Après la dernière expertise sur cette matière plastique de plus en plus controversée, l'Agence française Afssa reconnaît « des signaux d'alerte » et s'inquiète d'« effets subtils ». Elle souhaite des études supplémentaires et préconise en attendant « de ne pas trop chauffer ». L'agence européenne Efsa décide une réunion en avril.

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    Le bisphénol Abisphénol A, alias BPA, perturbateur endocrinien notoire mais aux effets très faibles, revient à la Une de l'actualité avec les conclusions de la dernière expertise de l'Afssa (Agence française de sécurité sanitaire des alimentsAgence française de sécurité sanitaire des aliments). En 2008, l'agence avait conclu à l'innocuité de ce produit, composant de base (monomère) de certains plastiquesplastiques (polymèrespolymères), polycarbonates et résines époxyépoxy, souvent utilisés pour emballer ou contenir des produits alimentaires (biberons, intérieurs de canettes de soda, plats en plastique, etc.).

    Mais, depuis, une série d'études sur le BPA ont amené de nouvelles informations, pas très rassurantes. A partir d'expériences sur des modèles animaux (rats et souris), le BPA se retrouve suspecté dans différentes pathologies (diabète de type 2, baisse de la fertilité, maladies cardiovasculaires...) et un effet vient d'être découvert dans l'intestin. L'Afssa s'est autosaisit du dossier en octobre 2009 pour une nouvelle expertise dont les conclusions viennent d'être publiées. L'Afssa ne dit pas que le BPA est dangereux, ni qu'il doit être interdit. Elle explique qu'il faut réaliser de nouvelles études et alerter les consommateurs sur des précautions d'usage.

    « Des effets subtils, explique l'Afssa dans un communiqué, observés en particulier sur le comportement après une exposition in utero et pendant les premiers mois de vie chez de jeunes rats, amènent l'Agence à poursuivre son travail d'expertise, en lien avec l'Efsa et le réseau international des agences, pour comprendre la signification en terme de santé humaine de ces signaux d'alerte, éclairer le consommateur et permettre aux pouvoirs publics de prendre des mesures appropriées. »

    La température augmente la quantité de BPA diffusée dans l'aliment

    L'Afssa « rappelle aux consommateurs qu'une mesure simple de précaution est d'éviter de chauffer à très forte température l'aliment (eau, lait, soupes...) s'ils utilisent des biberons ou des récipients en polycarbonate ». On remarque que la température maximale n'est pas mentionnée. Réchauffer un biberon suffit-il pour réveiller la nocivité du BPA ? Faut-il que bébé boive froid ? Qu'en est-il des plats cuisinés à réchauffer au four à micro-ondesfour à micro-ondes et contenus dans une barquette en plastique ?

    Le phénomène à l'œuvre est connu. Sous l'effet de la température, le polymère (inoffensif) se décompose et libère - en partie - les briques qui le constituent (les monomères, donc le bisphénol A), lesquelles se diluent dans l'aliment. Dans les pays industrialisés, le BPA est présent dans les urines chez neuf personnes sur dix, ce qui démontre bien la réalité du phénomène...

    L'Efsa (European Food Safety Authority), qui a réfléchi sur la question le 2 février 2010, a décidé de réunir au début du mois d'avril des experts nationaux des Etats de l'Union européenne. L'objet en sera notamment de vérifier la dose journalière tolérabledose journalière tolérable (DJT) et de la modifier au besoin, par exemple chez les nourrissons et les fœtus, dont on sait qu'ils sont plus exposés.

    Au Etats-Unis, la FDA (Food and Drug AdministrationFood and Drug Administration) a émis en janvier des recommandations spéciales pour les nourrissons, préférence à l'allaitement maternelallaitement maternel et recours exclusif à des biberons sans BPA. Le Canada a interdit depuis 2008 l'utilisation du bisphénol A dans les biberons et les gobelets pour enfants. A noter que plusieurs municipalités, dont Paris, ont déjà déclaré les biberons à BPA interdits de séjour dans leurs crèches.