En cherchant à créer un nanomoteur pour transporter des pièces à l’échelle nanométrique grâce à l’électricité, des chercheurs européens ont obtenu ce qui pourrait être un moteur à phonons, les quanta d’énergie sonore. Ce carburant original sera peut-être utilisé un jour pour des nanorobots transportant des médicaments dans un corps humain.

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    Le rail avec sa plaque d'or à différentes étapes de son mouvement. Les deux électrodes en silicium de part et d'autre de la tranchée sont bien visibles. Crédit : Adrian Bachtold

    Le rail avec sa plaque d'or à différentes étapes de son mouvement. Les deux électrodes en silicium de part et d'autre de la tranchée sont bien visibles. Crédit : Adrian Bachtold

    Adrian Bachtold de l'Autonomous University of Barcelona et ses collègues de l'Université de Vienne et du Swiss Federal Institute of Technology à Lausanne ont exploré une voie singulière pour réaliser un nanomoteur. Ils ont commencé par réaliser un nanotube de carbone à plusieurs parois et de 1.500 nanomètres (nm) de long, formé par des feuillets de graphène enroulés. Ensuite grâce à des champs électriques, ils ont détruit plusieurs de ces feuillets pour ne laisser subsister qu'une sorte de manchon pouvant se déplacer le long du nanotube sur une distance de 800 nm. Le manchon lui-même mesure 5 nm de long et porteporte une petite plaque en or. Le nanotube se retrouve finalement connecté à deux sortes d'édifice de taille nanométrique en silicium et l'ensemble se présente comme un rail enjambant une tranchée, comme on peut le voir sur la photo à la fin de l'article.

    Initialement, en portant les deux électrodes à une certaine différence de potentiel, les chercheurs pensaient obtenir une hélice tournant dans un sens ou dans un autre en fonction du signe de la différence de potentiel. De façon surprenante, c'est plutôt un mouvementmouvement hélicoïdal éloignant le manchon du milieu du nanotube qui a été observé comme le montre la vidéo.

    Vidéo réalisée au microscope électronique montrant le mouvement hélicoïdal de la plaque en or. Crédit : Science

    Quelle est donc la cause de ce comportement insolite ?

    En reprenant leurs calculs et en utilisant des simulations numériquessimulations numériques, les chercheurs ont conclu à une propriété particulière du processus de conduction de la chaleurchaleur. Il faut en effet savoir que dans un solidesolide cristallin, comme c'est le cas ici, cette conduction de la chaleur fait intervenir les vibrationsvibrations du réseau. Plus précisément, ce sont les phononsphonons, l'analogue des photonsphotons mais ici associés aux modes d'ondes sonoresondes sonores du réseau, qui sont responsables de la conduction thermique.

    En établissant une différence de potentiel entre les électrodes du dispositif, le nanotube de carbone se retrouve chauffé par effet Jouleeffet Joule, avec une température supérieure au milieu par rapport aux extrémités. Selon l'interprétation donnée par les chercheurs, lorsque l'on place le manchon au milieu du nanotube, la différence de température avec les deux extrémités du rail, plus froides, provoque un flux important de phonons émis par le manchon, qui se déplacent alors d'un côté ou de l'autre en direction d'une des électrodes à une vitessevitesse pouvant atteindre 1 micromètremicromètre/s.

    L'équipe de chercheurs travaille actuellement à une compréhension plus profonde de ce moteur à phonons et cherche à réaliser des expériences du même genre, mais où les deux électrodes ne seraient pas à la même température, afin de contrôler plus efficacement le sens de déplacement du manchon. Qui peut savoir le rôle qu'aura cette découverte dans la réalisation des nanomachinesnanomachines du futur ?