Obtenir des cellules du sang à partir de cellules de la peau, c’est ce qu’ont réalisé des chercheurs canadiens. La technique, qui pourrait remplacer l’utilisation toujours peu au point des cellules souches, permettrait à terme de traiter les maladies du sang ou de créer du sang prêt à être transfusé…

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    Des cellules du sang (ici des érythrocytes) peuvent être obtenues à partir de cellules de la peau. © Ethan Hein, Flickr, CC by-nc-sa 2.0

    Des cellules du sang (ici des érythrocytes) peuvent être obtenues à partir de cellules de la peau. © Ethan Hein, Flickr, CC by-nc-sa 2.0

    Il y a du nouveau dans la reprogrammation cellulaire. D'après un article paru dans la revue Nature, il serait possible de créer des cellules sanguines à partir de cellules de la peau, et ce directement, c'est-à-dire sans passer par un stade préalable de dédifférenciation.

    C'est une vraie première car la reprogrammation des cellules est actuellement possible à partir de deux méthodes basées sur l'utilisation de cellules souches. La première repose sur le prélèvement de cellules déjà pluripotentes provenant d'embryons. Ce sont les cellules souches embryonnaires, possédant intrinsèquement la capacité de générer tout type de cellule et elles sont donc naturellement pluripotentes. Malgré l'origine embryonnaire de ces cellules, qui rend leur utilisation controversée, un essai clinique est en cours pour le traitement de la paralysie.

    La seconde méthode employée jusqu'à aujourd'hui, utilise des cellules adultes qui sont ensuite dédifférenciées. La propriété de pluripotence perdue par l'acquisition d'une spécialisation (cellule musculairecellule musculaire, sanguine, cérébrale...) peut être redonnée par les méthodes de biologie moléculaire. L'expression conjointe de certains gènesgènes et de milieux de culture appropriés leur permet de redevenir immature, puis de gagner une nouvelle spécialisation. L'utilisation de cette méthode crée beaucoup moins de problèmes bioéthiquesbioéthiques mais les résultats obtenus sont moins bons qu'avec les cellules souches embryonnairescellules souches embryonnaires.

    Troisième méthode de reprogrammation

    La publication des travaux effectués par une équipe de l'université McMaster apporte une troisième méthode de reprogrammation cellulaire, qui semble efficace et moins dangereuse. Des fibroblastesfibroblastes humains ont pu être reprogrammés en cellules hématopoiétiques progénitrices et matures, grâce à leur culture en présence de cytokinescytokines et à l'introduction dans le génomegénome cellulaire du gène oct4 à l'aide d'un lentiviruslentivirus vecteur.

    Des fibroblastes peuvent être reprogrammés en cellules sanguines grâce à l'expression du gène <em>oct4 </em>et à la mise en culture des cellules dans un milieu contenant des cytokines particulières. © Raffyd, Flickr, CC by-nc 2.0

    Des fibroblastes peuvent être reprogrammés en cellules sanguines grâce à l'expression du gène oct4 et à la mise en culture des cellules dans un milieu contenant des cytokines particulières. © Raffyd, Flickr, CC by-nc 2.0

    Des applications prometteuses

    La protéineprotéine correspondante OCT4 est un facteur de transcriptiontranscription connu pour être exprimé précocement dans les cellules embryonnaires. Suivant son niveau d'expression, il permet d'établir et de conserver une pluripotence, ce qui fait de lui un des acteurs majeurs dans la création de cellules souches pluripotentes induitescellules souches pluripotentes induites.

    Dans le cas des fibroblastes reprogrammés en cellules sanguines, et grâce à une régulation fine de son expression, aucun signe de pluripotence n'a pu être mis en évidence. En revanche, les cellules ont commencé à exprimer les antigènesantigènes CD45, spécifiques des cellules hématopoiétiques progénitrices. De cette manière, les trois sortes de cellules sanguines ont pu être obtenues :

    À l'inverse des cellules souches classiques, ces cellules ne montrent aucun signe d'évolution cancéreuse car elles ne se multiplient pas à l'infini et ne provoquent pas de tératometératome chez les souris chez qui elles ont été greffées. Elles semblent également viables car 8 semaines après la greffegreffe, près d'un cinquième des cellules de la moelle osseusemoelle osseuse sont originaires de la greffe chez ces souris.

    Ces cellules reprogrammées pourraient alors être utilisées un jour pour soigner les leucémiesleucémies en greffant au patient ses propres cellules de la peau reprogrammées. Elles pourraient aussi permettre de créer du sang de différents types, ce qui pourrait remplacer ou au moins compléter les banques de sang destinées à la transfusion, parfois en rupture de stock. Des recherches complémentaires sont bien sûr nécessaires avant d'envisager toutes ces possibilités.