Le 2 janvier 1959, il y a exactement cinquante ans, un vaisseau automatique, nommé officiellement Lunik 1, s’élançait depuis Baïkonour à l’assaut de la Lune. Deux jours plus tard, il passait à moins de 6.000 kilomètres de son objectif et devenait le premier objet créé de main d’homme à s’inscrire en orbite solaire.

au sommaire


    Lunik 1. Crédit Agence spatiale russe

    Lunik 1. Crédit Agence spatiale russe

    A peine plus d'une année se sera écoulée entre la mise en orbite du premier satellite artificiel Spoutnik 1Spoutnik 1 et l'envoi du premier objet en direction de la Lune. En réalité, et on ne le saura que bien plus tard, les Russes ambitionnaient de réaliser cet exploit en moins d'un an. Mais la première tentative, programmée pour le 23 septembre 1958, avait pris fin dans l'explosion du premier étage du lanceur à la 92ème seconde de vol. Une deuxième, le 11 octobre, s'était terminée de la même façon à la 104ème seconde et la troisième, le 4 décembre, avait à peine fait mieux avec une extinction prématurée des moteurs du premier étage à la 245ème seconde de l'ascension, suite à une défaillance des turbopompes à propergolspropergols, suivie de la chute de l'engin.

    Aussi la tension devait-elle être à son comble le 2 janvier 1959 à 16 h 41 mn 21 secondes, lorsqu'un panache blanc entoura brusquement la fuséefusée Semiorka, qui se mit à grimper dans le ciel de BaïkonourBaïkonour sans que rien ne semblât capable de la stopper.

    Lunik 1, petite massemasse sphérique de 361 kgkg mesurant 120 cm de diamètre, était tapie sous sa coiffe, ses cinq antennes fouet repliées. Le tir était direct, sans satellisation préalable autour de la Terre et dès la vitessevitesse de libération atteinte, la précieuse charge utile, qui fut rebaptisée Metcha (rêve, en russe) se séparait du dernier étage de la fusée de 1.472 kg. Celui-ci, inerte, était condamné à suivre inutilement la sonde pour l'éternité, ou presque... Une dernière fonction avait pourtant été confiée à ce long cigare de 5,2 mètres de long pour 2,4 mètres de diamètre : relâcher 1 kg de sodiumsodium afin de tester le comportement du gazgaz dans l'espace. Celui-ci fut libéré le 3 janvier à 113.000 km de la Terre, et une traînée de couleurcouleur rouge-orange fut bientôt visible, atteignant l'éclat d'une étoileétoile de sixième magnitudemagnitude au-dessus de l'océan Indien.

    Luna 1. Crédit Agence spatiale russe

    Luna 1. Crédit Agence spatiale russe

    Une importante moisson scientifique

    Cependant Lunik 1, dont le but était de valider la trajectoire Terre-Lune par la voie directe (elle serait bientôt abandonnée au profit d'une étape intermédiaire en orbite de parking), n'était pas équipé de moteurs d'orientation ni de correction de trajectoire. Il y avait de ce fait peu de chances pour que l'engin atteigne le sol lunaire. Néanmoins, les concepteurs y avaient placé une sphère métallique sur laquelle étaient incrustés, en mosaïque, les divers emblèmes de l'Union soviétique et du drapeau marqué du marteau et de la faucille.

    Le 4 janvier, vers 2 heures du matin, soit après 34 heures de vol, Lunik 1 survola les montagnes lunaires à 5.995 kilomètres d'altitude puis plongea dans l'espace interplanétaire, s'inscrivant sur une orbite solaire entre la Terre et Mars. Cette orbite, de 146 x 195 millions de kilomètres, est décrite en 450 jours et amène la petite sonde à croiser la Terre tous les quatre ans environ. En rêvant un peu, on pourrait imaginer nos petits-enfants admirer cet engin à la fois précurseur et légendaire derrière une vitrine de la grande nation terrestre...

    Mais revenons sur Terre (si on peut dire). La moisson scientifique de Lunik 1 n'est pas négligeable, car sur ce premier engin destiné à traverser la ceinture de Van Allen, les techniciens avaient installé un magnétomètremagnétomètre, un scintillateur, un compteur Geiger et un détecteur de micrométéorites.

    Le niveau de radiations de la ceinture de Van Allen s'est révélé moins élevé que prévu dans la zone traversée, ce qui en a permis un début de cartographie. En revanche, les deux découvertes primordiales de cette mission ont été l'absence de champ magnétiquechamp magnétique détectable autour de la Lune, et surtout l'existence d'un vent solairevent solaire dans l'espace interplanétaire.

    Le programme Lunik - Luna

    La prochaine mission, Lunik 2, sera lancée le 12 septembre de la même année et atteindra le sol lunaire pour la première fois deux jours plus tard. Une autre tentative avait aussi échoué le 18 juin par la perte de contrôle du lanceur à la 153e seconde de vol (panne de la plate-forme à inertieinertie). Enfin, le 4 octobre 1959, exactement un an après l'envol du premier satellite artificiel, Lunik 3 décollait puis, pour la première fois, contournait la Lune en transmettant les premières photographiesphotographies de sa face cachée.

    Le programme Lunik s'est poursuivi officiellement jusqu'en 1976. Notons toutefois que la graphie Lunik a été abandonnée depuis la septième mission, pour laquelle - et les suivantes - il convient d'écrire Luna. Luna 24, lancé le 9 août 1976, concluait la série par un succès et l'étage supérieur de la sonde parvenait à redécoller en ramenant sur Terre quelque 170 grammes de sol lunaire.

    Notons cependant que parmi ces 24 missions, quinze seulement ont été considérées comme un succès, les autres ayant cessé de communiquer ou s'étant écrasées sur notre satellite. Vingt autres missions, non révélées à l'époque, se sont terminées par un échec au lancement ou de la mise en orbite terrestre.