Au début de l'histoire de la planète et durant des milliers voire des millions d'années, l'hémisphère sud de Mars était en grande partie recouvert de vastes étendues d'eau. C'est ce qu'indiquent deux études, publiées coup sur coup, montrant la présence d'argiles particulières repérées grâce aux instruments de la sonde MRO.

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    Le delta du cratère Jezero où sont visibles les argiles (en vert). Un bon site d'atterrissage pour explorer le passé de Mars. © Nasa/JPL/JHUAPL/MSSS/Brown University

    Le delta du cratère Jezero où sont visibles les argiles (en vert). Un bon site d'atterrissage pour explorer le passé de Mars. © Nasa/JPL/JHUAPL/MSSS/Brown University

    On se doutait déjà que dans la première période de son existence, une ère géologiqueère géologique appelée Noachien, qui a duré jusqu'à environ 3,85 à 3,5 milliards d'années avant le présent, Mars abritait beaucoup d'eau liquide. La sonde Mars ExpressMars Express l'avait suggéré grâce à son spectromètre Omega. Mars Reconnaissance OrbiterMars Reconnaissance Orbiter (MRO) vient brillamment de le confirmer. Son spectromètre CRISM (Compact Reconnaissance Imaging Spectrometer for Mars), bien plus précis que Omega, a mis en évidence des phyllosilicatesphyllosilicates, ressemblant à l'argileargile, qui ne peuvent se former qu'en présence d'eau. Les données ont complété celles de la caméra à haute résolutionrésolution HiRise (High Resolution Imaging Science Experiment). Pour rapprocher les informations du spectromètre et de la caméra, les scientifiques utilisent un troisième instrument, la caméra du Context Imager (CTX). Il est alors possible d'analyser la composition géologique du sol avec une grande précision et notamment de produire de superbes images en fausses couleurs détaillant les minérauxminéraux repérés.

    Ces travaux ont fait l'objet de deux études. La première (qui vient d'être publiée dans Nature) a mis en évidence ces phyllosilicates dans les hauts plateaux, essentiellement situés dans l'hémisphère sudhémisphère sud et qui représentent à peu près la moitié de la surface de la planète. Des laveslaves, issues d'une activité volcanique plus récente, ont recouvert les terrains anciens du Noachien. Mais des milliers d'impacts de météorites ont creusé des cratères qui ont mis au jour les silicatessilicates enfouis.

    Ces terrains datent des débuts de l'histoire du système solaire, à une époque où les planètes subissaient un intense bombardement d'astéroïdesastéroïdes et de comètescomètes. Sur Terre, les roches de cette période ont presque toutes disparu, emportées par le mouvementmouvement des plaques tectoniquesplaques tectoniques et fondues dans les profondeurs du manteaumanteau. Sur la LuneLune, elles affleurent encore. Celles de Mars ont visiblement été confrontées à de l'eau liquide, qui a formé ces phyllosilicates, visualisant des traces de lacs et de vallées. « En certains endroits, précise John Mustard, membre de l'équipe CRISM à l'université Brown, l'altération des roches est telle qu'il a dû exister de grandes quantités d'eau coulant sur le sol. »

    La seconde étude a découvert, dans la région du cratère Jezero, les restes d'un deltadelta, datant du Noachien, déversant l'eau amenée par un réseau de rivières à l'intérieur d'un cratère, où s'est formé un lac d'environ 40 kilomètres de diamètre.

    De précieuses archives pour les missions futures

    Les analyses ont également montré une certaine diversité de ces phyllosilicates, qui contiennent soit de l'aluminiumaluminium soit du ferfer et du magnésiummagnésium et qui côtoient un autre silicate, l'opale (un silicate hydraté). Cette variété suggère que des conditions différentes sont à l'origine de ces minéraux. Il est vraisemblable que ces sols se sont formés dans des environnements différant d'un endroit à l'autre ou d'une époque à l'autre. Tous ces résultats conduisent les chercheurs à penser que l'eau est restée longtemps à l'état liquideétat liquide, durant des milliers voire des millions d'années. Contrairement à ce que l'on a longtemps cru, la planète, à l'histoire complexe et mouvementée, a donc connu pendant une longue période un climatclimat humide et des températures clémentes.

    Les conclusions de ces études auront un grand intérêt pour les prochaines missions. Ces argiles constituent en effet d'excellentes archives de l'histoire ancienne de Mars. En particulier, si la vie a pu se développer temporairement, elle aura pu laisser des traces d'une chimiechimie organique. « C'est vraiment très excitant, s'enthousiasme John Mustard. Nous avons trouvé des douzaines de sites où de futures missions pourront atterrir afin de vérifier si Mars a été habitable et, si tel est le cas, chercher des signes d'une vie passée. »