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    Bijoux, vases, éléments domestiques et de parure... témoignent du travail du bronze et de la présence des Celtes en Gaule.

    Bijoux celtiques. © Matthew Ford, CC by-sa 4.0
    Bijoux celtiques. © Matthew Ford, CC by-sa 4.0

    Les Celtes et le bronze

    L'appellation Celtes apparaît en premier chez Hécatée de Milet vers 500 av. J.-C, puis chez HérodoteHérodote vers 450 av. J.-C. Ce mot viendrait de l'indo-européen « keletos », rapide, ou « kel-kol », habitant, colon. Le mot Galate apparaît dans la littérature grecque en 279 av. J.-C., Galli apparaît pour la première fois en 168 av. J.-C. dans « Les Origines » de Caton l'Ancien (traduction latine de Galates ?).

    Les termes de Gaulois et de Celtes sont au début synonymes. Puis les Romains réservent le premier terme seulement à une partie des Celtes qui sont fixés en Gaule cisalpine et transalpine. César était conscient du caractère conventionnel de ces distinctions « Ceux que nous nommons Gaulois dans notre langue, se nomment Celtes dans la leur ». Aujourd'hui, on admet généralement le terme de Gaulois pour les habitants de la Gaule à partir du IIIe siècle av. J.-C. Pour les périodes précédentes et les autres zones géographiques on parle de Celtes. Mais les Belges et les Boïens sont aussi des Celtes.

    Les origines des Celtes demeurent obscures et, aujourd'hui, deux théories s'affrontent, celle, classique, des migrations et une théorie plus récente qui laisse penser que les Celtes seraient une population autochtone...

    Torque bronze celte IV à II<sup>e</sup> av. J.-C.
    Torque bronze celte IV à IIe av. J.-C.

    La migration des Celtes : une culture homogène apparaît sur les steppessteppes d'Asie Centrale au VIe millénaire av. J.-C., le peuple de Kourgan (pratique funéraire du tumulus) atteint l'Europe orientale vers 4000 av. J.-C., puis migre vers l'Europe de l'Ouest à partir de 2500 av. J.-C. et remplace les populations autochtones, non indo-européennes (culture des vases campaniformes). Les Celtes auraient pénétré en Gaule (et en Espagne) vers 1200 av. J.-C.

    L'utilisation intensive du bronze va entraîner des mutations considérables dans la vie des hommes, des progrès décisifs sont accomplis, entre autres dans la technique du bronze : coulage dans des moules, martelage à chaud, durcissement par écrouissage pour fabriquer des armes (couteaux et épées) beaucoup plus tranchantes que celles en pierre ou en os.

    Char cultuel, bronze, époque Halstatt vers 800 av. J.-C.
    Char cultuel, bronze, époque Halstatt vers 800 av. J.-C.

    Les échanges commerciaux : pour fabriquer le bronze, il faut aller chercher l'étain qui vient d'Armorique ou de Grande-Bretagne, et le cuivre qui vient des Alpes ou d'Europe de l'Est. Des échanges importants vont donc voir le jour entre la Gaule et le monde méditerranéen (Grecs et Étrusques) avide de bronze. La recherche de l'ambre (Baltique, mer du Nordmer du Nord) et du sel (Autriche) vont aussi contribuer à ces échanges. Au début du Ier millénaire, vers 900 av. J.-C., une nouvelle civilisation s'implante dans notre pays, celle du fer avec Hallstatt puis la Tène. À ce sujet, voir le dossier sur le fer qui traite de ces deux époques.

    C'est sur cette fameuse route de l'étain que se situe la tombe de Vix. À environ 5 km au nord nord-ouest de Châtillon-sur-Seine, en Bourgogne du Nord, dominant le village de Vix se trouve une butte appelée le mont St. Marcel ou encore mont Lassois.

    C'était en janvier 1953, René Joffroy, devait rentrer à Châtillon-sur-Seine et Moisson resta seul pour creuser. Le lendemain matin, Moisson arrive tôt chez René Joffroy : « Hier soir, dit-il, en enlevant la terre, un gros objet est apparu. »

    Joffroy se rend sur les fouilles et réalise l'importance de la découverte : l'objet apparu est l'anseanse d'un vase, d'un cratère antique, mais si grande...

    C'est dans la pluie, le froid et la boue que sera extrait le cratère ; avec toutes les précautions nécessaires, il faudra quatre jours pour le sortir et il est dans un triste état : écrasé, le col et le pied sont rentrés dans la pansepanse, les anses ne tiennent que par un rivet. Mais tous les morceaux sont là ! Le cratère est transporté à Châtillon et nettoyé. La boue mise dans des caisses pour les passer dans un tamis afin de récupérer les petits morceaux. Mais voilà des curieux qui viennent gêner les travaux. Il faudra leur dire que les fouilles sont finies. Les 12 et 13 février 1953, on découvrait le corps de l'inhumée parée de nombreux bijoux dont des bracelets en schiste et en perles d'ambre. Le crânecrâne apparut avec un admirable torque en or de 24 caratscarats et de 480 g encore au cou de la femme depuis 2.500 ans. Cette femme d'une trentaine d'années est morte vers 500 av. J.-C. La défunte appartenait à la race nordique qui semble avoir prédominé parmi les peuples germano-celtiques de la fin de l'âge du bronze et du début de l'âge de fer. À en juger par la richesse de ses bijoux, par la somptuosité de ses funérailles, elle était de haut rang.

    Cratère de Vix.
    Cratère de Vix.

    Le cratère de la tombe de Vix. C'est un vase antique à deux anses, en forme de coupe, dans lequel on mêlait l'eau et le vin. Il peut contenir quelque 1.100 litres. La cuve et le col sont martelés en une seule pièce. La plupart des autres parties semblent avoir été coulées. Le cratère était recouvert d'un couvercle sur lequel était fixée une statuette de femme haute de 19 cm, dont la tête est significative de la fin de l'art grec archaïque. Selon toute vraisemblance, le vase a été fabriqué dans l'une des colonies grecques d'Italie du Sud. Le transport du cratère (208 kgkg) jusqu'en Bourgogne apparaît comme extraordinaire et, selon le conservateur il semble qu'il ait été démonté pour le transport et remonté sur place, il apparaît, en effet, sur le vase lui-même, des marques - repères de montage. La vallée du Rhône n'était pas une voie de communication facile. L'usage du vase reste obscur. Des traces de corrosioncorrosion semblent indiquer qu'au moment de la fermeture de la tombe, le récipient était à moitié rempli d'une boisson sans doute alcoolisée, comme c'était le cas pour un chaudronchaudron de bronze dans une tombe de Hallstatt (Autriche).

    Les Gallo-Romains et le bronze en Bourgogne

    Au sud de Chevroches se trouve un méandre fossilefossile de l'Yonne. Ce site est occupé depuis le Néolithique. Au début de notre ère une grosse agglomération gallo-romaine a vu le jour au franchissement de l'Yonne par la voie reliant Entrains-sur-Nohain à Autun et ce gué reste visible aujourd'hui. À la fin du premier siècle une importante réorganisation des lieux avec des constructionsconstructions en pierre et une trame romaine apparaît. Plusieurs remaniements sont faits au cours des siècles suivants jusqu'à la désaffectation du site vers la fin du IVe siècle ap. J.-C. Un incendie ? Un abandon violent ? Personne, en tout cas n'est venu récupérer les dépôts d'objets en métalmétal enfouis... pour notre plus grand bonheur ! L'activité métallurgique y tenait une place importante au IVe siècle (fer et bronze) et s'organisait dans de vastes ateliers implantés au sein d'îlots délimités par des rues. De remarquables pièces de mobilier en bronze, fer ou plombplomb ont été découvertes en abondance : outils, éléments domestiques, harnachement, barres et chutes de forge, éléments de parure et même un élément de garniture de fourreau ajourée, trésors monétaires et dépôts d'objets métalliques, qui constituaient des réserves de métal voué à la refonte afin de fabriquer des fausses monnaies ou de servir aux réparations.

    Quatre aires de travail de métal ont été découvertes et deux objets remarquables :

    1. Une garniture de fourreau en bronze signée Gemellianus à Aquae Helveticae qui confirme la renommée de cet artisan Helvète qui vient de Baden (Aquae Helveticae) et qui œuvrait au IIe siècle, ce qui prouve un commerce certain !
    2. Un disque de bronze de 6 cm de diamètre, magnifique et gravé suscite nombre d'interrogations ! Le pourtour de ce disque bombé est divisé en 12 compartiments égaux dans chacun desquels sont gravés trois mots grecs superposés : la ligne extérieure indique les 12 mois égyptiens, la ligne médiane les 12 mois du zodiaquezodiaque et la ligne intérieure les 12 mois romains... Était-il destiné à établir des horoscopes ? Un mystère... L'analyse permet de dater la fabrication de ce disque astrologique à la fin du IIIe siècle de notre ère.
    Disque de Chevroches (exposition virtuelle de l'Inrap). © Inrap
    Disque de Chevroches (exposition virtuelle de l'Inrap). © Inrap

    Le bronze au Moyen Âge

    Aux Ve-VIe siècles, les orfèvres produisent des bijoux cloisonnés magnifiques. C'est à Mohenjo-Daro (vallée de l'Indus), dans une couche archéologique datée d'environ 2750 avant J.-C., que furent retrouvés les plus anciens témoins de l'orfèvrerie cloisonnée connus. Ce sont les Sarmates qui l'ont transmise à l'Occident. Élèves à la fois des ateliers sarmates et hellènes de la mer Noiremer Noire, les orfèvres Goths ont largement contribué à cette diffusiondiffusion.

    La technique de l'orfèvrerie cloisonnée - le cloisonné - est l'art de sertir dans un réseau de cloisons en métal, des pierres de couleurcouleur. C'est une technique qui fait partie de l'orfèvrerie battue (opposée à moulée) : le métal est battu en feuilles, minces et on sertit, à froid, des tables de verre ou des pierres précieuses découpées selon la forme désirée, dans des cloisons de métal rapportées, souvent du cuivre, ou de l'or. Pour donner de l'éclat aux tables de grenat, on fixe dessous un paillon, qui est un petit élément de métal gaufré ou guilloché, souvent d'argentargent.

    Fibules bronze or argent grenat et verre, VII<sup>e</sup> s. ap. J.-C.
    Fibules bronze or argent grenat et verre, VIIe s. ap. J.-C.

    Dans le cas de l'émailémail cloisonné, les cloisons de métal sont rapportées sur le fond et soudées ou collées (colle de pépin de coing par ex.). L'adhérence se fait au moment de la fusionfusion du verre, au four. Les cloisons, épaisses ou fines, sont rapportées selon les techniques du plein émail ou de l'émail enfoncé. Dans ce dernier cas, la plaque de métal est préalablement creusée.

    Un atelier de fondeur de plaques-boucles mérovingien à St-Denis, Paris, datant du premier millénaire. Document du Ministère de la culture : St-Denis, une ville au Moyen Âge.

    Schéma de la fabrication en série d'un ardillon de plaque-boucle. L'artisan crée un prototype, en bois ou en métal (B), qui lui sert à fabriquer un moule bivalve (A) dans lequel il coule de la cire pour obtenir plusieurs tirages (C) faciles à décorer (D). Il enrobe chacun d'argile (E) ; lors de la cuisson du moule, sous l'effet de la chaleur, la cire fond (F), mais l'objet décoré laisse son empreinte qui sera remplie d'une coulée de bronze (G). Une fois le métal refroidi, l'artisan casse le moule pour libérer la pièce (H). © UASD, M. Wyss 
    Schéma de la fabrication en série d'un ardillon de plaque-boucle. L'artisan crée un prototype, en bois ou en métal (B), qui lui sert à fabriquer un moule bivalve (A) dans lequel il coule de la cire pour obtenir plusieurs tirages (C) faciles à décorer (D). Il enrobe chacun d'argile (E) ; lors de la cuisson du moule, sous l'effet de la chaleur, la cire fond (F), mais l'objet décoré laisse son empreinte qui sera remplie d'une coulée de bronze (G). Une fois le métal refroidi, l'artisan casse le moule pour libérer la pièce (H). © UASD, M. Wyss 

    Une aire de travail, reconnue en bordure de la nécropolenécropole, sur près de 30 mètres de long, comprenait des soles de foyersfoyers semi-enterrés, des fosses-cendriers et quantité de scoriesscories provenant de la fontefonte d'alliagesalliages cuivreux. Au centre de l'atelier, un fond de cabane était réutilisé comme dépotoir. Son comblement renfermait des résidus de curagecurage de foyers et des fragments de moules en terre cuite attestant la technique de la fonte à cire perdue. L'atelier produisait des plaques-boucles caractéristiques de la fin du VIe et du début du VIIe siècle.

    La dinanderie existe depuis très longtemps mais se développe beaucoup au Moyen Âge. Le terme, lui, vient de Dinant, sur la Meuse. Il s'agit de l'art de battre un disque de métal (cuivre, étain, argent) et de le former au marteau pour exécuter poteries et sculptures, par retreint, recuit et planage. Pièces uniques allant des calicescalices à des sculptures monumentales. Actuellement le poinçonpoinçon DDD (dinanderie de dinandier) indique une œuvre martelée, PMD (poterie de métal du dinandier) une pièce martelée avec souduresoudure, brasurebrasure et manchonnage.

    Chandelier, dinanderie importée à Venise de Damas vers 1400, les Vénitiens commerçaient beaucoup avec l’Orient.
    Chandelier, dinanderie importée à Venise de Damas vers 1400, les Vénitiens commerçaient beaucoup avec l’Orient.

    Le cuivre à Villedieu

    Si la région ne possède pas de mines, il semble bien que le cuivre y ait été travaillé dès le début du XIVe siècle, puisque les premiers statuts des « poesliers » ont été approuvés en 1328-1329. Vraisemblablement, on doit la naissance de cette corporation au fait que Villedieu était située à la croisée de nombreuses routes, à la présence de la Sienne et aux privilèges accordés par Henri 1er Beauclerc à l'ordre de Saint Jean-de-Malte, dispensant les populations de nombreux impôts. Cette incitation fiscale a dû jouer un grand rôle dans le regroupement des artisans du cuivre à Villedieu. Ce sont actuellement une dizaine d'artisans et quatre entreprises qui perpétuent cette tradition.