Les femelles sont leurrées par les mâles chez les jardiniers à nuque rose. Ces oiseaux australiens utilisent en effet des illusions d'optique pour jouer sur la perspective et ce que voit la femelle pendant les parades. Résultat : le mâle a plus de chance de s'accoupler.

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    Le mâle du jardinier à nuque rose, qui mesure un peu plus de 30 cm, attire la femelle dans un couloir et exécute une parade. © Laura Kelley/Science

    Le mâle du jardinier à nuque rose, qui mesure un peu plus de 30 cm, attire la femelle dans un couloir et exécute une parade. © Laura Kelley/Science

    Les oiseaux jardiniers portent très bien leur nom, mais ils auraient également pu être qualifiés de maîtres de l'illusion. Ces David Copperfield du règne animal utilisent en effet des illusions d'optique pour attirer les femelles.

    Lors de la période des parades, le mâle du jardinier à nuque rose  (Ptilonorhynchus nuchalis ou Chlamydera nuchalis), qui ne vit qu'en Australie, confectionne une sorte de haie d'honneur formée de petites branches et brindilles, et longue d'environ 60 centimètres, dans laquelle la femelle va pénétrer.

    L'illusion au bout du couloir

    Au bout de ce couloir, il fabrique une sorte de tapis, appelé gessogesso, composé de fragments d'os, de cailloux en tout genre, de coquillages et de divers objets. C'est sur ce gesso que le mâle effectue sa parade. Au programme : pavanement, chant et jet d'objets. Tandis que la femelle observe le spectacle de l'intérieur du couloir.


    La femelle est dans le couloir de brindille tandis que le mâle capte son attention en réalisant une parade sur le gesso en jouant avec des objets. © Laura Kelley/YouTube

    Lien entre qualité de gradient et succès reproducteur

    Mais attention, l'oganisation du gesso n'est pas aléatoire. L'an dernier, des chercheurs ont montré que ces objets étaient arrangés de façon bien précise : les plus petits juste à la sortie du couloir de brindilles tandis que les plus gros se situent dans le fond.

    Il s'agit en fait de leurrer la femelle grâce à une illusion d'optique, qui s'appelle la perspective forcée. Les éléments éloignés de l'observateur paraissent petits et un gradientgradient croissant donne l'impression que tous les éléments sont sensiblement de la même taille.

    Cette année, des scientifiques de l'université Deakin (dont un avait participé à l'étude de l'année précédente) ont montré que plus les objets sont ordonnés, plus la femelle est réceptive. En d'autres termes, quand le gradient de taille des objets est bien respecté, le nombre d'accouplement moyen augmente et le succès reproducteur du mâle également. Les résultats sont présentés dans Science.

    Illusion optique d'Ebbinghaus. Les deux cercles noirs sont de la même taille, mais celui entouré de petits objets (à droite) parait plus gros que celui entouré de gros objets. © DR

    Illusion optique d'Ebbinghaus. Les deux cercles noirs sont de la même taille, mais celui entouré de petits objets (à droite) parait plus gros que celui entouré de gros objets. © DR

    L'illusion d'Ebbinghaus pour leurrer la femelle ?

    Pourquoi les femelles seraient-elles davantage disposées à s’accoupler avec un individu dont le gesso est correctement ordonné ? C'est une question à laquelle les scientifiques ont encore du mal à répondre et ils ont émis plusieurs hypothèses.

    D'abord, il est possible que la capacité d'organiser des éléments selon un gradient de taille soit une démonstration d'une intelligenceintelligence développée. Mieux encore, il se pourrait que le mâle se serve de sa constructionconstruction pour créer une illusion d’optique. Par exemple, sur un fond régulier en apparence (le gesso), les objets avec lesquels le mâle joue pendant la parade sont davantage visibles.

    Autre possibilité, les objets de parades sont sensiblement plus gros que ceux qui composent le gesso. Cette différence pourrait créer ce qui est appelé l'illusion d'Ebbinghaus : les dimensions d'une forme paraissent plus importantes si elle est entourée de petites plutôt que de grosses. Et un individu capable d'acquérir de gros objets a forcément de bons gènesgènes à transmettre...