Pour diminuer le taux de CO2 dans l’atmosphère, il est bien sûr possible d'en limiter les émissions. Nous pouvons aussi envisager sa séquestration. D’autant que, dans les océans, celle-ci a lieu naturellement. Des chercheurs américains viennent d'ailleurs de mettre en lumière l’un des mécanismes chimiques à la base de ce processus.

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    Des chercheurs du Caltech et de l'université de Californie (États-Unis) ont réussi à percer l'un des mystères de la séquestration naturelle du CO2 par les océans. Ce faisant, ils ont également trouvé une solution permettant d'accélérer ce processus de plusieurs ordres de grandeurordres de grandeur, en enrichissant le milieu d'une simple enzymeenzyme.

    Rappelons que l'océan constitue le plus important réservoir de CO2 de la planète. En réaction à l'augmentation des taux de CO2 dans l’atmosphère, ses surfaces ont en effet absorbé de plus en plus de ce gaz à effet de serre. Aujourd'hui, il contient quelque 50 fois plus de dioxyde de carbone que notre atmosphère.

    L’anhydrase carbonique — cette enzyme qui aide à réguler le pH du sang humain — pourrait être une clé de la séquestration du CO<sub>2</sub> dans les océans. © Labrador2, Wikipédia, DP

    L’anhydrase carbonique — cette enzyme qui aide à réguler le pH du sang humain — pourrait être une clé de la séquestration du CO2 dans les océans. © Labrador2, Wikipédia, DP

    Une enzyme pour accélérer le processus naturel

    La capture de CO2 par l'océan rend les eaux de surface plus acidesacides. Or, lorsque celles-ci sont entraînées par le fond, elles réagissent avec des coquilles en carbonate de calcium mortes et neutralisent ainsi le dioxyde de carbone excédentaire. Malheureusement, il est difficile d'envisager de copier ce processus naturel pour lutter contre le réchauffement climatique, car il se déroule sur des dizaines de milliers d'années. Et, pendant ce temps, l'acidification des eaux nuit à la biodiversité des océans.

    Pour comprendre le pourquoi d'une telle lenteur, les chercheurs américains ont étudié le procédé par le détail. Ils ont découvert que la réaction qui, à partir de CO2 et d'eau, produit de l'acide carboniqueacide carbonique freine le processus. Et, en ajoutant au milieu une enzyme, l'anhydrase carboniqueanhydrase carbonique, ils ont observé que la réaction se produisait quelque 500 fois plus rapidement. De quoi envisager de mimer le procédé naturel au profit d'un système sûr de séquestration du CO2.


    Séquestration du CO2 : les doutes du MIT

    Article de Laurent SaccoLaurent Sacco paru le 02/02/2015

    L'activité humaine engendre l'émissionémission de dioxyde de carbone dans l'atmosphère. Pour éviter de relâcher ce gazgaz et limiter ainsi l'effet de serreeffet de serre, des projets de séquestration géologique sont actuellement en cours dans plusieurs pays. C'est notamment le cas aux États-Unis où une équipe vient de réussir à stocker un million de tonnes de CO2 dans un aquifère salinaquifère salin. Mais une étude de chercheurs du MIT (Massachusetts Institute of Technology) laisse planer un doute sur la sécurité de ce type de stockage.

    Certains pensent que la technologie est elle-même la solution aux problèmes qu'elle engendre. Pour lutter contre le réchauffement climatique, Freeman Dyson mise par exemple sur le génie génétiquele génie génétique. Il a en effet émis l'hypothèse que la création de nouvelles variétés de plantes particulièrement gourmandes en gaz carbonique et cultivées à grande échelle pourraient bien permettre de faire diminuer au cours de ce siècle la quantité de CO2 imprudemment injectée par l'humanité dans l'atmosphère de la TerreTerre.

    D'autres ont quant à eux proposé de capter ce puissant gaz à effet de serregaz à effet de serre à la sortie des usines, par exemple avec du buckminsterfullerène, pour le séquestrer géologiquement dans le sol. Plusieurs millions de tonnes de CO2 sont en effet annuellement rejetées dans l'atmosphère par une centrale thermique à charboncharbon de taille moyenne.

    La séquestration géologique du gaz carbonique commence avec sa capture à la sortie d'usine, souvent des centrales thermiques (<em>power plant</em>). Le dioxyde de carbone est ensuite compressé, parfois jusqu'à devenir liquide, puis transporté et injecté dans le sol d'un ancien gisement de pétrole, par exemple. © CO2CRC

    La séquestration géologique du gaz carbonique commence avec sa capture à la sortie d'usine, souvent des centrales thermiques (power plant). Le dioxyde de carbone est ensuite compressé, parfois jusqu'à devenir liquide, puis transporté et injecté dans le sol d'un ancien gisement de pétrole, par exemple. © CO2CRC

    Afin de démontrer la faisabilité de la séquestration géologique, les États-Unis ont lancé une centaine de projets. L'un d'entre eux est celui de l'Illinois Basin – Decatur Project (IBDP). Parmi les plus importants, il se proposait d'injecter sur une période de trois ans un million de tonnes de dioxyde de carbone dans l'aquifère salin du mont Simon, situé à 2.135 mètres de profondeur, dans l'Illinois.

    Ce projet a été récemment présenté comme un succès. Il a consisté, comme prévu, à récupérer le gaz riche en CO2 résultant de la production d'éthanol, à le déshydrater et à le compresser pour le conduire finalement dans une stratestrate de grèsgrès poreux (voir la vidéo ci-dessous) recouverte et scellée naturellement par une couche de schiste imperméable.


    Feutre en main, Yannick Peysson, chercheur en énergies nouvelles à l'IFP Energies nouvelles, calcule le potentiel de stockage du CO2 en sous-sol en fonction de la nature de la roche sédimentaire et de sa porosité. © universcience.tv, YouTube

    La géologiegéologie du bassin local étant étudiée et bien connue depuis un siècle, et le projet ayant fait l'objet d'une étude préalable pendant plus de 10 ans, il avait été conclu que les risques de fuites de gaz carbonique était négligeable. L'opération de séquestration géologique avait toutefois été surveillée de près grâce aux techniques de la géophysique. Pas question de voir se reproduire un jour une catastrophe humanitaire comme celle survenue au lac Nyos (Cameroun) en 1986.

    Des carbonates solides qui isolent la saumure du CO2

    Ce succès indéniable semble de bon augure pour le futur. Selon les estimations, 90 % des rejets de CO2 issus de centrales thermiques pourraient ainsi être piégés. Deux chercheurs du MIT viennent pourtant de laisser planer un doute sur la permanence du stockage dans les aquifères salins profonds. Comme Yossi Cohen et Daniel Rothman l'expliquent dans un article publié par Proceedings of the Royal Society A, il ne s'agit pour le moment que de simulations numériquessimulations numériques basées sur des investigations en physiquephysique et chimiechimie théoriques. Il faudrait des expériences pour confirmer le bien fondé des conclusions des deux géophysiciens.

    Mais selon leur modèle, le gaz carbonique entrant en réaction avec la saumuresaumure d'un aquifère, bien que conduisant, comme les scientifiques le pensaient, à la formation de carbonates qui précipitent, serait loin d'être stocké entièrement sous une forme solidesolide, une condition indispensable pour vraiment s'assurer qu'il restera dans le sol pendant longtemps. En effet, les calculs indiquent que la formation de précipités solides au contact de la saumure isole rapidement celle-ci du gaz carbonique et laisse donc une grande partie du CO2 sous sa forme gazeuse ou liquideliquide.

    En tout état de cause, les aquifères salins ne sont pas les seuls lieux de stockage possibles du dioxyde de carbone industriel. Certains chercheurs ont ainsi proposé d'avoir recours au basaltebasalte des planchers océaniques ou de certaines régions continentales.