Le bombardement météoritique, observé sur Terre et sur la Lune encore aujourd'hui, doit exister également sur les autres planètes du Système solaire, en particulier interne. La sonde Messenger de la Nasa aurait bel et bien détecté indirectement l'effet de la chute d'un météoroïde sur la surface de Mercure, celui-ci ayant provoqué la formation d'un panache de plusieurs milliers de kilomètres de haut.


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    On se souvient encore de l'évènement de Tcheliabinsk survenu le 15 février 2013, à l'est de l'Oural, en Russie. Ce jour-là, un astéroïde de 19 mètres s'est brisé en de multiples fragments à environ 20 km d'altitude, libérant une énergie équivalente à 500 kilotonnes de TNT, soit presque 30 fois celle de la bombe d'Hiroshima. Ce type d'événement n'est pas rare sur Terre comme le rappelait la fondation B612 il y a quelques années : on avait dénombré 26 corps célestes ayant explosé dans l'atmosphèreatmosphère de la Terre entre 2000 et 2013, libérant à chaque fois une énergie comparable à celle de la bombe d'Hiroshima.


    Dans cette vidéo, 25 explosions liées à l'entrée dans l'atmosphère de petits corps célestes entre 2000 et 2013 sont indiquées. L'encadré, en haut à gauche, montre que ces explosions sont comparables à celle de la bombe d'Hiroshima. Heureusement, ces événements se sont produits à haute altitude et souvent au-dessus des océans. Un impact capable de détruire une ville peut arriver en moyenne une fois par siècle environ. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © The B612 Foundation,New Scientist

    De plus petites météorites sont également observées avec un flashflash de lumière au moment de leur impact sur la Lune qui, elle, ne possède pas d'atmosphère pour freiner et faire exploser certains petits corps célestes avant qu'ils n'atteignent le régoliterégolite lunaire. On doit s'attendre à observer de telles chutes sur d'autres planètes du Système solaire et c'est justement ce que fait savoir une équipe de chercheurs via une publication dans le célèbre journal Nature Communications.

    Jusqu'à présent donc, on n'avait observé de chutes de météorites que sur la Terre et la LuneLune, même si au cours de son périple sur Mars, le roverrover Opportunity a bel et bien rencontré quatre météorites tombées dans un passé récent sur la Planète rouge. Quelques membres de la noosphère nous expliquent donc maintenant que, selon eux, le 21 décembre 2013, la sonde de la NasaNasa MErcury Surface, Space ENvironment, GEochemistry and Ranging (MessengerMessenger) a bel et bien été témoin de l'impact d'un petit corps céleste sur MercureMercure.

    « C'est tout simplement incroyable que Messenger ait pu voir cela se produire », a déclaré Jamie Jasinski, physicienphysicien au Jet Propulsion LaboratoryJet Propulsion Laboratory de Pasadena, en Californie, et auteur principal de l'article publié.

    Illustration d’artiste montrant comment Messenger a observé le premier impact de météoroïde sur la surface d’une autre planète. Les particules (atomes neutres) éjectées par le météoroïde sont montées en flèche à plus de 4.800 kilomètres au-dessus de la surface de Mercure, à l’extérieur de son arc de choc (<em>Bow shock,</em> en anglais) la frontière à laquelle la vitesse du vent solaire baisse brusquement à la suite de son approche de la magnétopause. Là, des photons de lumière ont transformé les particules neutres en particules chargées (ions), que l’un des instruments de Messenger pouvait détecter. © Jacek Zmarz
    Illustration d’artiste montrant comment Messenger a observé le premier impact de météoroïde sur la surface d’une autre planète. Les particules (atomes neutres) éjectées par le météoroïde sont montées en flèche à plus de 4.800 kilomètres au-dessus de la surface de Mercure, à l’extérieur de son arc de choc (Bow shock, en anglais) la frontière à laquelle la vitesse du vent solaire baisse brusquement à la suite de son approche de la magnétopause. Là, des photons de lumière ont transformé les particules neutres en particules chargées (ions), que l’un des instruments de Messenger pouvait détecter. © Jacek Zmarz

    Un météoroïde à l'origine d'un panache de plus de 4.000 km de haut

    Le 21 décembre 2013 donc, alors que Messenger survolait la face diurnediurne de Mercure -- rappelons que, si Mercure n'est pas en rotation synchronesynchrone autour du SoleilSoleil, comme la Lune autour de la Terre, elle y est tout de même en résonancerésonance |0a3cf62f834a7bb9d8c452ee87884100|-orbiteorbite 3:2, effectuant trois tours sur elle-même pendant qu'elle effectue deux révolutions autour du Soleil --, un de ses instruments, le Fast Imaging Plasma Spectrometer (FIPSFIPS) a fait une surprenante mesure.

    Le spectromètrespectromètre à plasma à imagerie rapide (FIPS) a, en effet, détecté un brusque pic dans la composition du vent solairevent solaire autour de Mercure, pic trahissant à l'analyse des quantités anormalement élevées d'ionsions sodiumsodium et siliciumsilicium, et surtout animés de vitessesvitesses presque identiques en direction et valeur, comme si un jet de ces ions avait été produit.

    En rembobinant en quelque sorte le film de ce jet avec ces données concernant les vitesses, il est ensuite apparu que ce jet devait avoir été initié par un panache dense de matièrematière s'étant élevé sur plus de 4.000 kilomètres de hauteur à partir du sol de Mercure.

    Notre connaissance des impacts des petits corps sur une planète a alors permis aux planétologues de déduire des caractéristiques de ce panache qu'il devait résulter de l'impact d'un météoroïdemétéoroïde d'environ un mètre de diamètre -- météroïde est le terme introduit par l'astronomeastronome Hubert Anson NewtonNewton en 1864 pour désigner un petit corps du Système solaire provenant de la désagrégation généralement partielle d'un astéroïde ou d'un noyau cométaire.

    Un instrument similaire à FIPS équipe la mission BepiColombo de l'Agence spatiale européenneAgence spatiale européenne lancée vers Mercure en 2018. Elle se mettra en orbite autour de Mercure à la fin de 2025 si tout va bien. La sonde pourrait alors faire d'autres découvertes similaires.


     

    Voici le plus gros morceau (100 gr) de la météorite NWA 7325. Les 35 fragments ramassés en 2012 dans le désert marocain présentent la même composition minéralogique que la surface de la planète Mercure. © Stefan Ralew, sr-meteorites.de
    Voici le plus gros morceau (100 gr) de la météorite NWA 7325. Les 35 fragments ramassés en 2012 dans le désert marocain présentent la même composition minéralogique que la surface de la planète Mercure. © Stefan Ralew, sr-meteorites.de

     

    A-t-on découvert la première météorite venue de Mercure ?

    Article de Jean-Baptiste Feldmann publié le 05/02/2013

    NWA 7325 n'est pas une météorite comme les autres. Les 35 fragments (345 gr en tout) récupérés au Maroc en 2012 présentent une composition étrangement similaire à ce que la sonde Messenger nous a révélé de la croûtecroûte de Mercure.

    On sait que l'immense majorité des météorites récoltées sur Terre proviennent de la ceinture d'astéroïdes située entre les planètes Mars et Jupiter, auxquelles il faut ajouter quelques rares roches martiennes comme la météorite de Lafayette ou, tout aussi rares, quelques météorites lunaires. Les simulations démontrent cependant que nous devrions recevoir des météorites originaires de tous les astresastres du Système solaire interne.

    Lorsque la sonde américaine Messenger a fourni les résultats concernant la composition de la surface de Mercure, les astronomes ont alors cherché parmi les météorites inclassables celles qui pourraient en être issues. Un temps candidates, certaines météorites pierreuses comme les aubrites et les angrites ont finalement été écartées. Cependant, nous avons peut-être en notre possession un morceau de la planète Mercure.

    Les spectromètres de la sonde Messenger ont fourni de précieux renseignements sur la surface de Mercure. Sa composition est très proche de celle de la météorite NWA 7325. © Nasa, J<em>ohns Hopkins University Applied Physics Laboratory</em>, <em>Carnegie Institution of Washington</em>
    Les spectromètres de la sonde Messenger ont fourni de précieux renseignements sur la surface de Mercure. Sa composition est très proche de celle de la météorite NWA 7325. © Nasa, Johns Hopkins University Applied Physics LaboratoryCarnegie Institution of Washington

    Une météorite rare... et chère

    En 2012, le revendeur allemand Stefan Ralew a acheté un lot de 35 petites météorites ramassées peu de temps avant dans le désertdésert marocain. L'œilœil du spécialiste a été immédiatement attiré par l'aspect inédit de ces cailloux célestes qui présentaient une croûte brillante et un intérieur vert. Cet aspect vert vitreux a déjà été observé sur les météorites lunaires mais jamais avec une couleurcouleur aussi intense. Conscient de la valeur exceptionnelle de ces météorites, Stefan Ralew a envoyé quelques grammes de roche à l'université de Washington où travaille Anthony Irving, un spécialiste des météorites planétaires qui a déjà expertisé des cailloux lunaires et martiens.

    Anthony Irving et son équipe ont constaté que les échantillons de NWA 7325 avaient une composition très proche de celle de la croûte de Mercure, telle que nous l'a révélée la sonde Messenger : de l'aluminiumaluminium, du magnésiummagnésium mais surtout très peu de ferfer. Les chercheurs ont également trouvé dans la météorite des silicatessilicates de calciumcalcium, dans une proportion différente de celle connue sur Mercure. Pour Anthony Irving, cette anomalieanomalie pourrait s'expliquer par l'origine de la météorite (arrachée des profondeurs de Mercure lors d'un violent impact) ou par des altérations subies au cours de son voyage entre Mercure et la Terre. Il pourrait donc s'agir d'un morceau de la première planète du Système solaire. Toutefois, certains scientifiques, prudents, n'excluent pas qu'un astéroïde différencié puisse être à l'origine de NWA 7325.

    Les tests se poursuivent mais les chercheurs savent que les quelques grammes de NWA 7325 dont ils disposent seront insuffisants pour réaliser toutes leurs analyses. Stefan Ralew ne devrait pas fournir facilement d'autres échantillons : le prix actuel de ses météorites pourrait en effet atteindre 5.000 dollars le gramme (près de 4.000 euros). Anthony Irving pense de son côté que le débat ne sera tranché que lorsqu'on rapportera des échantillons du sol de Mercure, une opération qui n'est même pas envisagée lors la mission BepiColombo, à l'horizon 2020.