Le graphène est présenté depuis quelques années comme le matériau miracle qui évincera le silicium pour l’électronique des ordinateurs de demain. Un groupe de chercheurs vient de démontrer qu’il était possible de changer à volonté le gap d’énergie dans un dispositif constitué d’une double couche de graphène, ce qui en ferait un bon semi-conducteur.

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    L'un des caractéristiques les plus inhabituelles du graphène (en haut) est que ses bandes de valence et de conduction coniques se touchent en un point, il n'a pas de « gap ». Une double couche graphène (au centre) n'a pas non plus de gap. Des champs électriques (flèches) introduisent une asymétrie (en bas), donnant lieu à un gap (delta) qui peut être ajusté à volonté. Crédit : Lawrence Berkeley National Laboratory

    L'un des caractéristiques les plus inhabituelles du graphène (en haut) est que ses bandes de valence et de conduction coniques se touchent en un point, il n'a pas de « gap ». Une double couche graphène (au centre) n'a pas non plus de gap. Des champs électriques (flèches) introduisent une asymétrie (en bas), donnant lieu à un gap (delta) qui peut être ajusté à volonté. Crédit : Lawrence Berkeley National Laboratory

    Quiconque suit les avancées des nanotechnologiesnanotechnologies sait qu'il ne se passe pas un mois sans qu'un laboratoire, quelque part dans le monde, ne trouve de nouvelles propriétés intéressantes ou de nouvelles applications potentielles au graphènegraphène.

    A priori, ce matériau miracle ne paie pas de mine puisqu'il s'agit simplement d'une couche monoatomique d'atomes de carbone organisés selon un réseau d'hexagones. Le graphite de nos crayons à papier est constitué d'un empilement de couches de ce genre avec parfois des défauts heptagonaux ou octogonaux. Le graphène tire donc tout naturellement son nom du graphite et on l'obtient d'ailleurs en exfoliant ce dernier.

    Le graphène s'est pourtant révélé doué de propriétés incroyables. Les électronsélectrons, en particulier, s'y déplacent comme s'ils ne possédaient pas de massemasse et donc à des vitessesvitesses vertigineuses (des centaines de fois inférieures à la vitesse de la lumièrevitesse de la lumière tout de même). En fait, de façon surprenante, les équationséquations qui décrivent le comportement des électrons dans le graphène sont formellement identiques à celles que l'on utilise pour décrire les électrons en régime relativiste.

    Dans certaines conditions, un système composé de deux feuilles de graphène peut, de conducteur, devenir un semi-conducteursemi-conducteur. Voilà qui intéresse beaucoup les physiciensphysiciens du solidesolide travaillant sur les matériaux de l'électronique de demain. Il apparaît alors ce que l'on appelle ordinairement un gapgap, c'est-à-dire un intervalle d'énergieénergie entre la bande de conductionbande de conduction et la bande de valencebande de valence.

    Rappelons que les électrons d'un solide peuvent se retrouver dans des intervalles d’énergie formant des bandes. En simplifiant, on peut dire que la bande de valence est celle dans laquelle les électrons sont encore associés aux atomes d'un matériau et ne bougent pas. La bande de conduction est celle dans laquelle un mouvementmouvement des électrons est possible.

    Lorsque la bande de valence et celle de conduction se recouvrent, le matériau est un conducteur. Lorsque les deux sont largement séparées, on a affaire à un isolant. Enfin, lorsque la séparationséparation est faible, une petite élévation de température ou un petit champ électriquechamp électrique suffisent à faire passer les électrons de la bande de valence à celle de conduction : c'est un semi-conducteur.

    Feng Wang et ses collègues de l'Université de Berkeley en Californie viennent de confirmer que sous l'action d'une différence de potentiel variant entre 0 et 250 mV, le gap dont on sait depuis 2007 qu'il doit apparaître entre les bandes d'énergies résultant de l'association de deux feuilles de graphène, est modulable. Sa valeur peut donc être ajustée et modifiée à volonté.

    Comme ils l'expliquent dans Nature, les chercheurs ont fait apparaître ce phénomène en fabriquant un dispositif constitué d'un sandwich de différentes couches. Un support en siliciumsilicium est d'abord recouvert d'une fine couche isolante de dioxyde de silicium sur lequel est déposée la double couche de graphène. Cette dernière est enfin recouverte d'une couche transparente d'un oxyde d'aluminiumoxyde d'aluminium bien connu, le saphir. Vient ensuite une couche de platineplatine.

    En envoyant un faisceau infrarougeinfrarouge sur le dispositif et en mesurant les caractéristiques de la lumière absorbée par la double couche de graphène, soumise à une différence de potentiel variable entre les couches de silicium et de platine, la valeur du gap peut être déterminée.

    Les chercheurs pensent que cette réalisation ouvre les portesportes à la création de nouveaux nanotransistors et nano-diodes électroluminescentesdiodes électroluminescentes (Led).