Dans le cadre d'une collaboration franco-américaine, des chercheurs du Centre National d'Etudes Spatiales (CNES), du Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) et du National Center for Atmospheric Research (NCAR) lancent actuellement depuis Zinder au Niger dans la stratosphère (20000 m d'altitude) des ballons de 12 m de diamètre appelés "ballons-driftsondes". Dérivant sur plusieurs milliers de kilomètres, ils vont larguer sur commande une quarantaine de sondes sous parachutes permettant de mesurer lors de leur chute les variables de l'atmosphère : vent, température, humidité et pression. Ces sondes sont appelées "dropsondes". Les ballons-driftsondes ont été développés au CNES et les dropsondes ont été conçues par le NCAR. Le déploiement de ces ballons-driftsondes dans le cadre d'une campagne scientifique majeure constitue une première dans l'histoire de l'observation météorologique.

au sommaire


    Ballon-driftsonde © AMMA-cnes, ph. Cocquerez

    Ballon-driftsonde © AMMA-cnes, ph. Cocquerez

    Les ballons-driftsondes sont conçus pour effectuer des mesures de profils de vent, température, humidité et pressionpression dans des régions peu instrumentées mais météorologiquement importantes (tels que les océans, déserts, montagnes,...). Ils ont été développés dans le cadre de THORPEX, un programme mondial de dix ans dédié à l'amélioration de la prévision des événements météorologiques extrêmes (précipitations intenses, tempêtes, cyclones,...).

    Le déploiement des ballons-driftsondes s'inscrit dans le cadre du projet international AMMA (African Monsoon Multidisciplinary Analysis) d'étude du climat d'Afrique de l'ouest (mécanismes de la moussonmousson, structure des ondes d'est et du jet d'est africain, formation des systèmes orageux). AMMA, basé sur une initiative française, est financé par un grand nombre d'agences, en particulier de France, du Royaume-Uni, des Etats-Unis d'Amérique et d'Afrique et bénéficie d'une contribution majeure du sixième Programme-cadre de recherche et développement de la Communauté européenne (http://www.amma-international.org).

    "Ce premier déploiement d'un système technique aussi complexe comportait des risques" précise Jean-Luc Redelsperger, chercheur CNRS au Centre National de Recherches Météorologiques de MétéoMétéo-France et co-président du comité international scientifique d'AMMA, "mais l'apport scientifique potentiel de telles données faisait des driftsondes une composante importante de la stratégie expérimentale du projet AMMA et permettra d'étudier leur pertinence pour l'amélioration des prévisions météorologiquesprévisions météorologiques dans cette région".

    Le site de lâcher au Niger a été choisi pour étudier des systèmes météorologiques tels que les ondes d'est africaines qui contribuent à la formation d'oragesorages et de lignes de grains qui peuvent se transformer en cyclone tropicalcyclone tropical à leur arrivée sur l'Océan Atlantique. Des dizaines de ces ondes se propagent à travers l'Afrique vers l'Océan Atlantique entre environ 10° et 20° nord mais seul un petit nombre d'entre elles se développent en cyclones pouvant atteindre les côtes des Etats-Unis et du Golfe du Mexique.

    Après avoir été lancé du Niger, chaque ballon-driftsonde dérive depuis l'Afrique vers les Caraïbes à environ 20000 m d'altitude, où des vents d'est modérés dominent (environ 40 km/h). Deux fois par jour (0 et 12 h au méridien de Greenwichméridien de Greenwich), chaque ballon-driftsonde libère une dropsonde constituée d'un capteur de températurecapteur de température et d'humidité et d'un récepteur GPSGPS fixés sous un parachuteparachute, qui chute tout en émettant les données collectées vers un récepteur radio à bord du ballon-driftsonde. La duréedurée de chute entre le ballon-driftsonde et le sol est d'environ 20 minutes. Les données sont ensuite renvoyées vers les scientifiques par transmission satellite.Ils commandent le lâcher des dropsondes depuis un centre d'opérations localisé à Paris. Si les conditions météorologiques sont intéressantes (développement d'un orage, formation d'un cyclone,...), ils communiquent par liaison satellite au ballon-driftsonde un ordre de lâcher de dropsonde additionnelle aux deux effectués en routine. Il est possible de lâcher une dropsonde par heure.

    Depuis le 28 août, sept ballons-driftsondes ont été lâchés et ont largué à ce jour environ 150 dropsondes autour des systèmes orageux violents d'Afrique de l'Ouest et des cyclones en formation (cyclones Florence, Gordon et Hélène). La partie est de l'Océan Atlantique tropical est hors de portée des avions "chasseurs de cyclone" américains, et les prévisionnistes ont des difficultés à prévoir lesquels de ces systèmes se développeront en cyclones. Les données des ballons-driftsondes devraient permettre de mieux caractériser les conditions qui contribuent au développement ou au contraire à l'inhibitioninhibition des cyclones. Bien que des ballons-driftsondes aient été testés dans les années passées, c'est la première fois qu'ils sont mis en œuvre pour la recherche et la prévision météorologique.

    "Les ballons-driftsondes fourniront un jeu de données unique sur les conditions météorologiques conduisant à la formation des cyclones de l'Océan Atlantique", dit David Parsons, chercheur au NCAR et responsable américain du projet. "Les ballons-driftsondes se déplacent à une vitessevitesse proche des ondes d'est africaines, de telle sorte que nous pouvons les suivre depuis leur formation et tout au long de leur déplacement."

    En plus de traquer les cyclones tropicaux, les ballons-driftsondes permettent de collecter des données sur des soulèvements rapides d'airair chaud et sec vers l'Océan atlantique depuis le Sahel qui transportent de grandes quantités de poussière jusqu'en Floride influençant la chimiechimie atmosphérique, la biologie marine, et plus généralement les phénomènes météorologiques de l'Océan atlantique.

    "Il faudrait une flotte d'avions de recherche pour recueillir les mêmes données que nous espérons obtenir avec ces ballons-driftsondes", ajoute Philippe Drobinski, chercheur CNRS au Service d'Aéronomie de l'Institut Pierre Simon Laplace et co-responsable français du projet.

    Pour développer le système de ballon-driftsonde, les scientifiques, ingénieurs, et techniciens du CNESCNES et du NCAR ont dû surmonter beaucoup d'obstacles. Les ballons-driftsondes doivent être suffisamment robustes pour supporter une longue exposition à la température d'environ -65°C, à une pression atmosphériquepression atmosphérique très basse d'environ 50 hPa et à un intense rayonnement solairerayonnement solaire. Pour que le système soit pratique et abordable, le système a dû être développé à partir de matériel peu coûteux, commercialisé et suffisamment fiable pour supporter les conditions d'opérations extrêmes.

    De par leur rapport qualité/prix extrêmement favorable, les ballons-driftsondes devraient rapidement devenir un moyen incontournable pour surveiller et étudier les différents types de situations météorologiques au-dessus des océans ainsi que dans les zones continentales isolées.

    "De futurs projets sont discutés pour l'AntarctiqueAntarctique, le Pacifique occidental et la Méditerranée" dit Philippe Cocquerez, le chef de projet au CNES. Il faut rappeler que dans le cadre d'AMMA, le CNES met en oeuvre des ballons stratosphériques pour l'étude de la chimie de la stratosphèrestratosphère tropicale (projet SCOUT) et des ballons pressurisés de basse couche pour l'étude des propriétés thermodynamiquesthermodynamiques de la mousson.

    Contacts :

    Chercheurs :
    Philippe Drobinski, chercheur CNRS
    Co-responsable français du projet
    Service d'Aéronomie de l'Institut Pierre Simon Laplace
    Tel : 33+ (0)1.69.33.31.99
    E-mail : [email protected]

    David Parsons, chercheur NCAR
    Co-responsable américain du projet
    National Center for Atmospheric Research
    Tel : 1+ 303.497. 8749
    E-mail : [email protected]

    Philippe Cocquerez, ingénieur
    Chef de projet au CNES
    Centre spatial de Toulouse
    Tel : 33+ (0)5.61.27.35.08
    E-mail : [email protected]

    Presse :
    INSU-CNRS : Christiane Grappin - Tél +33 1 44 96 43 37
    [email protected]

    CNRS : Muriel Ilous - Tél +33 1 44 96 43 09
    [email protected]

    CNES : Sandra Laly - Tél +33 1 44 76 76 87
    [email protected]