Un groupe d’astrophysiciens américains transpose à la physique solaire les techniques de traitement d’image utilisées en médecine pour détecter des cancers du sein. Grâce à elles, ils construisent un système d’analyse automatique des images du Soleil. Le but : prédire ses colères qui menacent notre civilisation technologique.

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    Sur cette image, avec une éruption solaire, on a représenté en bas à droite la Terre. © Soho-EIT Consortium, Esa, Nasa

    Sur cette image, avec une éruption solaire, on a représenté en bas à droite la Terre. © Soho-EIT Consortium, Esa, Nasa

    Depuis longtemps, l'humanité sait que les colères du Soleil peuvent perturber le fonctionnement de divers systèmes terrestres. Ainsi, en 1859, alors que l'astronomeastronome Richard Carrington avait observé une très forte éruption solaire, l'orageorage magnétique qui en résultait rejoignait la Terre dix-huit heures plus tard en causant des surtensions dans le câble de télégraphe traversant l'Atlantique.

    De nos jours, avec le développement des réseaux électriques et surtout des télécommunications par satellite, il est devenu très important de prédire de telles tempêtestempêtes pour, par exemple, couper les parties vulnérables de l'électronique d'un satellite afin d'éviter qu'elles ne soient endommagées. On comprend donc qu'indépendamment de l'intérêt intrinsèque de mieux comprendre la physique solaire, plusieurs missions spatiales aient été lancées pour savoir comment et pourquoi notre étoile déchaîne ses colères. On peut citer le satellite Soho et tout dernièrement le Solar Dynamics ObservatorySolar Dynamics Observatory (SDO). Les informations et les images que ces instruments nous donnent sont impressionnantes mais, malheureusement, le grand astrophysicienastrophysicien solaire Evry Schatzman n'est plus là pour en prendre connaissance et les analyser.


    Des images du Solar Dynamics Observatory (SDO). © SpaceRip-YouTube

    La complexité de la physique des plasmas solaires est telle qu'il est très difficile de construire une véritable météorologiemétéorologie solaire. Dans ce but, un groupe d'astrophysiciens américains développent un système automatique d'analyse des images de SDO pour tenter de réaliser rapidement des prédictions fiables. Ils viennent d'exposer le bilan de leurs travaux dans un article sur arxiv.

    Des programmes d'analyse des images qui apprennent

    Les données analysées proviennent d'observations effectuées à dix longueurs d'onde différentes. Mais comme l'atmosphèreatmosphère solaire est plutôt transparente, plusieurs images de structures se mélangent et il est particulièrement ardu d'en tirer des informations pertinentes pour la prédiction des humeurs du Soleil.

    Les chercheurs ont donc développé quinze programmes informatiques différents bien spécialisés. Certains se concentrent sur les éjections de massesmasses coronales et d'autres sur les taches solaires par exemple.

    Surprise : les astrophysiciens ont eu l'idée d'utiliser des techniques d'imagerie médicale employées pour dépister les cancers du sein. Un tel travail revient à décomposer les images de 1,6 million de pixelspixels en 1.024 blocs. Pour chaque bloc, un programme calcule diverses quantités comme l'entropieentropie (une mesure du désordre dans l'image). Lors du dépistagedépistage des cancers du seincancers du sein, les valeurs de ces quantités indiquent la présence d'une tumeurtumeur. Dans le cas présent, elles renseignent sur les taches solairestaches solaires et bien d'autres structures.

    Les programmes sont actuellement en train d'apprendre à reconnaître ces structures sur les images qui proviennent de SDO toutes les 12 secondes. L'espoir des chercheurs est que cette technique débouche un jour sur de véritables prédictions à court terme des colères du Soleil.