Comment mélanger le tissu biologique avec des composants électroniques en vue d’élaborer des organes bioniques ? Un défi de taille auquel se sont attelés des scientifiques de l’université de Princeton en utilisant l’impression 3D pour mettre au point la première oreille bionique, capable d’entendre des fréquences radio normalement inaudibles pour un être humain.

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    Cette oreille bionique, dix semaines après son impression 3D, ressemble fortement à une oreille humaine, mais dispose de capacités différentes. C'est peut-être le premier organe bionique d'une longue série. © Frank Wojciechowski, université de Princeton

    Cette oreille bionique, dix semaines après son impression 3D, ressemble fortement à une oreille humaine, mais dispose de capacités différentes. C'est peut-être le premier organe bionique d'une longue série. © Frank Wojciechowski, université de Princeton

    L'impression 3D, l'outil d'avenir de la médecine ? Ces derniers mois, de grands progrès ont été réalisés dans la mise au point d'organes ou de tissus biologiques à partir d'une imprimante en trois dimensions. Il y a peu, une oreille humaine biocompatible sortait presque de nulle part, tandis qu'auparavant, du cartilage avait pu être synthétisé. L'objectif est de remplacer des organes ou des tissus abîmés ou inopérants et les transplanter chez des patients.

    Cela relève déjà presque de la science-fiction. Pourtant, d'autres voient encore plus loin et veulent améliorer les capacités humaines à l'aide de greffons bioniques. Cependant, il est un défi de taille : réussir à mélanger les tissus biologiques, mous, spongieux, riches en eau et en moléculesmolécules organiques, avec des composants électroniques, durs, secs et métalliques. À l'échelle bidimensionnelle, des succès encourageants ont été réalisés. 

    Mais comment réussir à reproduire cette performance en lui donnant du volumevolume ? Alors que l'impression 3Dimpression 3D appliquée à la biologie n'en est qu'à ses balbutiements, des chercheurs de l'université de Princeton (New Jersey, États-Unis) ont réussi à mettre au point une oreille bionique, mêlant cellules vivantes et nanoparticulesnanoparticules d'argentargent, capable d'entendre les fréquences radio, normalement inaudibles. Est-ce le début de l'ère des cyborgscyborgs ?


    Cette vidéo montre le fonctionnement de l'impression 3D. Les oreilles sont des organes très difficiles à reconstituer par chirurgie plastique ou reconstructrice, d'où l'idée des auteurs de passer par cette technique pour les recréer. Ainsi, ils ont pu mélanger tissus biologiques et composants électroniques. © McAlpineResearch, YouTube

    La première oreille bionique jamais conçue

    Le principe, exposé dans la revue Nano Letters, est le suivant. Grâce à l'outil informatique, il est possible de modéliser le produit final que l'on souhaite obtenir : ici, une oreille agrémentée de fils électriquesfils électriques. Une imprimante 3D à 1.000 dollars (760 euros) va alors déposer couche par couche les différents constituants nécessaires : une matrice d'hydrogelhydrogel servant d'échafaudageéchafaudage à des cellules de veau, et des nanoparticules d’argent entourées d'une gaine de silicone.

    Dans des conditions de culture idoines, les cellules de veau vont former du cartilage qui finira par recouvrir toute la structure et prendre l'aspect d'une oreille en 3D, composée de tissus biologiques au milieu desquels on trouve deux fils électriques. Ceux-ci partent du centre de l'organe artificiel. Ils forment un colimaçon imitant la cochlée humaine avant de s'étendre, et peuvent être raccordés au nerf auditif, afin d'établir la connexion avec le cerveaucerveau, le dernier organe à analyser les sons. Une première mondiale.

    Pour l'heure, le dispositif détecte uniquement les fréquences radio, inaudibles pour l'Homme. Mais ce n'est là qu'un prototype qui pourrait être équipé à l'avenir de capteurscapteurs sensibles à la pressionpression, afin d'entendre également le registre acoustique classique. Dans les rêves les plus fous de ces concepteurs, cette oreille bionique pourrait être disponible chez l'Homme d'ici une dizaine d'années. L'idée n'est donc pas seulement de remplacer les organes défaillants, mais aussi d'améliorer leurs capacités fonctionnelles. Un équipement qui s'intégrerait parfaitement à la panoplie de Steve Austin, le héros de la série L'homme qui valait trois milliards.