Douter de l’existence de la matière noire ne semble pas rationnel, bien qu’une preuve directe et indiscutable nous manque encore. Selon deux astrophysiciens, il se pourrait que des milliards de particules de matière noire, des Wimps plus précisément, traversent notre corps chaque seconde.

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    On ne le répétera probablement jamais assez : on dispose de preuves solides, bien qu'indirectes, de l'existence de la matière noire. On ne peut cependant pas en conclure que nous savons vraiment que plus de 20 % de la masse contenue dans un large volume de l'univers observable est constituée de particules de matière encore jamais observées sur Terre. Pour cela, il faudrait soit les découvrir grâce à aux collisions de protonsprotons qui ont repris au LHC, soit les détecter avec des instruments comme ceux équipant les expériences Coupp et Picasso.

    En attendant ce moment, deux astrophysiciensastrophysiciens, Katherine Freese et Christopher Savage, se sont demandé si nous n'étions pas en quelque sorte irradiés par des particules de matière noirematière noire. Une première réponse naïve serait que c'est bien le cas. En effet, nous savons qu'une toute petite partie de la matière noire existe bel et bien puisqu'il s'agit des neutrinosneutrinos.

    L'amas de galaxie Abell 1689 contient de la matière noire dont la distribution peut être déduite des effets de lentille gravitationnelle et être reconstituée à l'ordinateur. C'est ce qui a été fait sur cette image où l'on voit surimposée en fausse couleur violette la matière noire. © Nasa, Esa, E. Jullo (JPL/LAM), P. Natarajan (Yale) et J.-P. Kneib (LAM)

    L'amas de galaxie Abell 1689 contient de la matière noire dont la distribution peut être déduite des effets de lentille gravitationnelle et être reconstituée à l'ordinateur. C'est ce qui a été fait sur cette image où l'on voit surimposée en fausse couleur violette la matière noire. © Nasa, Esa, E. Jullo (JPL/LAM), P. Natarajan (Yale) et J.-P. Kneib (LAM)

    Non seulement ces neutrinos sont massifs mais, en plus du flux de ces particules engendré par le SoleilSoleil, il existe un fond diffus de neutrinos cosmologique et on sait que l'univers observable contient plusieurs milliards de neutrinos fossilesfossiles pour chacun des baryonsbaryons du cosmoscosmos. Les neutrinos cosmologiques sont même plus nombreux que les photonsphotons du rayonnement fossile. Heureusement, ils sont si peu énergétiques qu'ils traversent notre corps comme si de rien n'était.

    Pour répondre à la question de Freese et Savage, il faudrait savoir de quoi est constituée la composante dominante de la matière noire et sur ce point bien des incertitudes demeurent. Une partie pourrait être constituée de minitrous noirs mais le plus probable est qu'elle est composée de Weakly Interacting Massive Particles, ou WimpsWimps.

    Un collision de Wimps par noyau d'oxygène chaque minute ?

    On dispose de contraintes indirectes sur la masse et la capacité d'interagir avec les particules de matière normale de ces Wimps. Ces contraintes sont tirées de la cosmologie et d'expériences comme Cogent et Dama. Elles ont donc été utilisées par les chercheurs dans un article publié sur arxiv afin d'en tirer des conclusions en fonction de plusieurs hypothèses possibles.


    96 % du contenu de l'univers est de nature inconnue. Les mystérieuses matière noire et énergie noire en sont-elles les composantes ? Ou bien est-ce une erreur dans l'équation d'Einstein ? Des questions auxquelles le futur satellite Euclid de l'Esa répondra. Réalisateur : Pierre-François Didek (Karamoja Productions). Directeur de collection : Vincent Minier (Laboratoire AIM Paris-Saclay). © AstrophysiqueTV-Dailymotion

    Les masses des Wimps étant supposées comprises entre 1 GeVGeV et 10 TeV, on devrait pouvoir les produire avec le LHCLHC. Mais d'après les observations de Cogent et Dama, deux expériences qui ont peut-être détecté des particules de matière noire, leurs masses seraient de 10 à 20 GeV. Les deux astrophysiciens étudient d'abord le cas de certaines Wimps de 60 GeV , une limite déduite d'autres expériences.

    Les chercheurs estiment qu'il y aurait des milliards de Wimps qui traverseraient notre corps chaque seconde. Mieux, une dizaine de Wimps de 60 GeV entreraient en collision chaque année avec les noyaux d'oxygèneoxygène d'un être humain de 70 kgkg. Sur ces mêmes noyaux, qui sont ceux ayant le plus haut taux de collisions possible, les astrophysiciens ont trouvé qu'avec des masses de 10 à 20 GeV et compte tenu des probabilités d'interactions estimées pour ces Wimps, le taux pourrait être de 100.000, c'est-à-dire environ une collision par minute !

    Même s'ils ont raison, Freese et Savage se montrent rassurants sur l'impact de cette matière noire sur notre santé. Les muonsmuons cosmiques qui nous traversent déposent bien plus d'énergieénergie par collision avec nos noyaux. Le rayonnement cosmique de matière noire, dans le cas de ces Wimps, est donc sans danger pour nous...