Bien qu'ils n'en soient pas à leur premier coup d'essai, la conférence internationale de l'UNESCO sur la biodiversité offre l'occasion aux scientifiques d'alerter l'opinion publique sur la gravité de la situation, et de "secouer" les décideurs sur l'urgence de passer à l'action. Bref, la disparition des espèces est un problème qui nous concerne tous...

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    « Biodiversité : science et gouvernance », un thème judicieux pour cette conférence internationale de l'UNESCO organisée cette semaine à Paris. D'autant plus qu'elle arrive à point nommé après la disparition dans les Pyrénées de l'ourse Cannelle, tuée par un chasseur... À plus grande échelle, l'extinction d'animaux est observée sur toute la surface du globe, n'épargnant ni les gros, ni les plus petits. La tentative échafaudée avec la Convention sur la Biodiversité (CDBCDB) ratifiée par 150 pays lors du sommet de la Terre de Rio en 2002 s'est montrée trop ambitieuse même si des choses ont été faites. Tant que les Etats ne seront pas soumis à un cadre strict avec des objectifs précis, il ne faudra compter que sur l'esprit citoyen des uns et des autres pour progresser 'Un Peu' seulement... mais pas 'Beaucoup'. Et puis, il y a un temps pour tout : l'un pour parler, l'autre pour foncer. Il ne s'agirait pas de tirer une énième sonnettesonnette d'alarme, il faut à présent engager des actions concrètes dans le domaine de la conservation des espèces !

    La biodiversité : le patrimoine de l'humanité

    La biodiversité englobe l'ensemble des animaux et des végétaux qui peuplent les différents écosystèmes de notre planète. Nous avons cette chance inouïe d'avoir été gâtés par Dame Nature au point qu'aujourd'hui encore, les chercheurs continuent à découvrir des milliers d'espèces. En effet, seules 1,75 million d'espèces auraient été décrites sur un total estimé entre 10 et 30 millions ! A côté de ces chiffres optimistes, d'autres indiqués par l'Union Mondiale Pour la Nature (UICNUICN) sont alarmants : 15 589 espèces seraient confrontées à un risque d'extinction (dont 7266 espèces animales et 8323 végétales). Ce qui signifie que nos descendants -même très proches- pourraient ne les connaître qu'en photos, dans les livres ou en vidéo...

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    © Caroline Lepage

    Ainsi, un mammifèremammifère sur quatre, un oiseauoiseau sur huit et un amphibienamphibien sur trois figurent sur la fameuse Liste Rouge de l'UICN. Oui, nous en sommes là ! Cette situation est d'autant plus grave qu'elle ne semble guère préoccuper les gouvernements qui ont d'autres ambitions, moins modestes, pour leurs finances. Il faut dire qu'on ne mesure pas toujours l'utilité de certaines espèces, et pourtant, l'exemple des végétaux est très flagrant. Saviez-vous que les ¾ de la population mondiale se soignent grâce aux plantes, et que 70% de nos médicaments en sont dérivés ? La perte d'une seule espèce végétale est une opportunité en moins pour les progrès de la médecine. Par ailleurs, le monde végétal et le monde animal sont si intimement liés que l'extinction d'un seul organisme peut nuire à toute une communauté... A titre d'exemple, lorsqu'une plante tropicale disparaît, on estime qu'elle emporte 30 espèces associées avec elles, et pour un arbrearbre tropical, ce sont 400 espèces qui s'éteignent !

    La France, un train de retard…

    En raison de conflits d'intérêts, l'Hexagone a bien du mal à avancer. Contenter les chasseurs, les éleveurs, les chercheurs et les écologistes n'est pas une mince affaire... Manque de volonté pour les uns, de moyens pour les autres, on peut le dire : la France, qui vient de se faire rappeler à l'ordre par la Commission Européenne concernant le réseau Natura 2000Natura 2000, est une mauvause élève en matièrematière de protection des ressources naturelles. C'est impardonnable dans le sens où elle est particulièrement bien lotie. Grâce à sa géographie, à ses côtes littorales, à ses différents climatsclimats et ses territoires d'outre-mer, son patrimoine est exceptionnel. Elle possède 10% des récifs coralliensrécifs coralliens de la planète, 20% des atollsatolls, 7 millions d'hectares de forêt tropicaleforêt tropicale en Guyane et tout le reste en Métropole... Bref, elle n'a pas à se plaindre !

    Et pourtant, le pays ne fait pas la part belle à l'écologieécologie qui reste le problème de passionnés, des durs à cuire capables des plus grands sacrifices. Tous les projets engagés pour préserver la biodiversité ne pourraient voir le jour sans l'engagement de ces milliers de bénévoles qui rejoignent les Associations. A-t-on réellement mesuré l'enjeu de cette science ? ArgentArgent et écologie ne font pas bon ménage... Il n'y a qu'à voir les formations qui se multiplient dans ce domaine, alors que les offres d'emploi sont très limitées voire quasi-inexistantes face aux offres de stages pas ou peu rémunérées. Aucune perspective d'emploi dans ce secteur donc ! Et la recherche souffre également de ce manque d'intérêt et de financements : seules 4000 à 4500 personnes travaillent à l'étude de la biodiversité, alors que la France compte 100.000 chercheurs, enseignants chercheursenseignants chercheurs et assistants de recherche...

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    © Caroline Lepage

    Un coup de pied dans la fourmilière

    Le chef de l'Etat a annoncé une série de mesures pour le territoire français (création de parcs nationaux en Guyane et à la Réunion d'ici 2006, de nouvelles réserves marines, renforcement de la protection des récifs coralliens de Nouvelle-Calédonie, etc.). Un projet de texte dévoilé par le directeur de son comité scientifique, Michel Loreau, va certainement faire l'objet de nombreux débats durant cette semaine de conférence. A l'heure actuelle, et contrairement au thème tout aussi alarmiste du changement climatiquechangement climatique, il n'existe aucun groupe d'experts mondial de la biodiversité... C'est un objectif qu'il faut atteindre.

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    © Caroline Lepage

    « Les espèces s'éteignent actuellement dans le monde à un rythme environ 100 fois supérieur au taux moyen observé dans l'histoire de la Terre et des millions d'autres espèces sont d'ores et déjà condamnées à une extinction future » s'inquiète le comité scientifique, avant de lancer un dernier avertissement : « si des actions fortes ne sont pas prises aujourd'hui pour comprendre et protéger la biodiversité, nous perdrons à jamais l'opportunité de récolter l'ensemble des bénéfices potentiels pour l'humanité ! ». Quant à lui, le Président Français a insisté sur ce constat malheureux : « l'humanité prend lentement - trop lentement - conscience que la puissance qu'elle a acquise, loin de l'affranchir définitivement de la nature, lui confère désormais une responsabilité sans précédent. Une responsabilité qui engage notre destin à tous... ».