« Cherche femme aventureuse pour donner naissance à un Homme de Néandertal » : censément proposée par George Church, éminent généticien américain, cette annonce en titre d’un article du Daily Mail a eu un succès planétaire. Le scientifique lui-même cherche à faire retomber le soufflé : il n’a jamais dit cela, il s’agirait d’un bug de traduction entre l’allemand et l’anglais.

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    La petite annonce n'est pas parue sur le site de la Harvard Medical School, où travaille pourtant le généticiengénéticien George Church, qui en aurait eu l'idée. C'est le Daily Mail qui a titré ainsi un article où est exposée son idée de créer un ADN d'Homme de Néandertal et de l'utiliser pour une expérience de clonage qui irait jusqu'à la naissance d'un bébé néandertalien. « Je cherche désormais une femme aventureuse », explique-t-il dans l'article. Le concept technique est décrit dans son principe : reconstituer l'ADN complet d'un Homme de NéandertalNéandertal, l'injecter dans les noyaux de cellules souches puis installer celles-ci dans un embryon humain confié à une mère porteuse. Et le tour est joué.

    La nouvelle a fait grand bruit... jusqu'au démenti du chercheur. Il est vrai qu'elle arrive dans un contexte favorable. Depuis plusieurs années, le génome de l’Homme de Néandertal fait l'objet d'études, notamment de la part de Svante Pääbo, directeur du département d'anthropologie évolutionnaire à l'Institut Max PlanckMax Planck de Leipzig, en Allemagne. En 2010, son équipe et lui parviennent à peu près au bout du séquençage du génome de Néandertal, et découvrent qu'Homo neanderthalensis est si proche d'Homo sapiens (nous) que les deux espècesespèces pourraient n'en faire qu'une et, même, que des croisements ont pu avoir lieu. Nous serions donc des métisses de H. sapiens et de H. neanderthalensis...

    Une dermoplastie d'un enfant néandertalien réalisée par <a href="http://www.daynes.com/fr/accueil/accueil.php" title="Atelier Daynès" target="_blank">Élizabeth Daynès</a>, qui en a fait bien d'autres, tout aussi superbes, en collaborant avec des anthropologues. © Ph. Plailly, Eurelios

    Une dermoplastie d'un enfant néandertalien réalisée par Élizabeth Daynès, qui en a fait bien d'autres, tout aussi superbes, en collaborant avec des anthropologues. © Ph. Plailly, Eurelios

    Le fantasme du clonage

    Et puis, il y a eu le mammouthmammouth. En septembre 2012, l'université fédérale de Yakoutie (Russie) annonçait le prochain clonage d’un mammouth, dont le développement serait assuré par une éléphante jouant la mère porteuse. Déjà, la nouvelle diffusée en langue anglaise s'appuyait sur une erreur de traduction. Début 2011, Akira Iritani, de l'université de Kyoto, projetait lui aussi de faire naître un bébé mammouth.

    Et George Church lui-même, en 2011, avait évoqué la possibilité de cloner l’ADN de l’Homme de Néandertal. L'idée était semble-t-il d'abord de mieux connaître son génomegénome pour mieux comprendre le nôtre, et de cerner des origines génétiquesgénétiques de nos maladies. D'après John Sterling, qui rapportait ses propos, George Church estime qu'écouter un Homme de Néandertal nous apprendrait à mieux accepter notre propre diversité.

    Mais, non, le généticien n'a jamais lancé d'appel pour trouver une femme volontaire, comme il l'explique au Boston Herald. L'annonce viendrait d'une erreur de traduction de la version anglaise tirée d'une interview qu'il a accordée au journal allemand Der Spiegel. On peut donc seulement continuer à discuter sur la faisabilité d'une telle expérience, dans laquelle les difficultés sont nombreuses et énormes, comme nous l'expliquait Jacques Testart, généticien de l'Inserm, à propos du clonage de mammouth. On peut aussi évoquer, avant même la technique, les implications éthiques et l'épouvantable solitude que l'on infligerait à cet humain...