Il est bien connu que l'âge d'un arbre peut se lire en comptant les cercles visibles sur la tranche de son tronc, et d'ailleurs appelés anneaux de croissance. Ils peuvent même servir à évaluer le climat. Mais il semblerait que cette technique ne soit pas si fiable que cela... 

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    Le comptage des anneaux de croissance des arbres pour déterminer leur âge est appelé la dendrochronologie. Ces anneaux sont également utilisés pour étudier les climats passés. © kendura99, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Le comptage des anneaux de croissance des arbres pour déterminer leur âge est appelé la dendrochronologie. Ces anneaux sont également utilisés pour étudier les climats passés. © kendura99, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Les scientifiques ne peuvent même plus se fier à la nature. Afin d'étudier le climat, ils cherchent des preuves tangibles, matérielles, que l'on appelle des proxysproxys, c'est-à-dire des phénomènes observables et qui dépendent du climat (et qu'on différencie des modèles). Les anneaux de croissance des arbres en font partie. Mais dans certains cas, comme pour les éruptions volcaniques violentes, ces données ne soient pas précises.

    C'est en comparant les données fournies par les anneaux de croissance des arbres avec les résultats issus de modélisationsmodélisations que les chercheurs ont pu mettre en évidence des différences. Les informations concernant la brutale éruption de 1258 (à un endroit encore inconnu, mais probablement au Mexique ou en Équateur), qui a plongé la Terre dans un hiver volcanique, ont été analysées.

    Des différences d'estimation de plus d'1 °C

    Alors que les résultats de modélisation suggèrent une chute de 2 °C après l'éruption, les anneaux des arbresarbres indiquent une anomalieanomalie négative de 0,6 °C seulement. Comme le précisent les auteurs dans Nature Geoscience, des variations semblables ont été observées pour les éruptions de 1452 (Kuwae, au Vanuatu) et de 1815 (Tambora, en Indonésie), confirmant le manque de fiabilité des informations fournies par les anneaux de croissance.

    Estimation de l'anomalie de température créée suite aux différents épisodes volcaniques, et selon trois différentes méthodes. On voit que les proxys sous-estiment la chute des températures. © Mann <em>et al. </em>2012, <em>Nature Geoscience</em>, adaptation Futura-Sciences

    Estimation de l'anomalie de température créée suite aux différents épisodes volcaniques, et selon trois différentes méthodes. On voit que les proxys sous-estiment la chute des températures. © Mann et al. 2012, Nature Geoscience, adaptation Futura-Sciences

    Selon les chercheurs, plusieurs facteurs peuvent expliquer ces sous-estimations. Lors d'une éruption importante, les particules dégagées par le volcanvolcan forment des aérosolsaérosols qui ont un forçage radiatif négatifforçage radiatif négatif, c'est-à-dire qu'ils renvoient une fraction importante de l'énergieénergie solaire, dont la végétation ne bénéficie donc pas. C'est pour cette raison que suit une baisse des températures. Mais une partie de la lumièrelumière, très bénéfique pour le développement des plantes, se fraie malgré tout un chemin, masquant en partie l'effet de la baisse de température sur la croissance des arbres.

    Pas d'anneau de croissance les années trop froides

    La seconde hypothèse (qui n'exclut pas la première) est relative à la technique d'échantillonnageéchantillonnage. Les arbres que les scientifiques choisissent pour en étudier les anneaux de croissance sont ceux qui se trouvent en altitude, en général à la limite des arbres (altitude au-delà de laquelle ils ne poussent pas). En effet, dans ces conditions, leur croissance dépend presque exclusivement de la température - et non des ressources qui varient peu.

    L'éruption du Tombora, volcan indonésien, en 1815, a provoqué un hiver volcanique et une chute importante de la température terrestre. © paulzpicz, Flickr, cc by 2.0

    L'éruption du Tombora, volcan indonésien, en 1815, a provoqué un hiver volcanique et une chute importante de la température terrestre. © paulzpicz, Flickr, cc by 2.0

    Ainsi, lors d'une chute de température, les anneaux se resserrent. Si ce refroidissement est important (supérieur à environ 0,6 °C, selon les chercheurs), les anneaux sont absents. C'est précisément cette situation qui créé un biais car pour les scientifiques, il est alors impossible de voir qu'il manque  des anneaux. Ce décalage a justement dû se produire les années suivant les trois épisodes volcaniques majeurs de 1258, 1452 et 1815. La conséquence sur l'interprétation de ces données est donc une sous-estimation de la baisse de la température après l'éruption.

    Il est intéressant de voir que dans certaines conditions, la modélisation est plus précise que les proxys, alors que les modèles sont construits à partir de données de terrain. Mais cela confirme qu'il est décidément bien difficile de retracer avec précisions les événements du passé.