Après plus de quatre mois passés dans les plaines arctiques de la Planète rouge, Phoenix commence à souffrir de la rigueur du climat. Ses jours sont désormais comptés.


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    L’environnement de Phoenix le 7 octobre 2008. Des traces de glace sont nettement visibles. Crédit Nasa

    L’environnement de Phoenix le 7 octobre 2008. Des traces de glace sont nettement visibles. Crédit Nasa

    La sonde américaine PhoenixPhoenix avait atterri le 25 mai dernier en région arctiquearctique martienne, sous une latitudelatitude correspondant à peu de chose près au nord de l'Alaska sur Terre. A ce moment, le Soleil grimpait encore haut dans le ciel et alimentait sans peine les deux panneaux solaires, fournissant aux instruments une énergie de quelque 3.300 wattheures par journée martienne (qui dure 24 heures 39 minutes), soit de quoi alimenter une ampoule de 60 watts durant 55 heures.

    Phoenix vue par elle-même, montrant un des deux panneaux solaires (photo prise durant l’été martien). Crédit Nasa

    Phoenix vue par elle-même, montrant un des deux panneaux solaires (photo prise durant l’été martien). Crédit Nasa

    Comme en toute région arctique, quelle que soit la planète, le Soleil reste constamment visible durant l'été. Mais l'hiverhiver approchant, l'astre du jour a commencé à plonger sous l'horizon un peu plus longtemps chaque jour, réduisant progressivement l'énergie disponible à bord.

    Le problème est encore accentué par le fait que les deux panneaux solaires de Phoenix n'ont pas été conçus pour être orientés en direction de la source, comme le sont par exemple ceux de la Station Spatiale Internationale. Le nombre d'expériences réalisables à bord, en effet, ne justifiait pas une duréedurée de vie supérieure à quelques mois. Les jours de Phoenix, à son arrivée sur Mars, étaient déjà comptés.

    Pourtant, les chercheurs aimeraient bien garder le contact avec leur petit ambassadeur martien le plus longtemps possible, ne fût-ce que pour savoir comment l'hiver se manifeste dans l'environnement désolé de l'engin. Déjà, tous les moyens ont été mis en œuvre pour économiser l'énergie disponible, et certaines analyses de sol programmées pour septembre (une analyse chimique et quatre expériences dans les fours Tega restants) ont été étalées jusqu'à fin octobre.

    Barry Goldstein, directeur du programme, n'exclut pas que les échantillons restants soient rassemblés et analysés ensemble. La raison en est que la quantité d'énergie nécessaire pour la manipulation du bras est pratiquement impossible à déterminer d'avance tandis que le fonctionnement des fours est, lui, parfaitement connu. Cela permettrait de mieux organiser la dépense énergétique en fonction de la quantité d'électricité encore disponible à bord.

    Le sol gelé de Mars, vu le 7 octobre (sol 131). Crédit Nasa

    Le sol gelé de Mars, vu le 7 octobre (sol 131). Crédit Nasa

    Le samedi 13 septembre, soit le 109e jour martien après l'atterrissage l'énergie fournie par les panneaux solaires était tombée à 2300 W/heure et baisse rapidement. Les instruments de la sonde ont été conçus pour fonctionner sous 1.000 W.h, ce qui représente la valeur minimale pour que la sonde puisse se réveiller lorsque la température remonte.

    Quant aux températures, si elles oscillaient entre -20°C (la journée) et -80°C (la nuit), elles ont commencé à baisser respectivement à -30°C et -90°C, et devraient atteindre -120°C à la mi-novembre.

    « Nous poursuivrons la mesure des températures tant que nous le pourrons », indique Peter Taylor, de l'Université York à Toronto (Canada), responsable du département météométéo de la sonde. De même, la NasaNasa tentera aussi de garder le lidarlidar en activité pour étudier les nuagesnuages ainsi que la caméra pour obtenir des images du terrain au fur et à mesure que celui-ci est envahi par le gelgel, lequel a déjà commencé à se former dans les excavations creusées par Phoenix.

    Phoenix pris par les glaces ?

    Jusqu'à présent, aucune trace de gel n'a encore été observée sur la sonde elle-même, excepté sur le petit miroirmiroir utilisé pour visualiser le ventvent au sommet du mât d'instruments car Phoenix reste plus chaud que le terrain aux alentours. Son architecture a en effet été conçue pour absorber le plus possible le rayonnement solairerayonnement solaire et émettre le moins possible dans l'infrarougeinfrarouge. L'engin conserve ainsi sa propre chaleurchaleur qui se disperse très lentement.

    Les traces de gel observées actuellement dans l'environnement immédiat sont composées uniquement de glace d'eau, car la température n'est pas encore assez basse pour provoquer la solidificationsolidification du dioxyde de carbonedioxyde de carbone. Il est probable que lorsque cela surviendra, Phoenix se sera tue à jamais.

    Image en fausses couleurs des tranchées creusées dans le sol martien, déjà revêtues d’une pellicule de glace. Crédit Nasa

    Image en fausses couleurs des tranchées creusées dans le sol martien, déjà revêtues d’une pellicule de glace. Crédit Nasa

    Une résurrection ?

    Quant aux chances de voir Phoenix se réveiller au terme de l'hiver martien, les scientifiques de la mission n'y croient guère... L'engin comporte bien un "mode Lazare", censé ressusciter la sonde dès que l'énergie disponible à bord sera suffisante, et lancer automatiquement un programme qui l'amènerait à communiquer avec la Terre. Mais les conditions environnementales décrites par Phoenix depuis son atterrissage sont pires que celles qui avaient été prévues à l'origine (cette visite en région arctique est une première). Les concepteurs de la sonde pensent que ses composants ne résisteront pas à une température inférieure à -125°C, estimant que les matériaux commenceront à se fendre et provoqueront des dommages irréversibles.

    Quoi qu'il en soit, d'ici un an, lors du retour du printemps dans la région arctique de Mars, les grandes oreilles de la Nasa seront à l'écoute et tous les techniciens aux abois. Ne fût-ce que pour leur satisfaction personnelle...