Le 12 avril 2012, un navire de forage, le Chikyū, va prendre le large pour une expédition dont l'objectif est de comprendre les mécanismes impliqués dans les séismes de grande ampleur. La faille du Japon, qui a subi de fortes frictions lors du tremblement de terre de Tohoku du 11 mars 2011, provoquant le tsunami puis l'accident nucléaire de Fukushima, sera ainsi observée.

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    Le 11 mars 2011, au large du Japon, à 130 km de la ville de Sendaï, un séisme de magnitude 9 provoquait un gigantesque tsunami qui s'abattait sur la côte est de l'île de Honshu, causant une des pires catastrophes nucléaires jamais enregistrées en frappant la centrale de Fukushima et engendrant la mort de plus 23.000 personnes. Des vagues dépassant 30 mètres de hauteur et inondant l’île jusqu'à 10 km à l'intérieur des terres, ont ramené entre 5 et 20 millions de tonnes de débris vers l'océan.

    Un peu moins de huit mois plus tard, l'IODP (Integrated Ocean Drilling Program) annonce qu'il va expédier le Chikyū, un navire de forage japonais, non loin de l'épicentre du séisme, afin d'explorer la faille de subductionsubduction (glissement d'une plaque sous une autre) à l'origine du tremblement de terretremblement de terre.

    Le Chikyū forera à 7.000 mètres sous l'eau

    Cette expédition entre dans le cadre d'un programme, le Japan Trench Fast Drilling Project (J-FAST). Créé en 2009, il avait initialement pour but d'envoyer un navire de forage après un tremblement de terre pour étudier les propriétés physicochimiques et récolter des données encore exploitables, près de l'épicentre. Le séisme de Tohoku (le nom donné au tremblement de terre du 11 mars 2011) est l'occasion idéale pour appliquer ce projet.

    La zone de forage se situe au sud de l'épicentre du séisme. © D'après <em>Nature</em>

    La zone de forage se situe au sud de l'épicentre du séisme. © D'après Nature

    L'expédition devrait commencer le 1er avril et prendre fin le 18 mai 2012, selon un résumé de la mission rédigé par les responsables du projet. Au cours de ces 45 jours de mission, les scientifiques vont procéder à des forages à environ 1.000 m sous le plancherplancher océanique, sous une profondeur d'environ 7.000.

    Mesurer la température dégagée par les mouvements de plaque

    Le but est de comprendre ce qui peut causer le déplacement de roches sur plusieurs dizaines de mètres et pourquoi certaines failles sont plus à même d'être à l'origine de séismes et de tsunamis importants. Pour comprendre les mécanismes de frictions impliqués dans ces phénomènes, les géologuesgéologues vont insérer des capteurs de températurecapteurs de température au sein de la faille concernée. 

    En effet, lors d'une rupture rapide, une chaleurchaleur intense est dégagée au niveau du plan de faille, et cette chaleur met du temps à se dissiper. En obtenant des données de température précises et à long terme (les capteurs seront laissés sur place pendant un à trois ans), ils comptent obtenir les clés pour expliquer ces phénomènes.

    Le forage en zone de subduction. © Jamstec/CDEX, adaptation Futura-Sciences

    Le forage en zone de subduction. © Jamstec/CDEX, adaptation Futura-Sciences

    L'analyse sera aussi physicochimique puisque les géologues rapporteront des échantillons des roches au niveau de la faille. Ces éléments leur permettront d'identifier des types de roches qui vont de paire avec des tremblements de terre  intenses.

    Forage sous-marin à une profondeur record

    Mais le défi n'est pas que scientifique, il est aussi technique. Si forer sur 1.000 m ne représente rien de vraiment exceptionnel, les 7.000 m qui sépareront le navire de la zone de forage sont en revanche moins habituels. Jusqu'à présent, la très grande majorité des forages qui avaient été effectués avec ce bateau, comme ceux de l'expédition NanTroSeize qui visait également à mieux comprendre le mécanisme des séismes, se situaient à des profondeurs qui n'excédaient pas 6.000 mètres sous l'eau. Ce forage nécessitera des dispositifs particuliers et surtout, des conditions météorologiques favorables et clémentes.

    L'enjeu est crucial. De telles données pourraient peut-être permettre aux scientifiques d'appréhender des séismes brutaux, comme celui du 11 mars 2011, dont l'ampleur et la brutalité avaient surpris les géologues.