Une équipe de scientifiques russes compte bien atteindre les eaux du lac Vostok durant la saison 2008-2009, et peut-être découvrir une forme de vie inconnue.

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    Emplacement du lac Vostok. Crédit : Scar

    Emplacement du lac Vostok. Crédit : Scar

    Avec une superficie plus étendue que la Corse - environ 250 sur 50 kilomètres -, le lac Vostok, découvert en 1993 par le satellite d'observation terrestre européen ERS1, est le plus grand des lacs sous-glaciaires connus. Cachées sous 3.750 mètres de glace, à l'est de l'Antarctique, ses eaux sont restées à l'abri de tout contact avec le reste de la planète depuis au moins un million d'années, peut-être plus. A cause de cette situation unique, les scientifiques estiment qu'il pourrait abriter des formes de vie bactériennes primitives sans équivalent à notre époque, et certains n'hésitent pas à comparer leur éventuelle mise au jour à la découverte d'une forme de vie extraterrestre.


    L'emplacement du lac Vostok repéré par ERS-1. Crédit Esa

    Dès 1998, une campagne de forage avait été entreprise par une collaboration franco-russe et atteint une profondeur de 3.623 mètres, soit 120 mètres au-dessus de la surface. Ce carottage avait permis de mettre en évidence quatre grands cycles climatiques au cours des 420.000 dernières années, mais surtout la présence à partir de -3.540 mètres de profondeur de glace de refonte. Ces échantillons étaient manifestement formés d'eau qui avait jadis circulé au sein du lac, et contenaient divers éléments, du sel notamment, mais surtout des micro-organismesmicro-organismes. Etaient-ils dans la glace depuis cette époque ?

    Las, des examens ultérieurs, menés notamment au laboratoire de glaciologie et géophysique de l'environnement de Grenoble par Jean-Robert Petit, ont déterminé que ces bactériesbactéries étaient similaires à des espèces vivant actuellement par +50 °C, alors qu'une température de -2,65 °C régne en permanence au sein du lac Vostok. L'excès d'oxygène (700 à 1.300 mg/l) apparaissait aussi incompatible avec une telle forme de vie. L'hypothèse d'une contaminationcontamination des échantillons semblait donc plus probable.

    Nikolaï Vassiliev, directeur de la chaire des technologies de forage de l'Université de Saint-Pétersbourg, indique de son côté avoir déjà identifié des protobactéries et des actinomycètes âgés d'environ 500.000 ans dans des prélèvements effectués à 3.000 mètres dans les années 1970, alors que la présence du lac n'était pas encore connue.

    Le lac Vostok vu par Radarsat. Crédit Nasa

    Le lac Vostok vu par Radarsat. Crédit Nasa

    Au cours de cette saison 2007-2008, une équipe de scientifiques russes (52ème expédition antarctique) a repris les travaux de forage, et est parvenue à 90 mètres au-dessus de la surface du lac. « Au cours de cette saison, nous comptons encore descendre de 50 mètres supplémentaires. Nous devrions ainsi atteindre les eaux du lac au cours de la période 2008-2009 », annonce Valeri Loukine, chef de l'expédition.

    Mais derrière le défi technologique que représente un forage à cette profondeur se profile une autre contrainte, celle de ne pas contaminer le milieu ainsi découvert par des micro-organismes contemporains, qui ruineraient toute observation ultérieure.

    Aussi, la méthode d'exploration adoptée par les Russes présente-t-elle toutes les garanties de préservation du milieu voulues. L'opération de forage actuelle se poursuivra jusqu'à atteindre un niveau situé à 20 mètres au-dessus du niveau du lac. Une petite sonde thermique chauffée à haute température sera ensuite glissée dans l'ouverture et poursuivra sa pénétration en provoquant la fusionfusion de la glace. Auto-stérilisée par sa température, elle percera le plafond du lac et tombera en eau libre.


    Modèle de sonde thermique actuellement utilisée par l'expédition russe. Crédit Scar

    Immédiatement, la pressionpression importante (337 à 377 barsbars) fera surgir l'eau du lac à l'intérieur du puits de pénétration, où elle gèlera instantanément et scellera l'ouverture. Un nouveau carottage sera alors nécessaire pour ramener ces échantillons.

    Les scientifiques espèrent obtenir les premiers spécimens des eaux du lac en 2008-2009. Cette opération permettra en outre de jeter les bases des premières tentatives d'exploration automatique d'Europe, un satellite de JupiterJupiter, dont la surface glacée cache sans doute vaste océan liquideliquide recélant peut-être des formes de vie.