Les végétaux absorbent bien plus de carbone qu'on ne le pensait jusqu'ici : entre 25 et 45 % de plus ! Si les estimations étaient si loin de la réalité, c'est la faute à El Niño, expliquent des scientifiques qui ont organisé une filature à grande échelle.

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    L'efficacité de la photosynthèse, processus réalisé par les plantes et algues vertes, avait été sous-estimée. © MaxLeMans, Flickr, cc by 2.0

    L'efficacité de la photosynthèse, processus réalisé par les plantes et algues vertes, avait été sous-estimée. © MaxLeMans, Flickr, cc by 2.0

    Une étude internationale vient de montrer que l'efficacité de la photosynthèse - qui correspond à la quantité de CO2 traitée par les plantes et algues photosynthétiques - a été fortement sous-estimée. En réalité, elle devrait être révisée à la hausse, à hauteur de 25 % à 45 % selon les chercheurs. 

    Évaluer la quantité de CO2 consommée par une feuille ou une plante est assez simple. Il suffit de l'enfermer dans une chambre hermétique et de mesurer la variation du taux de carbonecarbone. En revanche, les choses se compliquent lorsqu'il s'agit d'estimer l'absorptionabsorption de carbone à l'échelle planétaire.

    Cycle global du carbone, incluant la photosynthèse. © Université Laval

    Cycle global du carbone, incluant la photosynthèse. © Université Laval

    Traquer les atomes d'oxygène

    C'est pourtant ce qu'a fait une équipe composée de chercheurs américains, australiens, hollandais et japonais. En utilisant des données récoltées sur une trentaine d'années par plusieurs organismes, ils ont pu évaluer la quantité de CO2 absorbée via la photosynthèse. Leurs résultats sont présentés dans Nature.

    Pour parvenir à cette conclusion, l'équipe a dû se livrer à une traque moléculaire. Grâce à des marqueurs qui permettent de suivre les atomesatomes d'oxygène (O), les scientifiques ont pu calculer combien de fois ces moléculesmolécules sont passées par une plante, via la photosynthèse, réalisant une estimation de la moyenne globale de l'efficacité photosynthétique.

    La photosynthèse est 25 à 45 % plus efficace

    De manière générale, pour estimer le rendement de la photosynthèse, on utilise une unité de massemasse de CO2 consommée par la plante (ou, ici, par l'ensemble des organismes photosynthétiques sur Terre) pendant une certaine période. Les derniers chiffres indiquaient que notre planète était capable d'absorber 120 pétagrammes (1 pétagramme = 1015 grammes) de carbone par an via la photosynthèse. Les nouvelles estimations suggèrent que 150 à 175 pétagrammes de carbone seraient en réalité traités chaque année, soit une augmentation de 25 à 45 %.

    Mais pourquoi une telle erreur lors des premiers calculs ? Tout vient du phénomène climatique El Niño. Les marqueurs qu'ont utilisés les chercheurs pour suivre les atomes d'oxygène sont les isotopes 18O et 16O. Le rapport de quantité de ces isotopesisotopes dans l'atmosphère diffère dans les régions touchées par le phénomène climatique. Sans prendre en compte cette donnée, les estimations de l'efficacité globale de la photosynthèse sont biaisées puisqu'on se fonde sur des ratios 18O/16O erronés.

    En rectifiant le tir, les scientifiques offrent une nouvelle base de travail aussi bien pour les scientifiques que pour les politiques. Le cycle du carbone - absorption, séquestration - est un sujet auquel les gouvernements, les scientifiques et le grand public sont particulièrement attentifs tant il est au centre de nombreuses problématiques : croissance des forêts, santé des océans, réchauffement climatique, etc. Un travail important qui n'aurait pu être réalisé sans la collaboration de différents laboratoires et leurs jeux de données à long terme.