En quelques mois seulement, les vaccins contre la Covid-19 ont changé la donne dans la lutte contre la pandémie. Ces vaccins sont dits à ARN messager. De quoi s’agit-il exactement ? Cette technologie pourrait-elle révolutionner aussi la médecine dans d’autres domaines ?


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    L'ARN messager, pour Acide RiboNucléique messagerAcide RiboNucléique messager, a été découvert en 1961 par deux scientifiques français : François JacobFrançois Jacob et Jacques MonodJacques Monod. En 1965, ils reçoivent le prix Nobel pour cette avancée scientifique exceptionnelle.

    Qu’est-ce que l’ARN messager ?

    L'ADN (Acide DésoxyriboNucléiqueAcide DésoxyriboNucléique) contient l'information génétique, c'est-à-dire les données nécessaires à la synthèse des protéines de notre corps. L'ADN est conservé à l'intérieur du noyau des cellules tandis que les protéines sont synthétisées à l'extérieur du noyau. L’ADN ne pouvant pas sortir du noyau, comment l'information est-elle transmise vers le lieu de synthèse ? Grâce à l'ARN messager, d'où son nom ! Les ARN messager sont des copies d'un fragment d'ADN qui circulent du noyau vers le lieu de confection des protéines. Une fois la protéine synthétisée, l'ARN messager ayant servi de « plan de fabrication » est rapidement détruite.

    Comment fonctionnent les vaccins à ARN messager ?

    C'est en se basant sur ce système physiologique que les vaccins à ARN messager ont été conçus de manière ingénieuse. Les vaccins contiennent un brin d'ARN messager codant pour une protéine clef du virus de la Covid-19, une protéine cependant incapable de nous faire tomber malade. L'ARN messager étant très fragile, le brin est entouré d'une enveloppe lipidique pour le protéger.

    Lorsque le vaccin pénètre dans les cellules, celles-ci vont synthétiser la protéine virale inoffensive. La présence de cette protéine va déclencher la production d'anticorps par notre organisme. Si nous rencontrons le virus, nous aurons déjà les armes pour nous défendre !

    Une thérapie contre la mucoviscidose est en essai de phase II. © Fotolia
    Une thérapie contre la mucoviscidose est en essai de phase II. © Fotolia

    Quelles sont les autres applications de l’ARN messager ?

    En soi, toutes les maladies pourraient potentiellement bénéficier d'une thérapiethérapie préventive ou curative par ARN messager ! Les possibilités sont infinies ; ce n'est qu'une question de temps et de moyens. Si une maladie a pour origine un gènegène altéré, l'ARN messager pourrait en théorie venir stimuler la synthèse de la protéine déficiente ou de l'enzymeenzyme manquante. Si une maladie est liée à un agent infectieux, l'ARN messager pourrait venir stimuler la synthèse des anticorps nécessaires, en préventif (vaccin) ou en curatifcuratif (thérapie). La recherche avance dans de nombreux domaines thérapeutiques. Voici deux exemples de thérapies à ARN messager déjà en essai cliniqueessai clinique !

    En soi, toutes les maladies pourraient potentiellement bénéficier d’une thérapie préventive ou curative par ARN messager !

    La mucoviscidose est une maladie génétiquemaladie génétique dans laquelle la protéine CFTRCFTR (Cystic Fibrosis Transmembrane conductanceconductance Regulator) n'est plus synthétisée correctement. Un essai clinique de phase II est en cours pour tester une thérapie à ARN messager permettant de restaurer la synthèse de la protéine. Ce potentiel médicament présente une particularité de taille. Il a été conçu pour être nébulisé et ainsi être déposé directement sur les cellules d'intérêt, au niveau pulmonaire. Le processus de dispensation par nébulisation est très complexe. En effet, nos poumonspoumons ont été conçus pour empêcher ce type de particules de rentrer dans l'organisme et il a fallu trouver un moyen de contournement.  

    L'infection à CMV (CytoMégaloVirus) est en général peu ou pas symptomatique. En revanche, si la contaminationcontamination a lieu pendant la grossessegrossesse, les conséquences peuvent être importantes pour le bébé à naître : retard mental, surdité, handicaps lourds... Une solution pourrait être de vacciner les femmes en âge de procréer. Un essai clinique de phase III est en cours pour tester un vaccin à ARN messager permettant de stimuler le système immunitairesystème immunitaire pour déclencher la synthèse des anticorps contre le virus et ainsi éviter toute infection de la femme enceinte.

    D'autres projets sont en cours dans le cancer du pancréascancer du pancréas, le VIHVIH, la ragerage, la grippegrippe, le mélanomemélanome, les cardiomyopathiescardiomyopathies, la sclérose en plaques...

    Les défis des thérapies à ARN messager

    Si la synthèse des brins d'ARN messager est assez simple et rapide, il faut trouver pour chacun d'entre eux le système de transport le plus efficace possible selon la pathologiepathologie. D'une part, il faut protéger l'ARN messager, qui est fragile. D'autre part, il faut délivrer le médicament de la manière la plus spécifique possible, uniquement sur la cible à traiter pour éviter des effets indésirables.

    Un autre défi de ce type de thérapie est de surmonter les peurs du grand public. Les ARN messager peuvent passer de l'intérieur du noyau à l'extérieur du noyau, mais pas l'inverse. Il n'y a donc aucun risque que l'ARN messager issu d'une thérapie puisse modifier notre patrimoine génétique !