En cas de coup dur, en l’absence de CO2, une algue verte n’hésiterait pas à digérer la cellulose d’autres végétaux pour survivre ! Cette étonnante découverte, la première du genre, a été faite chez la célèbre Chlamydomonas reinhardtii. Elle pourrait grandement intéresser la filière des biocarburants. 

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    Les végétaux sont des organismes autotrophesautotrophes, ils produisent de la matièrematière organique à partir de substances minérales puisées dans le sol ou dans l'airair. Pour ce faire, les cellules chlorophylliennes ont recours à la photosynthèse. La lumièrelumière solaire et l'eau sont ainsi exploitées afin de produire des sucressucres en utilisant notamment le carbonecarbone contenu dans le CO2 atmosphérique. Problème : le processus se grippegrippe si l'un des ingrédients vient à manquer, provoquant alors un arrêt de croissance du végétal.  

    C'est du moins ce que l'on croyait jusqu'à présent. Car une microalgue verte, la célèbre Chlamydomonas reinhardtii, aurait trouvé une parade pour grandir quoi qu'il arrive : elle digère la cellulosecellulose d'autres végétaux ! L'observation d'un tel comportement chez un organisme chlorophyllien serait une grande première. Cette découverte réalisée par l'équipe d'Olaf Kruse de l'université de Bielefeld (Allemagne) fait l'objet d'un article publié dans la revue Nature Communications.

    En absence de soufre dans le milieu, <em>Chlamydomonas reinhardtii</em> réduirait sa photosynthèse au profit d’une voie métabolique produisant de l’hydrogène. Cette algue unicellulaire pourrait à terme être utilisée pour synthétiser des biocarburants de 3<sup>e</sup> génération. © université de Bielefeld

    En absence de soufre dans le milieu, Chlamydomonas reinhardtii réduirait sa photosynthèse au profit d’une voie métabolique produisant de l’hydrogène. Cette algue unicellulaire pourrait à terme être utilisée pour synthétiser des biocarburants de 3e génération. © université de Bielefeld

    Un végétal qui se nourrit d’autres plantes !

    La lignocellulose serait le biopolymère le plus présent sur Terre. C'est un composant majeur de la paroi des cellules végétales. Jusqu'à la présente découverte, on croyait à tort que seuls des vers, des champignons et des bactériesbactéries pouvaient la digérer et s'en servir comme source de carbone pour assurer leur croissance.

    Durant les expériences, des Chlamydomonas reinhardtii ont été placées en présence de lumière dans un environnement pauvre en CO2. Lorsque cette ressource est venue à manquer, l'algue a commencé à sécréter de l'endo-β-1,4-glucanase dans son environnement. Or, cette enzymeenzyme dégrade la cellulose produite par d'autres organismes (l'algue n'en synthétisant pas elle-même) en cellobiose. Ce composé peut être assimilé puis hydrolysé en glucoseglucose. Il s'agit ni plus ni moins du produit final de la photosynthèse ! Le sucre peut alors être utilisé comme source d'énergieénergie par l'hôte pour assurer sa croissance. 

    Un atout pour la filière des biocarburants ?

    Cette découverte devrait intéresser les industriels utilisant la biomasse, comme les déchets agricoles, pour la production de biocarburants. Lors des processus de transformation, la lignocellulose doit être cassée biologiquement. Cette étape est actuellement réalisée par des enzymes extraites de champignons... qui nécessitent de la matière organique pour se développer. L'exploitation des algues permettrait donc d'utiliser l'intégralité de la biomasse pour la synthèse des carburants. Il serait par ailleurs envisageable de se servir de vieux papiers comme matière première. 

    Les chercheurs auraient dernièrement focalisé leur attention sur d'autres algues vertes. Plusieurs d'entre elles posséderaient la nouvelle propriété. Ils précisent cependant qu'en présence de lumière, d'eau et de CO2, ces organismes, tout comme Chlamydomonas reinhardtii, produisent leur sucre de manière conventionnelle.