La Commission européenne présente aujourd’hui son plan de lutte contre les émissions à effet de serre. L'accueil mitigé des producteurs et des consommateurs annonce peut-être des débats houleux…


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    Nuage de mousson au-dessus de l’Inde. Crédit Nasa

    Nuage de mousson au-dessus de l’Inde. Crédit Nasa

    Les contraintes annoncées par la Commission ne sont pas issues que de son propre chef. Elles répercutent une situation résultant de l'activité de l'industrie elle-même, et dont elle a largement bénéficié jusqu'à ce jour. Le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, reconnaît que la négociation sera difficile mais reste confiant et estime qu'un accord sera conclu avant la fin de cette année.

    L’argent, nerf du climat

    Selon José Manuel Barroso, le montant de la facture devrait se limiter à 0,5 % du PIB annuel, ce qui représente 60 milliards d'euros. Cependant, ses propres services prévoient plutôt un montant de 120 milliards d'euros, soit le double. Et rien n'indique que ces estimations s'avèrent correctes devant un secteur économique en pleine mutation.

    Le plan annoncé par la Commission comporte cinq projets de lois, articulés autour d'un document décrivant les actions que les 27 états membres devront respecter pour tenir leurs engagements en matièrematière de réduction d'émissionémission de gaz à effet de serre (GES) de 20% d'ici 2020 (par rapport à sa valeur en 1990) et d'augmenter jusqu'à 20 % minimum la part des énergies renouvelables dans la consommation courante.

    Comme on s'y attendait, les premières réactions sont venues du secteur des industries lourdes. En sont venues d'habituelles menaces de délocalisations assorties de pertes d'emplois. Jouant sur la corde sensible des rentrées fiscales, ces arguments ne laissent évidemment pas indifférents les gouvernements...

    Permis de polluer à vendre

    Mais les droits de polluer pourraient s'avérer la véritable pierre d'achoppement de ces négociations. Introduits il y a déjà quelques années, les quotas d'émission de CO2 ont jusqu'ici été délivrés gratuitement aux industriels. Mais force est de constater que ceux-ci n'ont pas toujours fait preuve de la plus grande honnêteté vis-à-vis de leur clientèle...

    Ainsi, les producteurs d'électricité, pointés du doigt par la Commission, n'ont pas hésité à répercuter sur le montant de leurs factures le prix des permis de polluer qu'ils reçoivent pourtant gratuitement, ce qui leur rapporte déjà un bénéfice cumulé de 30 milliards d'euros par an (0,25 % du PIB !). « Nous savons que le prix de 23 euros par tonne d'équivalent carbonecarbone est inclus dans le prix de l'énergie aujourd'hui », reconnaît la Commission européenne qui estime que le coût de l'électricité devrait encore augmenter de 10 à 15 % d'ici à 2020.

    Mais ces compagnies ne resteront pas longtemps dans l'illégalité, puisque la Commission a décidé de réellement mettre en vente, à partir de 2013, ce fameux droit à polluer. En devenant de plus en plus chers, les quotas d'émission de CO2, qui concerneront aussi un plus grand nombre de secteurs industriels, joueront alors pleinement leur rôle dissuasif. Ces ventes de permis de polluer devraient rapporter environ 50 milliards d'euros par an, qui se retrouveront dans les caisses des Etats membres et dont une partie devra servir à financer les innovations techniques destinées à réduire les émissions.

    La Planète bleue. Crédit Nasa

    La Planète bleue. Crédit Nasa

    La question des agrocarburants

    La Commission confirme aussi son engagement en matière d'agrocarburantsagrocarburants, dont il s'agit d'augmenter la part jusqu'à 10 % minimum dans le domaine des transports à l'horizon 2020.

    Mais les nombreuses critiques émises face à ce projet contraignent l'équipe de José Manuel Barroso à l'assortir de nombreux garde-fousgarde-fous. Ainsi, un groupe d'experts désignés dans le cadre d'une commission sur les questions énergétiques a dénoncé l'impact négatif d'un recours massif à ces carburants sur les forêts ou la sécurité des approvisionnements. « Les problèmes environnementaux provoqués par les biocarburants, ainsi que les problèmes sociaux, sont plus importants que nous le croyions », insiste le Commissaire européen à l'Environnement Stavros Dimas. Une opinion partagée par l'eurodéputé écologiste luxembourgeois Claude Turmes, ajoutant que « c'est un leurre de croire que l'on peut miser sur ce genre de technique plutôt que sur une meilleure efficacité énergétique ».

    Enfin, un paquetpaquet climat devrait préciser et imposer des conditions de production des divers bio et agrocarburants dans le souci de ne pas aggraver la déforestation des pays tropicaux. Mais la Commission ne dissimule pas son inquiétude devant l'amalgameamalgame qui est fait -- et exploité -- avec l'augmentation du prix des produits alimentaires. Un partisan des agrocarburants rappelle que si cette nouvelle culture peut effectivement influer sur le coût des céréalescéréales, cela reste peu significatif en comparaison de l'impact des sécheressessécheresses de plus en plus fréquentes, ainsi que de la consommation accrue de viande par les Chinois.