Le bisphénol S, composé chimique de la même famille que le bisphénol A, est en train de faire parler de lui suite à une révélation de la Radio Suisse Romande. Peu d'études récentes ont pourtant mesuré la toxicité pour l'Homme et pour l'environnement de cette molécule.

au sommaire


    Certaines enseignes ont remplacé le bisphénol A par du bisphénol S dans la composition de l'encre des tickets de caisse. ©  Brero, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Certaines enseignes ont remplacé le bisphénol A par du bisphénol S dans la composition de l'encre des tickets de caisse. ©  Brero, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Dès 2009, le bisphénol Abisphénol A - ou BPA - a défrayé la chronique et le paroxysme fut atteint en février 2011 lorsque la production et la vente des biberons contenant cette substance toxique furent interdites en Europe (avec des applicationsapplications respectives en mars et juin 2011), un an après l'interdiction en France, allant à l'encontre de la surprenante quiétude de l'EFSA (European Food Safety Authority). En 2009 déjà, deux enseignes de grande distribution avaient décidé d'opter pour une encre sans BPA pour l'impression des tickets de caisse.

    Aujourd'hui, c'est peut-être le bisphénol S (BPS) qui pourrait voler la vedette au A. Alors que ce dernier a fait l'objet de nombreuses études, mettant en évidence sa toxicité notamment pour les femmes enceintes, le BPS est resté dans l'ombre. Seules quelques études se sont penchées sur son cas et ont étudié sa toxicitétoxicité ou sa vitessevitesse de dégradation.

    Le bisphénol S est également un perturbateur endocrinien

    Inconsciemment, ou profitant du manque de notoriété et d'exposition médiatique du BPS, les marques de distribution évoquées plus haut ont remplacé le BPA par le BPS dans la composition de l'encre destinée à l'impression des tickets de caisse. Échange qui n'a pas échappé aux journalistes de la Radio Suisse Romande.

    Mais que sait-on exactement du BPS ? Globalement, pas grand-chose, mais assez pour savoir qu'il ne devrait pas être manipulé sans protection, tout comme son frère le BPA. Dès 1936, une étude publiée dans Nature montrait d'ailleurs que le BPS, à l'instar des autres bisphénols, était un perturbateur endocrinien (ou encore EDC pour EndocrineEndocrine Disrupting Chemical).

    Représentation des molécules de bisphénol A, F et S. © Danzl <em>et al.</em>, 2011

    Représentation des molécules de bisphénol A, F et S. © Danzl et al., 2011

    Peu de travaux ont ensuite été réalisés jusqu'aux années 2000 mais une étude de 2002 menée par Min-Yu Chen et d'autres chercheurs japonais avait confirmé la nocivité des bisphénols (voir la représentation de ces moléculesmolécules ci-dessus) et leur rôle dans la perturbation endocrinienne. Si le BPA s'était révélé particulièrement nocif, participant à la modification de l'activité œstrogénique, les chercheurs avaient noté une nocivité nettement moindre pour le BPS. À titre de comparaison, la dose efficace 50 % (ou ED50) pour une période de 48 heures (dose à laquelle l'efficacité ou la nocivité d'une substance est à 50 % de son optimum) était de 10 mg/l pour le BPA et d'environ 55 mg/L pour le BPS et le BPF.

    Nocif pour l'environnement

    La nocivité pour l'Homme est une chose, celle pour l'environnement en est une autre. Une étude japonaise de 2009, conduite par Erica Danzl et ses collègues, de l'université d’Osaka, permet d'en savoir un peu plus sur la dégradation des différents bisphénols, A, S et F. Les résultats de ces expériences montrent que le BPS est celui qui se dégrade le moins dans l'environnement (en l'occurrence, l'eau de mer). Pire, aucun signe de dégradation n'a été observé pour cette molécule, indiquant que son impact sur l’environnement est durable.

    Gérard Bapt, député et médecin, qui avait déjà fait parler de lui concernant l'affaire du Médiator, a trouvé un nouveau cheval de bataille, le bisphénol S, qu'il compte bien faire interdire. En attendant, il suggère aux caissières de porter des gants !