Bien que le débat concernant l’effet sur la santé des ondes électromagnétiques ne soit pas tranché, une étude montre qu’en cas d’exposition prolongée, elles altèrent la physiologie du rat : celui-ci se plonge en mode économie d’énergie.

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    Danger invisible ou fréquence inoffensive ? Alors qu'un agriculteur corrézien se lance dans une grève de la faim, accusant l'antenne-relais placée près de son champ d'être à l'origine de la mort de la moitié de son troupeau, les scientifiques ne parviennent pas à trouver un consensus sur l'effet des ondes électromagnétiques sur la santé. Si pour les uns elles augmentent les risques de cancer, d'autres études concluent à leur innocuité.

    L'une d'elles, encore préliminaire, vient d'apporter quelques éléments de réponse supplémentaires, mais dans un autre registre. Elle émane de la collaboration de chercheurs de l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris) et de l'université de Picardie Jules Verne. Ensemble, ils viennent d'annoncer leurs résultats, parus dernièrement dans Environmental Science and Pollution Research. Ce travail montre qu'une exposition prolongée à des ondes à très faible dose suffit pour altérer les dépenses énergétiques du rat.

    La vasoconstriction perturbe la thermorégulation

    Dans cette expérience, 13 jeunes rats mâles ont été exposés en continu pendant 5 semaines à des ondes électromagnétiquesondes électromagnétiques, d'une fréquence de 900 MHz, à une intensité de 1 V/m, et dans un environnement à 24 °C. À noter que le débitdébit d'absorption spécifique (DAS) a été estimé à environ 0,5 mW/kgkg, bien loin de la valeur limite des 80 mW/kg autorisée par la règlementation. Voici pour les considérations techniques.

    Au cours de la sixième semaine, des tests physiologiques et comportementaux ont été réalisés sur les animaux. Lorsqu'ils ont placé les rongeursrongeurs dans une atmosphèreatmosphère à 31 °C, les chercheurs ont constaté des baisses locales de température corporelle, même si cela ne se remarquait pas à l'échelle globale. Ainsi, les queues des rats exposés aux ondes étaient de 1,21 °C moins chaudes que celles du lot témoin, composé de 11 rongeurs. En revanche, à 24 °C, aucune différence n'était constatée entre les deux groupes.

    Cela s'explique par la vasoconstriction périphérique, un processus mis en place pour éviter des déperditions de chaleurchaleur et donc d'énergieénergie. Les rats exposés aux ondes semblent donc économiser leurs ressources, comme si leurs dépenses étaient en parallèle accrues. Les scientifiques ont pu vérifier cette hypothèse en ajoutant un vasodilatateur, qui a égalisé les températures corporelles. Mais la découverte ne s'arrête pas là.

    Les ondes électromagnétiques pousseraient les rats à chercher à économiser leurs dépenses énergétiques. © Andreas Rejbrand, Wikipédia, cc by sa 2.5

    Les ondes électromagnétiques pousseraient les rats à chercher à économiser leurs dépenses énergétiques. © Andreas Rejbrand, Wikipédia, cc by sa 2.5

    Manger plus pour économiser plus

    Dans une autre expérience, il a été montré que les animaux ayant vécu dans un environnement exposé aux ondes électromagnétiques mangeaient davantage que leurs congénères, à hauteur de 0,22 g/h, mais uniquement à 31 °C. Là encore, tous les animaux étaient logés à la même enseigne à 24 °C.

    Les scientifiques émettent l'hypothèse que cette prise alimentaire excédentaire doit servir à compenser l'abaissement de la température corporelle au niveau périphérique. Une fois encore, les rats seraient plongés dans un mode économie d'énergie pour limiter les déperditions parallèles, et chercheraient à en sortir en augmentant les ressources.

    Un sommeil paradoxal fractionné

    Enfin, dans une troisième expérience, les auteurs ont pu montrer, aussi bien à 24 °C qu'à 31 °C, que les épisodes de sommeil paradoxal étaient plus nombreux chez les rongeurs exposés aux ondes. Cela se révélait être encore plus prégnant dans les conditions les plus chaudes. Là encore, les chercheurs soupçonnent la vasoconstriction d'être derrière tout ça, car elle maintiendrait les animaux en état d'alerte.

    Pourtant, malgré le fractionnement plus important de cette phase, la qualité générale du sommeil semble ne pas en avoir pâti. Tous les animaux dormaient autant et ne manifestaient pas plus de difficultés à trouver le sommeil.

    Quel impact sur la santé ? Difficile encore à déterminer. L'hypothèse des troubles de la mémoire et de l'humeur a été avancée. Mais reste à confirmer.

    Des ondes électromagnétiques qui altèrent la physiologie

    Si l'on fait le bilan de cette étude, trois paramètres liés aux dépenses énergétiques ont été altérés : la thermorégulation, la prise alimentaire et le sommeil. Les ondes électromagnétiques pourraient donc perturber la physiologie des rongeurs en les plongeant dans un mode économie d'énergie. Quid de l'Homme ? Seules des investigations ultérieures pourront fournir la réponse.

    Effectivement, ces travaux sont encore très préliminaires et ne constituent qu'une première étape d'un projet plus vaste. Contrairement à un grand nombre de recherches qui se focalisaient sur le lien entre radiofréquences et cancers, cette étude semble donc mettre en avant le fait que les ondes peuvent interférer avec d'autres fonctions du corps. Nous avons peut-être encore beaucoup à apprendre...