ce satellite, l'ESA et Airbus poursuivront le déploiement du système européen de relais de données (EDRS) ou autoroute de l'information spatiale (SpaceDataHighway). Cette SpaceDataHighway est le premier système opérationnel de ce type qui fournit un service unique de transfert sécurisé de données en quasi-temps réel entre des satellites en basse et les utilisateurs au sol, avec un taux de transfert inédit de 1,8 Gigabit par seconde. Airbus, qui réalise les satellites, est aussi le propriétaire et opérateur du système. L'industriel prévoit d'étendre son autoroute spatiale de l'information avec un troisième nœudnœud de communication, EDRS-D, positionné au-dessus de la région Asie-Pacifique.
    • SAT-AIS (juin-septembre) : ce petit satellite a pour mission d'améliorer l'identification et le suivi des navires maritimes à l'échelle de la Terre entière (Automatic Identification System - AIS). À l'origine, le système a été développé pour éviter les collisions en mer, mais il est maintenant également utilisé pour suivre les bateaux dans le cadre de la prévention de la pollution, l'aide à la circulation de matièresmatières dangereuses, et de la surveillance de routine. Mais, AIS, qui est un système terrestre basé sur des liaisons radio, a une limitation majeure puisque sa portée horizontale est limitée à environ 74 kilomètres des côtes à cause de la courbure terrestre. Avec ce satellite, la couverture sera mondiale.
    • Cheops (octobre-novembre) : ce satellite est un télescopetélescope dédié à l'observation et à l'étude des exoplanètes. Particularité : il observera seulement les étoilesétoiles les plus proches de la Terre autour desquelles des planètes ont été détectées. Il est conçu pour permettre de calculer précisément le rayon de plusieurs dizaines de ces exoplanètesexoplanètes connues en mesurant leur transittransit de façon à déterminer la structure interne et, partant de là, d'extrapoler d'autres informations. Cheops est construit par Airbus dans le cadre d'un projet suisse.
    • OPS-SAT (novembre) : il sera le tout premier nanosatellitenanosatellite à relever les mesures et à enregistrer les données sur la glace des pôles et des glaciersglaciers, ainsi que le mouvementmouvement des vaguesvagues sur les océans. Ce nanosatellite fait partie du programme d'observation en météorologiemétéorologie de l'ESA et est destiné à livrer de nouvelles données sur le changement climatique.
    • Quantum (fin d'année) : ce satellite de télécommunication est réalisé par Airbus Defence and Space pour le compte d'Eutelsat. Il s'agit d'un nouveau type de satellite, capable de desservir n'importe quelle région du globe et d'adapter sa mission aux besoins des clients. Une première dans l'industrie des satellites de télécommunications commerciaux. Entièrement reprogrammable par logiciellogiciel, il est conçu pour être flexible pendant toute sa durée de vie, en s'adaptant en permanence aux conditions du marché ou aux besoins des clients qu'ils servent.
    Le budget 2019 de l'ESA par postes et pays contributeurs. © ESA
    Le budget 2019 de l'ESA par postes et pays contributeurs. © ESA

    Un budget en hausse mais bien inférieur à celui de la Nasa

    La fin d'année sera aussi marquée par le Conseil de l'ESA au niveau ministériel, année au cours de laquelle les ministres, chargés de l'espace des États membres de l'ESA, décideront des futurs programmes de l'ESA pour ces prochaines années.

    Sur le plan budgétaire, malgré une enveloppe passée de 5,60 milliards d'euros à 5,72 milliards d'euros, l'Agence spatiale européenne ne peut toujours pas faire jeu égal avec la Nasa et son budget approchant les 20 milliards de dollars ! À ce budget européen, qui représente seulement 10 euros par citoyen, il est utile de rappeler que la Commission européenne finance aussi des activités spatiales. Pour la période 2021-2027, elle prévoit de consacrer près de 16 milliards d'euros destinés à des programmes de souveraineté, comme Copernicus, Galileo, EgnosEgnos, et de surveillance de l'espace.

    Concernant le budget de l'Agence spatiale européenne, la France, l'Allemagne et l'Italie sont les trois pays qui contribuent le plus au budget de l'ESA. À eux trois, ils fournissent plus de 60 % des ressources, soit plus de 2,5 milliards d'euros. Quant au Royaume-Uni, malgré sa sortie prochaine de l'Union européenne, il restera un état membre de l'Agence spatiale européenne. En 2019, il contribuera au budget de l'ESA à hauteur de 369,6 millions d'euros, soit 8,8 % du budget de l'ESA.

    Les cinq principaux postes de dépense du budget de l'ESA sont :

    • L'observation de la Terre (24,3 %),
    • Le transport spatial et l'accès à l'espace (22,5 %),
    • La navigation et le positionnement par satellites (13,1 %),
    • Les vols habités et l'exploration (12 %),
    • Les programmes scientifiques (9,2 %).

    Espace : le budget européen épargne le programme Copernicus

    Article de Rémy Decourt, publié le 21/02/2013

    L'Europe spatiale peut avoir le sourire. Bien que la proposition de budget du Conseil européen pour la période 2014-2020 réduise le financement des programmes phares que sont GalileoGalileo et Copernicus, leur avenir est assuré. Le premier satellite Copernicus sera bien lancé à la fin de l'année.

    L'incertitude sur le financement de Copernicus, le programme de surveillance mondiale pour l'environnement et la sécurité de l'Europe, a été levée après l'accord budgétaire de l'Union européenne pour la période 2014-2020. D'un montant total de 960 milliards d'euros, ce budget est toutefois en baisse de 35 milliards d'euros par rapport à la période précédente.

    GMES, rebaptisé Copernicus depuis décembre 2012, obtient 3,78 milliards d'euros alors que les besoins ont été évalués à 5,8 milliards d'euros. Ce montant est néanmoins « suffisant pour faire quelque chose de correct », nous explique un proche du dossier qui s'attendait à une baisse de cet ordre de grandeurordre de grandeur.

    Construit par Thales Alenia Space, Sentinelle 1A sera le premier satellite du programme Copernicus à être lancé, le 3 avril 2014. À l'image, Fayoum, près du Caire. L’image a été acquise par Envisat en février 2012. © ESA
    Construit par Thales Alenia Space, Sentinelle 1A sera le premier satellite du programme Copernicus à être lancé, le 3 avril 2014. À l'image, Fayoum, près du Caire. L’image a été acquise par Envisat en février 2012. © ESA

    Optimiser le programme Copernicus pour le nouveau budget

    Concrètement, des choix seront à faire et les dépenses seront étalées dans le temps pour faire le lien avec le prochain budget, après 2020. Autrement dit, il faudra trouver de bonnes solutions pour optimiser le programme avec le budget alloué. Cela dit, si des reports de lancement sont envisagés, aucun des satellites prévus ne sera abandonné.

    Sur ces 3,78 milliards d'euros, 2,4 financeront la composante spatiale du programme qui comprend le développement des satellites des familles Sentinelle. Le reste financera notamment la composante in situ, un réseau de capteurscapteurs au sol, en mer et dans les airsairs.

    Création de 83.000 emplois d'ici 2030

    « Cette décision prise par les chefs d'État a été un grand soulagement pour nous », a déclaré Josef Aschbacher, le directeur du segment spatial de Copernicus à l'Agence spatiale européenne (ESA). Cet accord est une « étape importante pour Copernicus, mais son avenir n'est pas encore complètement assuré ». Ce budget doit en effet être approuvé par le Parlement européen avant de pouvoir entrer en vigueur.

    Enfin, dans son communiqué de presse, l'ESA tient à souligner que cet investissement favorisera l'emploi et la croissance. En effet, une étude récente de la Commission européenne montre que Copernicus permettra de créer environ 83.000 emplois en Europe d'ici 2030. Cela confirme une autre étude selon laquelle chaque euro investi dans ce programme générera quatre euros en retour.