Ravitailler et réparer un satellite opérationnel en orbite, cela n’a encore jamais été fait. Pour démontrer cette capacité, la Nasa et le constructeur Space Systems Loral (SSL) réalisent la mission Restore L qui, en 2020, va rejoindre le satellite américain Landsat 7.

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    Aujourd'hui, quand un satellite tombe en panne ou devient incontrôlable, il n'y a pas grand-chose à faire si ce n'est surveiller sa trajectoire pour éviter que d'autres satellites n'entrent en collision avec lui. C'est par exemple le cas avec le satellite Envisat, de l'Agence spatiale européenneAgence spatiale européenne (ESA). Subitement tombé en panne en avril 2012, celui-ci est devenu le plus gros débris recensé ; il nous contraint à réfléchir à une mission de désorbitation.

    Demain, il sera possible de ravitailler en orbite un satellite en panne d'ergols, d'effectuer des opérations de maintenance ou de réparation (comme déployer un panneau solaire ou pointer une antenne de communication dans la bonne direction), voire de corriger sa trajectoire ou sa position orbitale. 

    Un des deux bras robotiques de la mission Restore L. Il a été conçu au centre spatial Goddard, de la Nasa. © Nasa

    Un des deux bras robotiques de la mission Restore L. Il a été conçu au centre spatial Goddard, de la Nasa. © Nasa

    Restore L ravitaillera le satellite Landsat 7

    Pour tester les technologies nécessaires à ces activités de service aux satellites en orbite, la Nasa veut lancer, en 2020, le satellite Restore L. Celui-ci devra ravitailler LandsatLandsat 7 et le transférer sur une autre orbite. Entre 10 et 110 kilogrammes d'ergols seront transférés à ce satellite d'observation de la Terreobservation de la Terre lancé en 1999 et dont la duréedurée de vie initiale est dépassée.

    Construit par Space Systems Loral (SSLSSL), Restore L combinera plusieurs technologies liées à la navigation et à l'approche ainsi qu'à la robotiquerobotique et au transfert d'éléments d'un satellite à l'autre. La démonstration en orbite aura un intérêt évident pour d'autres missions spatiales d'exploration et les activités humaines en orbite. Les technologies testées sont similaires à celles envisagées pour la mission à destination de l'astéroïdeastéroïde Psyché et à celles prévues pour l'assemblage de structures en orbite (programme LibelluleLibellule).

    À court terme, la maîtrise de l'assemblage en orbite de structures de plus en plus grandes amènera les architectesarchitectes des satellites à se libérer des contraintes de tailles, de formes et de massesmasses des coiffes utilisées par les lanceurslanceurs dans le but de protéger les charges utiles lors de leur lancement.

    Le boum attendu de l'industrie des services par satellites

    Aujourd'hui, sur les quelque 1.200 satellites actifs situés dans l'environnement proche de la Terre et les 2.500 satellites inactifs en orbite autour de notre planète, seuls le télescope spatial Hubble et la Station spatiale internationale (ISS) sont conçus pour être ravitaillés ou réparés en orbite. La Nasa ainsi que la Darpa (l'Agence américaine des projets avancés de la Défense) ont bien compris les enjeux de cette industrie naissante pour sécuriser l'infrastructure spatiale des États-Unis. 

    Pour accélérer le développement de ces technologies et démarrer des services aux satellites, la Nasa prévoit de transférer les technologies de Restore L à des entités commerciales. Cette activité peut s'avérer utile pour prolonger la durée de vie des satellites ; le secteur de l'assurance spatiale pourrait être un catalyseurcatalyseur important. Cette activité se heurte toutefois à l'obsolescence des équipements et des constructeurs de satellites. Notons par ailleurs qu'elle pourrait dérégler le marché d'occasion des satellites en fin de vie. Ainsi, le service aux satellites pourrait devenir une option pour ne pas dédommager un client si une compagnie d'assurance juge qu'il est plus opportun de financer une mission de ravitaillement, de réparation ou de rehaussement d'orbite.


    Ravitailler un satellite en orbite, c'est possible

    Article de Rémy DecourtRémy Decourt publié le 18/02/2013

    En démontrant qu'il est possible de ravitailler un satellite en orbite, les agences spatiales américaine et canadienne ont franchi une étape importante dans la robotique spatiale. À terme, cela pourrait déboucher sur une nouvelle activité commerciale dans l'espace.

    La Nasa et l'Agence spatiale canadienne ont réussi à démontrer qu'il était possible de faire le plein dans l'espace et de ravitailler des satellites en orbite, même ceux qui ne sont pas conçus pour l'être à l'origine. Cette démonstration a été réalisée à l'extérieur de la Station spatiale internationaleStation spatiale internationale dans le cadre de la mission de ravitaillement robotique (RRM, Robotic Refueling Mission) réalisée en coopération par les deux agences.

    L'expérience, qui s'est étalée sur plusieurs mois, a consisté à tester divers outils et procédures grâce auxquels des systèmes robotisés pourront ravitailler des satellites en orbite. Cette expérience utilise Dextre (le manipulateur agile spécialisé), le bras robotique Canadarm2 ainsi qu'un module jouant le rôle du satellite et un ensemble d'outils livrés à bord de l'ISS lors de la dernière mission de la navette Atlantis en juillet 2011. Elle s'est achevée à la fin du mois de janvier avec la simulation du ravitaillement d'un satellite en transférant de l'éthanol liquideliquide dans le module fabriqué par la Nasa. Ce transfert de liquide était la tâche principale de l'expérience. La manœuvre était particulièrement difficile, car la manipulation de liquide dans l'espace exige une précision parfaite afin d'éviter des fuites dangereuses.


    Cette vidéo explique la dernière phase de la démonstration d'une mission de ravitaillement réalisée à l'extérieur de la Station spatiale internationale. © Nasa, YouTube

    L'ouverture d'un nouveau marché spatial en question

    Cette démonstration réussie est une étape importante dans le développement des technologies et techniques robotiques dans le domaine de l'entretien des satellites en orbite, que ce soit pour les ravitailler ou les désorbiter avant qu'ils ne deviennent des débris spatiaux. Ce succès pourrait ouvrir la voie à une nouvelle activité commerciale dans l'espace et changer cinquante ans de pratique courante, qui consiste à mettre hors service un satellite lorsqu'il a épuisé ces réserves d'ergols.

    La Nasa réfléchit à la mise en place d'un partenariat public-privé comme elle l'a fait pour la desserte de la Station spatiale internationale en la confiant au secteur privé. Il existe plus de 1.100 satellites actifs dans l'environnement proche de la Terre et 2.500 satellites inactifs en orbite autour de notre planète. Une entreprise privée pourrait donc y trouver son compte.

    Cela dit, ce pari économique est risqué. S'il ne fait guère de doute que des missions de désorbitation se justifient (comme avec Envisat), l'idée de prolonger la durée de vie des satellites se heurte d'une part à l'obsolescence des équipements et des constructeurs de satellite, et d'autre part au fait qu'elle pourrait dérégler le marché d'occasion des satellites en fin de vie. Cette activité bien réelle et peu connue du grand public permet aux grands opérateurs de satellites de les céder à des utilisateurs qui recherchent des solutions de service à bas coût plutôt que d'être à la pointe de la technologie. À suivre, donc.