On ignorait si les étoiles dépassant 10 masses solaires naissaient comme les naines, avec un disque de poussières. A l’aide d'une méthode puissante, l’interférométrie, un groupe d’astronomes vient de montrer que c’est bien le cas pour au moins un bébé étoile de ce genre.

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    La naissance des étoiles est un sujet passionnant pour un astrophysicienastrophysicien. Des questions complexes de chimie, d'hydrodynamique et de transfert du rayonnement s'y mélangent de façon subtile mais elles en rendent d'autant plus difficile la tâche du théoricien qui cherche à comprendre la diversité du bestiaire stellaire à l'aide de modèles numériquesmodèles numériques et analytiques.

    Les étoiles dont les masses sont supérieures à 8 fois celles du Soleil constituent toujours une énigme pour les chercheurs. La formation des étoiles de plus faibles masses est bien plus aisée à comprendre. Comme c'est souvent le cas dans ce genre de problème, la solution de l'énigme passe par de nouvelles observations. On commence d'ailleurs à y voir plus clair grâce à celles fournies par Herschel.

    Une image d'artiste montrant un disque de poussières autour d'une étoile en formation avec une paire de jets. Crédit : ESO/L. Calçada/M. Kornmesser

    Une image d'artiste montrant un disque de poussières autour d'une étoile en formation avec une paire de jets. Crédit : ESO/L. Calçada/M. Kornmesser

    Une des difficultés principales pour comprendre la formation des étoiles massives est qu'elles doivent tellement rayonner que la pression de la lumièrelumière qu'elles émettent devraient stopper leur croissance par accrétionaccrétion au-delà de 8 masses solaires. Cela jette aussi des doutes sur la présence autour de ces étoiles en formation d'un disque de poussières. Ces disques sont observés depuis plus de 20 ans autour des étoiles en formation moins massives. Un exemple célèbre est celui de Bêta Pictoris qui fut la première étoile où un disque de ce genre a pu être observé optiquement en 1984.

    Souvent, les protoétoilesprotoétoiles observées avec un disque sont aussi accompagnées d'une paire de jets de matièrematière perpendiculaires à ce disque. Dans le cas de l'étoile centrale associée à l'objet du nom d'IRAS 13481-6124, à 10.000 années-lumièreannées-lumière de la Terre dans la constellationconstellation du Centaure, des images d'archives provenant du satellite SpitzerSpitzer de la NasaNasa, ainsi que des observations effectuées avec le télescopetélescope submillimétrique ApexApex de 12 mètres de diamètre, on pouvait deviner la présence de tels jets. Or, cette jeune étoile de 5 fois le rayon du Soleil et âgée de seulement 60.000 ans environ a une masse estimée à 20 fois celle du Soleil !

    Une image de l'objet IRAS 13481-6124 vue par Spitzer. Crédit : ESO/Spitzer/NASA/JPL/S. Kraus

    Une image de l'objet IRAS 13481-6124 vue par Spitzer. Crédit : ESO/Spitzer/NASA/JPL/S. Kraus

    Tout porteporte à croire qu'il ne s'agit plus vraiment d'une protoétoile mais bel et bien d'un bébé étoile. Si les données de Spitzer et Apex devaient être prises au sérieux, cela indique donc qu'un disque de poussières peut exister autour des étoiles massives et qu'il ne faut pas nécessairement faire intervenir des modèles de formation de ces étoiles très différents de ceux expliquant celle des étoiles de faibles masses. Certains avaient en effet proposé de faire intervenir la fusionfusion entre deux petites étoiles.

    Le doute ne semble plus permis suite à une publication dans Nature d'un article par un groupe d'astronomesastronomes ayant utilisé le dispositif AMBER équipant le VLTI (Very Large Telescope InterferometerVery Large Telescope Interferometer) .


    Une vidéo d'un zoom sur IRAS 13481-6124 fait d'un montage de plusieurs images. Crédit : ESO/Digitized Sky Survey 2/Spitzer/NASA/JPL/S. Kraus

    Selon les mots de l'astronome Stefan Kraus qui a dirigé l'équipe internationale de chercheurs : « Nos observations révèlent un disque environnant une jeune étoile massive à l'état embryonnaire, qui est maintenant totalement formée. Certains diront que le bébé est sur le point d'être mis au monde ». Et il ajoute : « C'est la première fois que nous pouvons prendre une image de la région interne d'un disque autour d'une étoile massive. Nos observations montrent que la formation se passe de la même manière pour toutes les étoiles, quelle que soit leur masse ».

    Le disque que les astronomes ont découvert présente un diamètre de 130 UA (Unités AstronomiquesUnités Astronomiques), c'est-à-dire de 130 fois la distance Terre-Soleil. La masse de matière qu'il contient semble, elle, être de 20 fois la masse du Soleil. Il ne devrait cependant plus résister longtemps à l'intense flux de radiation émis par la jeune étoile.