Chargé d'étudier le cycle de l'eau, le satellite Smos, de l'Esa, a vu ses mesures perturbées... par les émissions de radars militaires sur des fréquences officiellement réservées à la science. La protestation de lAgence spatiale européenne auprès de l'IUT, organisme international de régulation des télécommunications, a fini par porter ses fruits : là où les mesures étaient fortement dégradées, elles sont devenues plus précises.


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    Le satellite Smos (Soil Moisture and Ocean Salinity, soit humidité des sols et salinitésalinité des océans) a été lancé en novembre 2009 avec pour objectif d'améliorer la compréhension du cycle de l’eau de notre planète. Pour ce faire, il mesure les micro-ondes émises par la Terre dans la bande L, entre 1.400 et 1.427 MHz de façon à déterminer l'humidité des sols et la salinité des océans. Pour les chercheurs, il s'agit de mieux comprendre ces deux paramètres variables du cycle de l'eau qui jouent un rôle primordial dans les changements climatiqueschangements climatiques.

    Mais les chercheurs se sont rendu compte que, depuis le début de son activité, de nombreux signaux illégaux transmis à travers le monde dans cette gamme de fréquence, rendaient certaines mesures inutilisables à des fins scientifiques. C'est d'autant plus surprenant que cette longueur d'ondelongueur d'onde est en théorie réservée à l'observation scientifique...

    Carte de la pollution électromagnétique établie à partir des observations de Smos dès 2010. En rouge apparaissent les zones fortement émettrices dans la bande L et en jaune ou vert celles où ces émissions sont intermittentes. © Cesbio

    Carte de la pollution électromagnétique établie à partir des observations de Smos dès 2010. En rouge apparaissent les zones fortement émettrices dans la bande L et en jaune ou vert celles où ces émissions sont intermittentes. © Cesbio

    Sur cette même bande L, le radiomètreradiomètre de Smos recevait d'autres signaux brouillant les mesures et qui n'avaient rien à voir avec l'humidité des sols. La cartographie des sources émettrices a permis de comprendre le phénomène. Bon an, mal an, l'Agence spatiale européenneAgence spatiale européenne a fini par localiser ces sources radio. Sans surprise, la plupart, pour ne pas dire toutes, émanent d'infrastructures militaires ou de services gouvernementaux, et correspondent à des radars. Une des plus grandes zones de contaminationcontamination se situait dans l'hémisphère nord au-dessus du Pacifique nord et de l'océan Atlantique.

    La protestation de l'Esa auprès de l'UIT (Union internationale des télécommunicationsUnion internationale des télécommunications) a été entendue. À ce jour, au moins treize sources d'interférenceinterférence ont été éteintes dans les latitudes septentrionales. L'effet fut immédiat : les observations de Smos à ces hautes latitudes ont été considérablement améliorées. Auparavant, elles étaient si contaminées qu'aucune mesure précise de la salinité des eaux n'était possible, au-dessus de ces régions.

    Les efforts faits par l'Esa pour réduire ce brouillage ont également bénéficié à d'autres satellites embarquant des détecteurs similaires, comme la mission Aquarius de la NasaNasa. Aquarius est un ensemble de trois radiomètres à micro-ondes embarqués à bord du satellite argentin Sac-D. Ils sont conçus pour suivre l'évolution de la teneur en sel des océans, mois après mois et saison après saison.

    Des cartes mondiales de la salinité seront tracées à partir des données fournies par Aquarius et Smos. Comme l'explique Nicolas Reul de l'Institut français de recherche pour l'exploration de la mer (Ifremer), la « combinaison des données Smos et Aquarius nous permet d'obtenir des cartes de la salinité des océans avec une résolutionrésolution spatiale et temporelle sans précédent ».