Il y a un mois, un groupe d’astronomes de l’ESO annonçait avoir mesuré la densité moyenne de matière au-dessus du disque galactique de la Voie lactée et n’y avoir pas détecté de matière noire. Ce résultat troublant pouvait signifier que la cosmologie tremblait sur ses bases. Deux astrophysiciens de Princeton affirment que non seulement les calculs des astronomes sont faux mais que, correctement menés, ils donnent au contraire une nouvelle preuve de la présence de la matière noire.

au sommaire


    C'était apparemment une bombe qui venait d'éclater dans le domaine de la cosmologie lorsqu'un groupe d'astronomesastronomes a rendu publics les résultats des analyses des observations menées sur les mouvements de près de 400 étoiles dans une région s'élevant à des milliers d'années lumières au-dessus du disque galactique. Ces mouvements devaient permettre d'évaluer la densité de matière noirematière noire présente dans une région de la Voie lactée entourant le Soleil.

    La courbe des vitesses de rotationvitesses de rotation des étoiles dans la GalaxieGalaxie indiquait qu'il devait y avoir de la matière noire, ou bien qu'il fallait modifier la loi de la gravitationgravitation de NewtonNewton à grande distance du bulbe galactique dans la Voie lactéeVoie lactée. Mais les mouvements des étoiles au-dessus du disque galactique semblaient eux démontrer que la matière noire n'existait pas ou pour le moins qu'il y avait un problème avec le modèle du halo de matière noire supposé entourant la Voie lactée. Plus précisément, il n'y avait pas de traces d'une attraction gravitationnelle autre que celle de la matière normale présente dans les étoiles et le milieu interstellaire entourant le Soleil dans le disque galactique.

    Les observations des courbes de révolution des étoiles autour du centre de leur galaxie montrent qu'elles tournent trop vite si l'on se base sur la loi de la gravitation de Newton ou sur la masse déduite de la luminosité des galaxies. © Gianfranco Bertone

    Les observations des courbes de révolution des étoiles autour du centre de leur galaxie montrent qu'elles tournent trop vite si l'on se base sur la loi de la gravitation de Newton ou sur la masse déduite de la luminosité des galaxies. © Gianfranco Bertone

    Les résultats avaient de quoi rendre perplexe. Il y a encore quelques années, ils auraient très probablement été largement ignorés en invoquant une erreur quelque part. Mais les tentatives pour détecter en laboratoire la matière noire, comme avec les expériences Coupp et Picasso, s'étant soldées par des échecs, il fallait sans doute y regarder à deux fois. Une motivation supplémentaire venait sans doute du fait que presque tout le monde s'attendait à ce que le LHC découvre rapidement la matière noire sous forme de particules supersymétriques. L'absence de résultats pouvait indiquer au final qu'il allait falloir largement revoir la copie sur la matière noire... et peut-être même la cosmologie.


    Quatre-vingt seize pour cent du contenu de l'univers est de nature inconnue. Les mystérieuses matière noire et énergie noire en sont-elles les composantes ? Ou bien est-ce une erreur dans les équations d'Einstein ? Des questions auxquelles le futur satellite Euclid de l'Esa répondra. © Réalisateur : Pierre-François Didek (Karamoja Productions). Directeur de collection : Vincent Minier (laboratoire AIM Paris-Saclay). AstrophysiqueTV-Dailymotion

    Une telle perspective était tout de même très difficile à accepter au regard des mesures du rayonnement fossile avec WMap et des observations des amas de galaxiesamas de galaxies conduites avec HubbleHubble et ChandraChandra, qui parlaient très fort en faveur de l'existence de la matière noire. Mais comme le disait, en substance, le biologiste, paléontologuepaléontologue et philosophe britannique Thomas Henry Huxley, « la science c'est de belles théories détruites par des faits horribles ». Il fallait donc rester ouvert.

    Une nouvelle preuve du modèle cosmologique avec matière noire

    Sans véritable surprise cependant, deux astrophysiciensastrophysiciens de l'université de Princeton, Jo Bovy et Scott Tremaine (l'un des grands maîtres de la théorie des galaxies), viennent de publier sur arxiv un article dévastateur pour la conclusion avancée par les astronomes de l'ESOESO.

    Bovy et Tremaine affirment que l'une des hypothèses faites par les chercheurs dans leurs calculs est tout simplement fausse car réfutée par les observations. Le résultat final des nouveaux calculs fournit même un retournement complet de la situation.

    Si Bovy et Tremaine ont raison, non seulement la matière noire est bien là, avec une densité parfaitement compatible avec celle du modèle standardmodèle standard, mais les mesures faites par les astronomes de l'ESO fournissent même selon les deux chercheurs « la mesure directe la plus robuste à ce jour de la densité locale de matière noire ».

    En tout état de cause, l'effet de la matière noire serait bien là, mais cela pourrait encore à priori être dû à autre chose, comme une modification de la gravitation. Futura-Sciences ne devrait pas tarder à revenir sur ce sujet en faisant un point sur l'état des recherches concernant la détection de la matière noire ainsi que des théories proposées pour s'en passer, basées sur Mond.