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    Dans le monde, l'eau est parfois considérée comme une véritable arme de guerre. Voilà pourquoi il apparaît plus urgent que jamais de recenser les dispositifs de protection des ressources en eau et des équipements liés à l'eau pendant les conflits (c'est également valable pour le pétrole et cela concerne d'ailleurs les mêmes régions).

    L'eau peut-elle devenir une arme de guerre dans le monde ? Ici, le Hamilton Pool Preserve, un bassin naturel situé près d'Austin, au Texas. © Dave Wilson CC by-nc 2.0

    L'eau peut-elle devenir une arme de guerre dans le monde ? Ici, le Hamilton Pool Preserve, un bassin naturel situé près d'Austin, au Texas. © Dave Wilson CC by-nc 2.0

    Les deux cartes suivantes donnent un aperçu du problème actuel concernant les ressources en eau. D'autres données concernant l'irrigationirrigation et les zones de conflits potentiels peuvent être mises en parallèle.

    Part de la population ayant accès à l'eau potable dans le monde en 2005. (Cliquez sur la carte pour l'agrandir.) © Fanny Schertzer, Wikimedia Commons, CC by 2.5

    Part de la population ayant accès à l'eau potable dans le monde en 2005. (Cliquez sur la carte pour l'agrandir.) © Fanny Schertzer, Wikimedia Commons, CC by 2.5
    Selon l'ONU, en 2025, 25 pays africains devraient souffrir de pénurie ou de stress hydrique. © Lamiot, Wikimedia Commons, CC by-sa 3.0

    Selon l'ONU, en 2025, 25 pays africains devraient souffrir de pénurie ou de stress hydrique. © Lamiot, Wikimedia Commons, CC by-sa 3.0

    L'eau : arme et cible militaire

    L'histoire de l'humanité est émaillée d'exemples, de toutes les régions du monde, illustrant l'utilisation de l'eau comme instrument ou cible lors de conflits. Nous n'en citerons que quelques-uns :

    • En 596 av. J.-C., pour mettre fin à un siège interminable, Nabuchodonosor détruit une partie de l'aqueduc qui approvisionne la cité de Tyr.
    • En 1503, lors de la lutte que mène Florence contre Pise, Léonard de VinciLéonard de Vinci et Machiavel ambitionnent de détourner le cours de l'Arno, pour couper Pise de son accès à la mer.
    • En 1938, afin d'inonder les zones menacées par l'armée japonaise, Tchang Kaï-chek ordonne la destruction des digues sur une partie du fleuve Jaune, en Chine. En 1939-1945, les barrages de centrales électriques, considérés comme des cibles stratégiques, sont bombardés.
    • Au Vietnam (années 1960), de nombreuses digues sont détruites par les bombardements. Entre 2 et 3 millions de personnes seraient mortes noyées ou de faim par suite de ces attaques.
    • En 1999, au Kosovo, les points d'eau et les puits sont contaminés par les Serbes.
    • La même année, l'explosion d'une bombe détruit la principale conduite de Lusaka, en Zambie, et prive d'eau ses 3 millions d'habitants.

    Depuis la fin du XXe siècle, les ressources et les équipements subissent des menaces de plus en plus lourdes, notamment en Afrique, dans les Balkans et au Moyen-Orient.


    Sur notre planète, la surveillance du cycle de l’eau est indispensable à la compréhension du réchauffement climatique. Le Cnes nous parle, au cours de cette vidéo, des différentes missions spatiales qui, depuis plusieurs années déjà, permettent de suivre l'eau tout autour du Globe. © Cnes

    Guerre de l’eau et droit international : les Conventions de Genève

    Lorsque les systèmes d'approvisionnement sont modernes et connectés aux réseaux électriques, leur vulnérabilité est plus grande car, en période de conflit, ils constituent les principales cibles. Les populations civiles sont les premières à souffrir des bouleversements des systèmes d'approvisionnement en eau.

    Les conflits sont aussi souvent internes qu'internationaux, comment le droit international peut-il réagir ? Comment intervenir à l'intérieur d'un pays ?

    L'adoption en 1977 de deux ProtocolesProtocoles, supplémentaires aux Conventions de Genève, qui incluent des termes plus directement liés à l'eau, témoigne d'une avancée significative. À l'époque, la communauté internationale avait pris conscience des effets terriblement destructeurs, au Vietnam, de l'usage par les États-Unis de substances chimiques et de défoliants.

    Forage de l'eau. © DP

    Forage de l'eau. © DP

    Il est depuis interdit, « quel que soit le motif », d'attaquer, de détruire, d'enlever « des biens indispensables à la survie » de la population civile, tels que « les installations et réserves d'eau potable et les ouvrages d'irrigation ».

    Il est interdit d'attaquer « les ouvrages d'art ou installations contenant des forces dangereuses, à savoir les barrages, les digues et les centrales nucléairescentrales nucléaires de production, d'énergie électrique ».

    Dans quelle mesure ces dispositions peuvent-elles être appliquées ?

    De nombreux obstacles empêchent l'application de ces dispositions :

    • Les Protocoles de 1977 n'ont pas été ratifiés par tous les États membres. Le Protocole I a été ratifié par 159 états, mais l'unanimité n'a pas été atteinte et des pays, forts d'un point de vue politique, comme les États-Unis, se sont opposés à sa ratification.
    • Les nouvelles formes de conflits (comme le terrorisme et les conflits internes) ne relèvent pas du droit international humanitaire.
    • Il n'existe pas d'institution internationale effectivement en mesure d'appliquer ces dispositions.

    La Cour pénale internationale (CPI) et le droit à l'eau

    La création de la Cour pénale internationale (CPI), une juridiction permanente, a fait renaître l'espoir. Celle-ci a vu le jour en juillet 2002. Elle est compétente à l'égard des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité et des graves violations du droit international humanitaire. Cependant, cette institution n'a pas le soutien de tous les États. Les États-Unis, par exemple, ont signé le Statut de Rome, qui fonde la CPI, mais ne l'ont toujours pas ratifié, ce qui réduit considérablement l'efficacité de cette juridiction.

    Depuis novembre 2002, l'eau est reconnue comme l'un des droits de l'Homme fondamentaux. Cela est inscrit dans l'Observation générale sur le droit à l'eau, adoptée par le Pacte relatif aux droits économiques et culturels (CESCR), lui-même ratifié par 145 pays.