Les premiers cris des perroquets, ceux qui servent à la reconnaissance entre jeunes et parents, sont-ils innés ou acquis ? Une nouvelle étude in vivo apporte des résultats assez nets qui pourraient contribuer à la compréhension de l'acquisition du langage chez les humains.

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    Les perruches à croupion vert Forpus passerinus apprennent leurs premiers cris via leurs parents, biologiques ou non. © Karl berg

    Les perruches à croupion vert Forpus passerinus apprennent leurs premiers cris via leurs parents, biologiques ou non. © Karl berg

    Étudier les cris des perroquets est très instructif pour comprendre les mécanismes d'acquisition du langage, chez les humains notamment parce que, comme pour nous, l'apprentissage du langage se fait tout au long de la vie. Néanmoins, une des interrogations récurrente est de savoir si les premiers cris sont innés ou bien s'ils sont enseignés aux jeunes individus par leurs parents ou autres.

    L'étude de Karl Berg et ses collègues s'inscrit dans cette optique. Publiée cette semaine dans la revue britannique Proceedings of the Royal Society Biology, elle montre que les chez les perruches à croupion vert (ou toui été), espèce de la famille des psittacidés vivant en Amérique du Sud, les cris ne sont pas innés. Grâce à une population de ces perruches attentivement observée depuis 1987 et vivant au Venezuela, l'équipe de scientifiques américains (des universités Cornell et Berkeley) a pu mettre en évidence le mécanisme d'apprentissage des cris chez les jeunes perroquets.


    Vidéo montrant la reconnaissance entre un adulte et les jeunes dont il s'occupe grâce à un cri, qui sert de signature vocale. © Karl Berg/Vimeo

    Pas de lien génétique

    On suspectait que les premiers cris étaient le fruit d'un apprentissage dispensé par les membres de la famille. Mais ces résultats avaient été obtenus en laboratoire, et il s'agissait ici de les vérifier grandeur nature. Une mission difficile quand on sait que cette espèce vit perchée et cachée en haut des arbresarbres. C'est pour cela que la population vénézuélienne a été particulièrement précieuse. Les scientifiques ont pu créer des nids artificiels dans lesquels les perruches sont venues se loger puis pondre.

    Et les observations sont étonnantes (voir vidéo ci-dessus). D'abord, ce ne sont pas nécessairement les parents biologiques qui enseignent les cris à leur progéniture. C'est simplement le premier adulte qui va s'en occuper. En outre, quand l'adulte qui enseigne le cri n'est pas un des parents biologiques, le cri appris ne ressemble pas nécessairement à celui des parents biologiques. Preuve que ce cri n'a aucune source génétiquegénétique.


    Lors de cet enregistrement, on entend d'abord les signatures sonores de quatre jeunes frères et sœurs à vitesse réelle. Puis à une vitesse avec laquelle l'oreille humaine peut distinguer les différences. Chaque cri est unique. © Karl Berg/Vimeo

    Une signature vocale unique

    Quand elle est jeune, la perruche se voit attribuer une signature par ses parents adoptifs ou biologiques : l'adulte qui s'occupe des jeunes leur donne un modèle de cri que chacun des jeunes adapte pour qu'il devienne unique. Une sorte de nom. Pour l'oreille humaine, tous ces cris sont identiques mais quand on y regarde plus près, ils sont bien différents, comme le montre la seconde vidéo...

    Ce cri permettra ensuite aux adultes de reconnaître les jeunes dont ils s'occupent afin de les nourrir. Car pendant les trois semaines suivant le départ du nid, les jeunes sont encore dépendants d'un adulte pour la nutrition. Un cri unique, ça n'est pas de trop pour retrouver quelqu'un dans la jungle vénézuélienne !