Lors du dernier été, la fonte estivale des glaces de l’Océan Arctique a atteint un niveau exceptionnel. Les causes ne sont pas certaines mais il est clair qu’elle est bien plus importante que ce que prévoient les modèles. Deux spécialistes du climat font le point pour Futura-Sciences : Valérie Masson-Delmotte, ingénieur au CEA, et David Salas y Melia, chercheur au Centre National de Recherches Météorologiques.

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    Le suivi en temps réel de l'extension de glace de mer est possible depuis la fin des années 1970 grâce aux satellites. En Arctique, cette surface englacée varie fortement selon les saisons, atteignant environ 16 millions de kilomètres carrés en fin d'hiver (en mars), soit près de trente fois la surface de la France métropolitaine, et diminue fortement en fin d'été (en septembre). Dans les années 1980, ce minimum estival était de l'ordre de 8 millions de kilomètres carrés. La surface de banquise est en recul très net depuis la fin des années 1980, avec une diminution de l'ordre de 3 % par décennie pour l'extension maximale et 10 % par décennie pour l'extension minimale.

    Dans ce contexte de réduction progressive de la surface de banquise, l'année 2007 est exceptionnelle. Le précédent record atteint en septembre 2005 (5,32 millions de kilomètres carrés) a été pulvérisé en septembre 2007 (4,14 millions de kilomètres carrés). La banquise, déjà très fine à la fin de l'hiver 2007, a ensuite fondu massivement en raison d'un ensoleillement estival exceptionnel en Mer de Beaufort.

    Les résultats des modèles de climat sont présentés sous forme de la moyenne et de l’écart type entre les différents modèles de climat dans le scénario A1B du Giec (correspondant à une concentration en CO<sub>2</sub> dans l’atmosphère de l’ordre de 700 ppm dans l’atmosphère, soit 2,5 fois le niveau pré-industriel).<br />© J. Stroeve, NCAR - UCAR/NSIDC), mise à jour pour l’évolution de la glace de mer en 2007 (NSIDC)

    Les résultats des modèles de climat sont présentés sous forme de la moyenne et de l’écart type entre les différents modèles de climat dans le scénario A1B du Giec (correspondant à une concentration en CO2 dans l’atmosphère de l’ordre de 700 ppm dans l’atmosphère, soit 2,5 fois le niveau pré-industriel).
    © J. Stroeve, NCAR - UCAR/NSIDC), mise à jour pour l’évolution de la glace de mer en 2007 (NSIDC)

    Un emballement possible

    Cet événement est-il un phénomène isolé, lié aux conditions météorologiques particulières de l'été 2007, à un apport plus grand de chaleurchaleur par les courants marins, ou bien est-il la marque d'une accélération du changement climatiquechangement climatique dans l'Arctique ? Plusieurs facteurs pourraient effectivement provoquer un emballement. Une mer libre de glace absorbe davantage d'énergieénergie solaire et génère une plus forte évaporation. Une atmosphère plus chaude, contenant davantage de vapeur d'eau, limite le refroidissement de la surface marine. Enfin, les nuagesnuages formés ces dernières années sur l'Océan Arctique semblent également renforcer l'effet de serreeffet de serre.

    L'année 2007 marque aussi un record en ce qui concerne l'intensité de la fonte estivale à l’intérieur de la calotte du Groenland (à des altitudes de plus de 2.000 mètres). Les scientifiques vont scruter attentivement l'évolution climatique dans l'Arctique au cours de l'Année Polaire Internationale pour mieux comprendre les processus en jeu et leurs conséquences.

    En réponse à l'augmentation des rejets de gaz à effet de serregaz à effet de serre attendus au cours des prochaines décennies, tous les modèles de climatclimat simulent une forte diminution estivale de la zone de glace de mer sur l'Arctique. Certains de ces modèles suggèrent un Océan Arctique libre de glace pendant l'été dans la seconde moitié du 21ème siècle. Une comparaison simple entre l'évolution de la couverture de glace minimale observée et simulée (médiane des différents modèles de climat) montrent que les changements en cours sont beaucoup plus rapides que ne le prévoient la majorité des modèles de climat.