Grâce à un suivi longitudinal sur 30 ans, des chercheurs annoncent avoir vérifié expérimentalement l’existence d’un lien entre la faculté d’aimer ou de faire confiance à l'âge adulte et l’étroitesse des rapports mère-enfant.

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    C'était un concept bien établi en psychologie, encore fallait-il le montrer par l'expérience. Si l'idée que la relation particulière entre la mère et l’enfant durant les premières phases de la vie était importante pour expliquer la capacité à faire confiance à l'autre et à l'aimer, la mise en place d'un protocoleprotocole pertinent paraissait difficile et lourde.

    Pourtant, des chercheurs américains de l'université du Minnesota ont réussi à réaliser une étude longue de plus de 30 ans pour tenter de répondre à cette hypothèse. Ils ont pour cela suivi 75 individus depuis leur naissance. Les résultats ont été publiés dans Current Directions in Psychological Science. Comment ont-ils procédé ?

    L’amour en héritage

    Pour établir la force du lien préexistant entre la mère et l'enfant, ils ont soumis ces 75 bébés à un stress, à savoir la séparationséparation d'avec leur mère, une fois à 12 mois et une fois à 18 mois. Ils ont ensuite pu évaluer leur confiance vis-à-vis de leur maman et la sécurité qu'ils trouvent auprès d'elle.

    Depuis ces expériences précoces, les sujets ont eu d'autres tâches à remplir tout au long de leur vie pour évaluer leur développement social et émotionnel. Il s'agissait d'observer leur implication dans la vie scolaire auprès de leurs camarades, la finesse de la relation qui les liait à leur meilleur(e) ami(e) et à leur partenaire amoureux, via des épreuves de résolutionrésolution de conflits.

    <em>Le Baiser</em>, une célèbre statue d'Auguste Rodin, marque l'amour entre un homme et une femme. Ont-ils été aimés par leur mère ? © Oliver Degabriele, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Le Baiser, une célèbre statue d'Auguste Rodin, marque l'amour entre un homme et une femme. Ont-ils été aimés par leur mère ? © Oliver Degabriele, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Au final, après de multiples analyses des données, ils sont arrivés à la conclusion que les événements vécus dans la petite enfance avec la mère, dès les premiers mois, avaient un réel impact sur le comportement de l'adulte envers les autres. Les enfants les moins confiants au moment des retrouvailles avec leur mère, géraient ensuite moins bien les conflits et manifestaient davantage d'émotions négatives que les autres, tout en ayant plus de mal à donner leur confiance.

    Le lien mère-enfant n’explique pas tout

    « L'expérience interpersonnelle avec sa propre mère durant les 12 à 18 premiers mois de la vie permet de prédire le comportement dans une relation amoureuse 20 ans après, affirme Jeffry Simpson, l'un des auteurs de l'étude. Avant même que l'on puisse avoir des souvenirs, avant de posséder un langage pour s'exprimer, et de façon inconsciente, les attitudes implicites sont encodées dans l'esprit. »

    Cependant, ce lien entre vie passée et comportement futur n'est pas absolu. La psychologie, comme la biologie, fait toujours face à des cas particuliers qui ne cadrent pas toujours avec la théorie. Heureusement, car les enfants maltraités peuvent aussi rêver à l'amour...